Part 1 - Mars 2009

A vous qui allez lire ça… Salut ! C’est Ashmedi, guitariste, chanteur et fondateur du groupe Melechesh, qui vous écrit.

Cet article fait partie d’une colonne personnelle écrite au départ pour MetalNews.de et Decibel Magazine, qui abordera ma vie personnelle et d’autres pensées aléatoires. Je pense que cette colonne est un projet intéressant pour plusieurs raisons : parmi d’autres et premièrement, je sais qu’en organisant mes pensées et en repensant à certains évènements de ma vie, un certain ordre pourra se rétablir quant au chaos en cours dans ma tête. Deuxièmement, mon groupe et moi avons remarqué que nous étions victimes de beaucoup de désinformation quant à nous-mêmes, notre histoire et nos origines. Ainsi, vous obtiendrez des informations directement à la source.

J'essaierai d'être aussi proche de vous qu’il est possible de l’être, bien que j’ai choisi de ne pas révéler certaines choses que je considère comme extrêmement personnelles ; parler de moi n'est pas si facile, croyez-moi.

Je suis né dans la "Ville Sainte" de Jérusalem de parents arméniens/assyriens qui, eux-mêmes, se sont installés là en provenance de l'étranger plusieurs années plus tôt. Contrairement à ce que prétendent certaines suppositions massives, ma famille n'était donc ni Israélienne, ni Juive, ni Palestinienne, ni même d’origine Musulmane car les miens étaient plutôt des Chrétiens modérés pas très pratiquants. Mon père était designer de vêtements, mes parents avaient monté un business dans la mode et financièrement, les choses avaient plutôt bonne mine. Quand j’étais en bas âge, j’ai été baptisé malgré moi par l’Eglise Assyrienne à l’intérieur des vieux remparts de Jérusalem ; personne ne m’a demandé mon avis, c’était leur choix… L'emplacement a cependant un contexte historique significatif, puisqu’on dit que cette église aurait été bâtie à l'emplacement exact où a eu lieu la Cène, c’est-à-dire le dernier repas de M. Jésus et de ses apôtres, etc... etc…


Comme je l'ai dit auparavant, les choses se passaient bien pour ma famille jusqu'à ce que, soudainement, un jour, mon père soit tué dans un accident de voiture (en réalité, c’est la grand-mère de Moloch, mon guitariste actuel, qui est venue apprendre la nouvelle à ma mère et la faire sortir de l'hôpital, en lui disant d’abord que mon père était blessé, pas mort, parce que personne ne savait comment lui révéler la nouvelle) ; j’avais seulement 5 mois, mon frère 7 ans et donc, pour ma mère,  diriger seule notre affaire s’est révélé être une tâche très difficile, sans oublier le fait de nous élever dans un pays étranger (pour votre gouverne, elle-même avait perdu ses deux parents à l’âge de 11 ans. Elle avait commencé à travailler à l'âge de 9 ans et ne s'était depuis lors jamais arrêtée). L'affaire avait été fondée à Jérusalem-Est, donc dans un type de société plutôt dominée par les hommes : elle est donc devenue le patron de plusieurs salariés masculins, ce qui était aussi un défi en soi, mais on l'a très vite admirée et respectée pour ça à Jérusalem-Est. Financièrement, les choses ont pris une mauvaise tournure mais la famille a persévéré dans un pays versatile, encore plus quand on est un parent isolé.

J'avais une tante qui vivait à Dakar, Sénégal, qui était partie là-bas pour des raisons professionnelles.  Elle nous a alors invités à venir passer du temps chez elle, comme elle avait une très grande propriété avec des employés de maison, un jardinier, un cuisinier... (la maison appartenait en fait au frère du Premier Ministre sénégalais et apparemment, son entreprise l’avait louée pour elle et sa famille). Donc ma mère a nommé un directeur pour gérer son affaire à sa place à Jérusalem et nous sommes tous allés là-bas. J’avais presque 2 ans et alors que je commençais à peine à parler, l'ironie a voulu que je me retrouve tout le temps en compagnie d’une baby-sitter qui me parlait en français. Ainsi, j'ai commencé à répondre ou à faire des remarques en français à ma famille.

Ce voyage africain fut constitué de trois séjours séparés assez longs, ce qui fait que nous sommes restés là-bas environ 2 ans dans la globalité. Je pense que mon contexte familial international, mes premières expériences de voyage m’ont ouvert à de nouvelles cultures, tout comme la nature très cosmopolite de Jérusalem, sur beaucoup de niveaux différents, de par l’histoire antique du lieu ; tout ça fait que j’ai aujourd’hui la même perception de la ville que les expatriés ou les diplomates qui vivent là en raison du statu quo du secteur.



Part 2 - Avril 2009

Salut tout le monde !

Je suis actuellement assis à Jérusalem, en train de rédiger la deuxième partie de ma colonne mensuelle. Je vais retourner chez moi, à Amsterdam, NL, dans deux jours pour préparer Melechesh et moi-même à quelques festivals à travers l’Europe et surtout à un événement spécial à Dubaï, au Moyen-Orient. Être ici à Jérusalem est toujours aussi intéressant, aussi bien dans un sens positif que négatif. Mais je suis connecté à cet endroit et le serai à jamais bien que je reste complètement à l’écart des gens d’ici, qui sont aliénés par l’endroit lui-même.  

Retour en arrière. Un événement rare s’est un jour produit, ce qui a fait que ma mère a dû arrêter d’argumenter certaines discussions où elle me rappelait qu’ « elle m’avait donné la vie ». Mais depuis cet événement rare dont je vais vous parler, à chaque fois qu’elle disait ça, je lui répondais avec humour, « alors, nous sommes quitte ». En effet, un jour, ma mère a été prise de violentes crampes derrière la jambe alors qu’elle était dans la piscine. Elle a commencé à se noyer et avait presque renoncé à tout espoir. Je suis donc venu près du bassin et lui ai simplement tendu la main, l’aidant alors à sortir de l’eau. Elle m’a dit que je lui avais sauvé la vie. Nous sommes donc quitte ! 

J’ai été inscrit dans une école privée très stricte et catholique, située dans le Vieux-Jérusalem. Et c’était très… gris. D’un point de vue philosophique et spirituel, si on peut appeler ça comme ça, c’est là que j’ai commencé à entrevoir certains schémas des croyances humaines, qui m’ont vraiment dérangé. D’un autre côté, il y avait un vrai fourmillement de pensées et d’idées. Par exemple, quelques-uns des amis de la famille étaient francs-maçons, bien qu’à cette époque, les choses restaient très secrètes. J’ai toujours eu l’impression que ces gens faisaient partie d’un truc pas ordinaire. Ce n’est que bien des années plus tard que j’appris qu’ils étaient en fait francs-maçons. A cette époque, je me posais toujours des questions touchant à la création de l'Humanité, sur ce qui se trouve dans l'Espace, par rapport aux choses que nous connaissons déjà - et ce qui est au-delà de l'Univers (s'il a une fin).

D’un point de vue musical, mon frère, qui a sept ans de plus que moi, a aussi étudié dans la même école. Je me souviens qu’il a pris des leçons de batterie pendant un certain temps. Je devais attendre à l’extérieur de la pièce, la porte fermée, qu’il ait fini son truc pour pouvoir rentrer à la maison. Je me souviens très clairement de lui en train d’essayer d’apprendre un rythme de batterie sur lequel il a vraiment galéré ; je n’arrivais pas à comprendre pourquoi c’était si difficile, pourquoi ça lui prenait autant de temps et d’énergie. Je pensais que ce rythme de batterie était facile et logique mais comme je l’ai dit, je n’étais pas autorisé à entrer dans la pièce. Sauf qu’une fois, la porte est restée ouverte après une leçon et il n’y avait personne. J’ai alors couru, me suis assis derrière le drumkit et me suis mis à jouer ce rythme avec la paume de mes mains ; je n’avais pas de baguettes. Maintenant, vous allez peut-être vous demander pourquoi je parle de batterie alors que je suis guitariste. En fait, dans MELECHESH, j’écris aussi les parties de batterie mais je ne passe pas beaucoup de temps à pratiquer. J’aime juste beaucoup l’instrument.


A la maison, la famille avait toujours un truc de rock qui tournait dans la stéréo. J’ai été vite imprégné par le son des guitares mais je n’ai eu la chance de jouer de la vraie guitare que plusieurs années plus tard. Quand la musique se fit plus heavy, je me rappelle très bien du jour où mes potes et moi avons entendu le truc le plus extrême qu’il nous avait été donné d’écouter ! Nous avions 8 - 9 ans…  Ce n’était pas du Metal mais du punk rapide : nous avons écouté un LP d’EXPLOITED nommé « Troops Of Tomorrow ». J’ai de suite pensé que ce disque était bon. Lourd et rapide, et marrant aussi ! Très peu de temps après ça, nous avons pu avoir en mains nos premiers albums de Heavy : IRON MAIDEN avec « Number Of The Beast » et MÖTLEY CRÜE avec « Shout At The Devil ». Nous aimions le titre « Invaders » de Maiden, parce que quand nous étions gamins, nous jouions à la guerre et autre merde du genre. Mais en fait, je préférais Mötley Crüe. Je me souviens avoir beaucoup écouté « Shout At The Devil » sur un de ces vieux walkmans… J’aimais vraiment ça et j’étais très intimidé par la noirceur de l’intro (« In The Beginning ») et par les accords de force joués par Mick Mars.

J’ai même pris avec moi cet album lors d’un de mes voyages à travers la Jordanie, la Syrie (Damas et Alep – Ndlr : d’où est originaire la grand-mère d’Ashmedi). Rappelez-vous : la Syrie et Israël étaient (et sont toujours) des ennemis politiques, mais grâce à nos passeports qui ne sont pas israéliens, ma famille et moi avons été capables de visiter ces endroits, malgré d’intenses procédures à la frontière. Être ici à Jérusalem, aller à Amman ou Damas, voir de très vieilles ruines ou même carrément vivre avec ça autour de moi, c’est ainsi que mon esprit s’est éveillé à l’histoire et à la mythologie.



Part 3 – Mai 2009

Me voilà de retour de Dubaï et je peux vous dire que ça a été une expérience unique ! Je voulais m’imprégner de cet endroit, j’y suis donc resté plusieurs jours après que nous ayons joué dans ce gros festival et ce fut une bonne décision. L’endroit est très dynamique et les gens que j’ai pu rencontrer là-bas sont super. Je me suis assis en plein désert avec mon groupe sous une tente de nomades typique, nous avons fumé un narguilé à la sheesha (pipe à eau avec du tabac aromatisé), avons bu quelques verres de vin alors que le soleil se couchait, tout en écoutant de la musique arabe traditionnelle. Je me suis soudainement tourné vers eux et leur ai dit : « c’est quand même très intrigant, là où nous mène Melechesh » ! Des villes les plus sauvages aux villages les plus calmes, des villes les plus sacrées aux endroits les plus décadents, des fjords et des montagnes enneigées de la Scandinavie au sable du désert, tout ça se trouve sous le drapeau du thrashing black-metal Sumérien ou du Metal mésopotamien plus largement, donc de notre musique ! Incroyable, quand j’y pense. Je pense que je reviendrai à Dubaï quand j’aurai un peu de temps, mais avant ça, je dois aller à Istanbul, d’un point de vue culturel, spirituel (spécialement le côté occulte de la ville et les sectes Sufi) et en dernier mais peut-être la chose la plus importante, la perspective musicale. Istanbul a toujours été un point central entre l’Est et l’Ouest et la musique s’y est développée là en conséquence.

Tiens, je me rappelle subitement d’une chose dont je n’ai pas encore parlée dans ces colonnes. La première fois où j’ai été saoul, j’avais 5 ans. Ce qui s’est passé, c’est que le prof a appelé ma mère pour lui dire que j’étais probablement malade parce que je n’arrivais pas à marcher droit. Et j’étais certainement trop petit par rapport au prof pour qu’il puisse sentir mon haleine. Donc ma mère a quitté son boulot et est venue me chercher. Alors qu’elle était en train de me préparer un remontant et qu’elle allait appeler le docteur, elle m’a demandé si j’avais la moindre idée de la raison pour laquelle j’étais malade. Quand elle fut assez proche, je lui répondis : « Je ne sais pas. Par contre, la pièce tourne ». Naturellement, ce ne fut pas très subtil comme réponse. Elle sentit ma bouche et me demanda : « qu’as-tu bu ? ». Je lui répondis qu’avant que le bus ne vienne me chercher, j’étais allé dans le salon de la maison, avait ouvert la porte où se trouvait des bouteilles et que j’avais bu une bonne rasade d’un jus de fruits épicé. C’était en fait de la liqueur !

La dernière fois, je vous ai parlé de mes nombreux voyages au Proche-Orient, dans des villes qui ont été bâties il y a des milliers d’années et qui ont été le berceau de plusieurs cultures intrigantes et d’empires. J’ai été assez chanceux de pouvoir développer ce que j’y ai vu au travers du Metal, comme je l’ai dit. J’ai démarré avec du Punk et du Heavy. Mes potes et moi, alors que nous devenions des adolescents, cherchions sans cesse l’adrénaline et l’aventure, donc nous nous sommes mis à pratiquer des sports extrêmes comme le BMX et le Skate-board (qui n’en a pas fait ?!!). Mais c’est surtout dans ce truc appelé Thrash-Metal que nous nous sommes lancés corps et âmes. Cette musique et ces sports s’accordaient parfaitement. La plupart des skaters écoutaient de la musique extrême et parmi eux, beaucoup étaient attirés par le thrash : la manière dont les guitares sonnaient nous scotchait ! La production des albums de METALICA ou d’ANTHRAX était si heavy ! Ces guitares sonnaient vraiment d’enfer et exprimaient en fait très bien ce que je ressentais. On utilisait même nos skates comme des guitares… Pas mieux pour le air-guitar ! Mon groupe d’amis était très international : un était Palestinien (et c’est toujours un de mes meilleurs amis), un était Philippin, il y avait là aussi des Américains, trois Finlandais, un Suisse, parfois un Ghanéen, un Hollandais et un Allemand et aussi des Israéliens, que nous emmenions avec nous sur les rampes de skate-board. Nous aimions tous plus ou moins la même musique et c’était du MEETTTAAALLLL !!!! Le groupe le plus heavy était SLAYER, c’était un truc dangereux. Un jour, un clip était passé à la télé, mais je ne savais pas de quel groupe il s’était agi. Mon pote, le lendemain, me dit : « tu as vu ce clip ? ». « Oui, et ce chanteur aveugle est trop bon » ! En fait, le chanteur en question fermait les yeux pendant toute la chanson, en jouant de la basse. Ce fut le premier clip de Motörhead que je vis et la chanson, c’était « Ace Of Spades ». « Mais non, mec, il n’est pas aveugle, il est juste trop cool… » ! Ce fut le genre de discussion que nous eûmes la première fois quant à Motörhead…

Généralement, nous nous mettions à l’écart de la société, qui était trop bizarre par rapport à notre style de vie et par rapport à ce qui se passait autour de nous, surtout la politique. Ce fut l’époque des premiers soulèvements (palestiniens), les choses ne se passaient pas bien mais nous essayâmes de rester nous-mêmes. Ce ne fut pas toujours possible. Essayez de ne pas pleurer quand des gaz lacrymogènes flottent dans l’air, en provenance de chez vos voisins. Ça craint. Tout le monde avait sa solution au problème : ne vous lavez pas les yeux, ça ne fait qu’empirer les choses au niveau des yeux, de la gorge et des sinus. Couvrez-vous la tête d’un t-shirt. Essayez de vous protéger avec des lunettes de plongée, certains l’ont fait. Vous pouvez aussi couper un oignon en deux et le renifler, ça peut aider. Toutes ces suggestions ont pu être essayées avec le temps… Notre communauté n'a pas voulu trop s’impliquer mais avec le temps, nous avons développé nos avis sur ce qui se passait dans le secteur. Et personne n’était tout noir ni tout blanc. Plutôt toujours gris et très compliqué. Mais je n'en dirai pas plus parce que ça ouvrirait la Boîte de Pandore. Et certains pourraient activer leurs programmes pourris et probablement mal interpréter ce que je dis. 

De toute façon, quand mon voisin, un pote de longue date, fut descendu de 5 balles dans le corps – il se trouva au mauvais endroit au mauvais moment – à l’âge de 14 ans, ma mère dit : « c’est bon, on s’en va d’ici ! ». Les balles ne s’arrêtent pas pour poser des questions. Techniquement, je n’étais pas impliqué dans les problèmes politiques. J’étais supposé de par mon origine être neutre et protégé mais comme je l’ai dit, les balles ne posent pas de questions et voir des gens de mon entourage tomber les uns après les autres ou se faire arrêter pour rien me rendait malade. C’est ce qui m’est arrivé quand quatre soldats bien hargneux m’ont bloqué, avant de me demander mes papiers. Quand ils virent mon passeport, ils se rendirent compte que j’étais un habitant étranger et s’excusèrent, me laissant passer avec ma famille.

Nous avons donc déménagé à… Los Angeles, Californie, USA, où ma deuxième tante vivait (à Hollywood). J’étais très content d’être arrivé là, bien qu’à nouveau, cet endroit comportait son lot de vices et de violence gratuite. Malgré ça, j’ai aimé cette ville. J’ai été inscrit dans un Collège et j’idolâtrais mon plus vieux cousin. Pourquoi ? Simplement parce qu’il avait de longs cheveux, des jeans moulants et qu’il avait vu Metallica se produire au début de leur carrière dans de petits clubs, avec même Dave Mustaine ! Hell yeah ! Donc, pour moi, ce cousin était le mec le plus cool de la Terre.

Je me suis fait de bons potes là-bas et j’ai commencé à me rendre compte de la manière dont les gens percevaient Jérusalem. Mes potes pensaient que je bluffais quand je disais que je venais de Jérusalem parce que :
1) Je parlais déjà très bien anglais. Normal, puisque je parlais en anglais la plupart du temps à Jérusalem, du fait du caractère international de la communauté où j’évoluais et aussi à l’école…
2) Comment avais-je pu écouter du Metal à Jérusalem ? Je veux dire, comment j’avais fait pour me procurer mon t-shirt de la tournée mondiale d’Ozzy pour Bark At The Moon ? En fait, on me l’avait envoyé de Los Angeles… Tout comme mes t-shirts de Mötley Crüe et Van Halen.
3) Comment pouvais-je faire autant de trucs avec mon skate-board alors que Jérusalem se trouve en plein désert et que les gens vivent dans des tentes de nomades ? Tu ne peux pas utiliser un skate dans le sable !
Je me marrais bien, mais en même temps, ça me gonflait, quand j’entendais de tels arguments. La même chose se produit encore aujourd’hui, de toute façon. D'une part, il n'y a aucun Sahara sablonneux à Jérusalem. Il y a des régions boisées. C'est un peu sec, certes, mais ça ressemble à d'autres régions de la Méditerranée comme la Grèce ou l'Italie du Sud. Derrière Jérusalem, il y a un type différent de désert. C'est une sorte de terrain de calcium sec, qui ressemble un peu à une planète étrangère, un endroit vraiment mystique...

De toute façon, Los Angeles a renforcé encore plus mon goût pour le thrash, que j’avais déjà en moi. A partir de là, ma vie ne tournerait plus qu’autour de la musique !!!



Part 4 – Juin 2009

Le Festung Open Air, en Allemagne, fin mai, a été une très bonne date, avec de bons groupes et nous y avons retrouvé pas mal d’amis. Je n’avais pas vu Proscriptor (batteur d’Absu, ex-membre de Melechesh) depuis plus de 5 ans, bien que nous soyons toujours en relation quasi-journalière.

La dernière fois que nous nous étions vus, c’était lors du 1er show de Melechesh à Toronto, au Canada, en juin 2004. Ce fut un show mémorable puisque je fus électrocuté par mon pré-ampli alors que j’étais sur scène ; je fis comme si de rien n’était, continuant à jouer mais je me rappelle avoir vu une lumière blanche et un tunnel une fraction de seconde. A côté de ça, cette date avait été super, comme toutes les autres effectuées par la suite au Canada. Ce concert avait été organisé par Adrian Bromley d’Unrestrained Magazine. Adrian est mort l’an dernier, en décembre, et on a bien du mal à s’en remettre tant il était un de nos bons amis.

Mais revenons à des choses plus joyeuses avec le Festung Open Air, où Absu était aussi invité. J’ai été invité à chanter avec eux leur classique “Swords and Leather”, et à ce moment-là, le public est devenu dingue. Même mes potes de Melechesh se sont demandé ce que je foutais là, puisque Proscriptor et moi avions organisé ça un peu en secret. Un de mes potes d’enfance, Marc, se trouvait également à ce concert. Il est originaire de Suisse mais a grandi à Jérusalem, dans une maison voisine de la mienne. Je me souviens de cette époque où je m’étais mis à écouter Slayer, lui était à fond derrière Metallica, tandis que mes autres potes de quartier appréciaient d’autres groupes Metal. En fait, je me rends compte que j’ai grandi dans un environnement Metal. Lors du concert, Marc m’a rappelé que la dernière fois qu’il avait vu Melechesh en live, c’était lors de notre dernier show à Jérusalem avant que nous ne déménagions de là vers l’Europe, en 1998. Il avait bossé sur ce show en tant que membre du staff. Il est pilote maintenant.

Pour parler d’autre chose, sachez que Moloch est chez moi depuis plusieurs semaines à Amsterdam, afin d’écrire la fin du nouvel album de manière synergétique. Ça commence à vraiment porter ses fruits puisqu’énormément de nouveau matériel est né… nous nommerons ça des Épigénèses (Epigenesis). Ces sessions d’écriture sont très importantes parce que Moloch passe depuis deux ans énormément de temps aux USA, en Virginie, pour conclure son doctorat de philosophie. Voilà pourquoi nous avons organisé plusieurs sessions de travail à Amsterdam et Jérusalem cette année.

Dans mon précédent article, j’ai mentionné Los Angeles et mon retour à Jérusalem. Le fait est qu’au départ, je ne voulais pas quitter la Californie parce que j’y étais heureux, bien que mes potes à Jérusalem fussent irremplaçables. Et de toute façon, ce n’est pas moi qui décidais. A partir de là, je me suis jeté corps et âme dans la musique mais j’étais désespéré de ne pas avoir de guitare, il fallait que je trouve une solution coûte que coûte ! J’ai curieusement trouvé un jour un bout de planche coupé un peu en forme de guitare, j’ai alors construit mon premier prétendu instrument en collant un bout de bois en guise de stylet et en y ajoutant du fil à coudre en guise de cordes ! Hey, c’était un début ! Comme je l’ai déjà dit, il n’y a rien d’honteux à pratiquer l’air guitar. J’ai demandé à ma mère s’il était possible d’acheter une vraie guitare mais elle me répondit : « je fais déjà tout mon possible pour te mettre à l’école et te nourrir ; il va falloir te débrouiller tout seul ». Et elle avait raison, elle ne pouvait pas me l’offrir, spécialement à cause de la situation politique et du business qui allaient très mal à Jérusalem. J’ai alors fait plein de petits boulots, alors que j’étais mineur, mais ils craignaient tous alors j’ai laissé tomber. J’ai quand même mis de côté le peu d’argent que j’ai gagné ; à l’époque les shekels (monnaie israélienne) étaient les mêmes que ceux des temps bibliques ! He he… Chaque anniversaire ou autre était pour moi l’occasion de mettre de l’argent de côté, ce qui fait que j’ai fini par réussir à acheter une vraie guitare électrique. Je l’ai gardée deux ans mais devinez quoi ! La guerre du Golfe était sur le point de commencer !

L’atmosphère à Jérusalem a alors drastiquement changé, c’était vraiment flippant. Tous nos amis qui étaient de l'étranger sont partis, et de notre bande de potes, nous n’étions plus que deux. La municipalité a fait son job et a distribué des masques à gaz depuis que tout le monde croyait que des armes chimiques allaient être utilisées. Le kit masque à gaz était dans un carton fermé par un scotch. Tout le monde devait se balader avec ça dans la rue en cas d’attaque. A l’intérieur, on trouvait aussi une seringue un peu en forme de stylo ; une fois que vous le tournez, une aiguille apparaissait et vous deviez vous piquer avec ça si le masque à gaz ne fonctionnait pas. On trouvait aussi une sorte de poudre chimique, le masque à gaz lui-même et un filtre de rechange. Le devant du masque avait une paille de telle sorte que vous pouviez boire sans l’enlever, sauf que le mien n’en avait pas ! Nous avions reçu l’ordre de calfeutrer toutes les fenêtres des maisons et de mettre du scotch en croix sur celles-ci afin d’éviter leur explosion en cas d’attaque. Nous devions également désigner et préparer une pièce dans chaque maison qui nous servirait de refuge. Si les sirènes d’alarme avaient retenti, nous avions reçu l’ordre de nous y réfuger et de nous y enfermer, de couvrir le bas des portes avec un linge imbibé d’eau et de cette poudre chimique qu’on avait trouvée dans le carton du masque à gaz. Je me souviens très bien d’une fois où j’étais allé acheter un peu plus de scotch ; une bande de « moutons » discutaient dans la rue, en disant que la fin était proche, que nous allions bientôt mourir…


Et bien, la guerre a finalement éclaté et tout ce que tu peux entendre à ce moment-là, ce sont les F16 qui passent au-dessus de ta tête, car personne n’était dans la rue lors du 1er jour. Mais voilà : mon oncle bossait dans une compagnie d’aviation et nous eûmes donc la chance de pouvoir acheter les derniers billets disponibles dans le dernier avion qui allait quitter le pays, pour ma mère et moi, à destination de Miami, Floride, où mon frère faisait ses études et où mon oncle et ma tante vivaient également (ceux chez qui nous étions allés en Afrique plusieurs années plus tôt). Ainsi, la guerre commença la nuit suivante ; nous avions ces billets d’avion mais nous devions trouver un moyen d’aller à l’aéroport. Cette journée fut vraiment un jour difficile dans ma vie. Pourquoi ? Parce que comme je l’ai dit, tous mes potes étaient partis sauf moi et un autre gars et je devais lui dire que je me barrais aussi, et ça, ça craignait vraiment ! Nous avions beaucoup de bouffe stockée, et parmi ça, des caisses de Coca-Cola et des bières. On s’est alors assis sur le perron de ma maison pour picoler à mort, rotant comme des porcs et jetant nos canettes sur le balcon de nos potes suisses Marc et sa sœur, le tout en écoutant les F16 qui patrouillaient dans le ciel. Hormis leur bruit, on n’entendait rien, personne dans les rues, pas de sirènes, ce qui signifiait qu’aucun missile irakien n’avait encore été lancé sur Jérusalem. Mon ami fredonnait les parties de « Rust In Peace » de Megadeth, c’est vrai que c’était très approprié à ce moment-là. Le truc, c’est que tout le monde était convaincu dans les premiers jours que des missiles contenant des produits chimiques allaient être lancés sur Jérusalem et que beaucoup de gens allaient brûler, souffrir ou mourir. C’est ce que les gens et les médias croyaient. Je pris alors congé de mon pote et peu de temps après, je me dirigeai vers l’aéroport pour prendre le dernier avion qui quittait la « Terre Sacrée ».

Ce fut vraiment étrange car alors que nous étions dans le bus, en route pour prendre l’avion, les sirènes ont retenti dans la ville, ce qui signifiait que des Scuds avaient été lancés sur le pays. Nous avons eu le temps de décoller quand même au dernier moment et le pilote nous a expliqués dans l’avion que le dernier bus qui devait amener des passagers n’était pas arrivé à l’aéroport à temps, les gens ayant dû aller se cacher dans un bunker. Inutile de vous dire que nous fûmes très contents d’avoir pu partir. Le pilote venait d’avoir des informations comme quoi 2 Scuds avaient été tirés et le pire me vint à l’esprit, en imaginant mon dernier pote et sa famille mutilés… J’étais juste pétrifié par cette idée. Plusieurs longues heures plus tard, nous avons appris que les missiles n’avaient pas de tête chimique et ce fut un sacré soulagement ! Nous sommes finalement arrivés à Miami et le temps que j’ai passé là-bas fut résolument… METAL !!!



Part 5 – Juillet 2009

Me voilà de retour d’un superbe voyage à Istanbul, Turquie. C’était la 1ère fois que j’y mettais les pieds et j’ai beaucoup appris. L’aspect culturel du voyage fut particulièrement intéressant ; c’est à la fois une civilisation qui se construit avec des heurts et des moments de calme, le tout en bon équilibre. Le concept me rappelle ce jeu où on s’accroche une corde entre les pieds pour faire la course, sauf que dans le cas d’Istanbul, les fondations sont solides comme le roc et ils rockent !

La scène Metal y est absolument brillante, sans restriction de bars metal et de clubs, et ils ont tout compris du style, avec de la bonne musique et de bons trucs à boire. J’ai rencontré de vieux potes, m’en suis fait de nouveaux, j’ai discuté avec pas mal d’acteurs de la scène Metal de là-bas, développant des rapports bien amicaux avec le batteur du Pentagram turc (aussi connu sous le nom de Mezarkabul) : nous avons la même admiration l’un envers l’autre quant à nos groupes respectifs.
J’ai aussi pu faire une rencontre spéciale avec le chanteur/musicien très connu Harun Kolçak, qui est un rocker, qui écoute du Metal, tout en s’intéressant de très près à l’occultisme ; il est vraiment à fond dans le black metal alors qu’il est plus connu en tant que star pop/rock dans son pays. Harun m’avait écrit voilà plusieurs années pour me dire qu’il adorait Melechesh par rapport à la musique elle-même mais aussi par rapport à mes textes. Nous avions gardé le contact. Une fois mon voyage à Istanbul effectué, il m’a invité à venir passer quelques jours chez lui, où j’ai pu rencontrer plein de gens investis dans l’occultisme, dont certains écoutaient Melechesh alors qu’ils n’étaient pas spécialement des métalleux. Par exemple, il y a eu ce gars intéressant, un physicien nucléaire, pour qui il y a une relation entre les phénomènes physiques nucléaires, les radiofréquences présentes dans l’univers et les principes occultes. La manière dont il m’a expliqué son point de vue était extrêmement claire. Il y avait aussi cette artiste un peu étrange qui utilise des anciens habits ottomans de plus de 200 ans pour ses œuvres ; mais quand j’ai vu son travail, j’ai été bluffé.

Harun devait participer à un show télé quelques jours plus tard, c’était un show qui parlait des OVNIs. Il a parlé de notre rencontre et a aussi précisé à la télé que nous allions certainement jammé ensemble dans un bar avec son groupe perso, dans un petit club jazz où le mélange des genres est une institution. Nous avons fait cette jam et ce fut une expérience magique : tout fut improvisé, nous avions juste fait un petit sound check avant. Je me suis accordé comme eux et nous avons commencé à jouer devant les gens. La plupart de l’audience était composée de journalistes, de critiques musicaux et je pense que ça a plu. Heureusement, ce moment a été capturé en vidéo :




Avant que je n’aille à Istanbul, nous avons joué en France, au HELLFEST. Notre set était planifié de bonne heure et nous ne savions pas trop à quoi nous attendre. Mais petit à petit, dès que nous sommes montés sur scène, l’endroit s’est complètement rempli. Il y avait là des centaines et des centaines de fans et j’ai vraiment apprécié la réaction du public : les gens étaient vraiment à fond dedans. Le show fut vraiment trop court...

Mais revenons un peu à Jérusalem... La dernière fois que j’ai parlé de ma ville natale, c’était pour évoquer la première Guerre du Golfe, quand nous sommes partis à Miami de manière précipitée. La première chose que j’ai faite en arrivant là-bas fut d’appeler mon pote resté sur place ; il me répondit que tout allait bien, qu’aucun missile n’avait été lancé sur la ville et que ceux qui étaient tombés ailleurs en Israël ne contenaient pas de tête biologique ou chimique. Les gens de Jérusalem n’y ont donc plus prêté grande attention, et quand les sirènes retentissaient par la suite, les gens restaient dehors à regarder les Scuds, aussi longs qu’un autobus selon leurs dires ( !!), passer littéralement au-dessus de leur tête, pour aller ensuite s’écraser sur la côté, à plus de 60 km de là !

Miami, ce fut une aventure complètement dingue. Nous y sommes arrivés en janvier mais il y faisait aussi chaud qu’en été ! Mon oncle avait une piscine (avec un bar juste à côté, Yesss...), un jaccuzi, un long bateau rapide et une très belle maison en banlieue. J’aimais vraiment cet endroit. Comme quoi certains désastres comme la guerre peuvent quand même avoir du bon ! Nous avions vraiment besoin de cette quiétude après le stress que nous avions enduré à Jérusalem avec le début de cette première Guerre du Golfe ! MTV, à cette époque, passait du Metal à longueur de journée, avec le clip de “Painkiller” de Judas Priest en boucle, mais aussi Ozzy, Slayer (“War Ensemble” et “Seasons in the Abyss”), Suicidal Tendencies, Metallica, Anthrax, Megadeth et quand j’ai finalement pu voir les clips de Napalm Death pour “Suffer the Children” et de Morbid Angel pour “Immortal Rites”, lors de l’émission Headbanger’s Ball, je suis resté sur le cul. J’appelais souvent mon pote à Jérusalem pour savoir si tout allait bien et quand je me suis rendu compte que finalement, les choses n’allaient pas si mal là-bas, j’ai été moins inquiet et ai pu commencer à apprécier mon séjour à Miami.

La meilleure partie restait encore à venir : je suis allé voir Slayer durant leur Season’s In The Abyss Tour et c’est Testament qui ouvrait pour eux, pour promouvoir leur album Souls Of Black. Le concert se déroulait au Cameo Theater de Miami et c’était la première fois que j’assistais un show « professionnel ». Pour une première fois, ce fut quand même spécial parce que je m’étais placé devant les enceintes et j’ai alors été exposé à des volumes dont je n’avais pas idée. Ce fut un show intense ! Je me rappelle avoir acheté un gros patch dorsal, celui avec l’aigle allemand en emblème. Quand le show s’est terminé, mon frère et moi sommes repartis vers la maison en Jeep, et nous nous sommes arrêtés pour becter quelques burgers. Alors que nous repartions, j’ai vu le bus de Slayer arriver. Avant même que mon frère ne puisse dire quelque chose, je me suis penché hors de la voiture, pour me rapprocher du car, exhibant mon nouveau patch dorsal, en hurlant « Slayer » aux fenêtres du bus !! A ce moment, mon frère tint son volant d’une main et de l’autre mon jean, de peur que je ne tombe de la voiture. C’est vrai qu’il n’y avait plus que les jambes dans la voiture et que j’aurais pu me blesser gravement en gueulant comme ça. Mon frère n’aimait pas le thrash metal, juste quelques groupes de heavy et de hard rock. Quand nous sommes rentrés à la maison, nous avons réveillé tout le monde tellement nous parlions fort à cause du fait que nos oreilles avaient été mises à rude épreuve durant le concert. Nous étions à moitié sourds et nous ne nous sommes pas rendu compte que nous foutions un bordel pas possible ! J’ai encore remercié mon frère la semaine dernière pour m’avoir emmené à ce concert, c’est vous dire si ça m’a marqué ! Merci Eddie !    

La Guitare maintenant ! Quelques jours après ce concert, je suis allé dans un magasin d’occases m’acheter ma première guitare électrique. J’hésitais entre deux modèles, soit une forme Explorer ou une Flying V. Je n’y connaissais rien en guitares et n’avait jamais « vraiment » joué de guitare électrique. J’ai acheté une Hondo, une guitare générique qui était très lourde et qui avait déjà pas mal servi, avec une forme d’Explorer. Je l’ai payée 70 $ ; comme je vous l’avais dit auparavant, j’avais économisé à Jérusalem ! J’avais aussi besoin de fric pour acheter une lanière et un ampli. Ma lanière avait des clous et même une chaine ! Arrgghhh ! Et finalement, j’ai acheté un tout petit ampli de 10 watts qui captait occasionnellement une radio cubaine. Immédiatement, je me suis mis à apprendre à jouer, sans que je ne sache comment accorder cette guitare ou placer un quelconque accord de force typique du Metal. Je suis retourné 3 fois au magasin ce jour-là parce que j’ai cassé des cordes. Je ne savais même pas qu’on pouvait acheter un paquet complet de cordes ! J’ai juste dit : « je veux la deuxième corde, la quatrième... ».

Plusieurs mois ont passé et ma mère et moi prîmes un jour la décision de rentrer à Jérusalem, bien que nos sentiments fussent assez partagés à ce propos. Mais j’avais enfin ma guitare électrique et j’étais donc prêt à crâner devant mes potes avec cette lanière si spéciale, un truc que personne n’avait encore vu en vrai, sauf dans les magazines ou à la télé ! Mon histoire de musicien Metal venait de commencer !



Part 6 – Août 2009

Je suis de nouveau à Istanbul pour y passer 5 semaines : bonne nourriture, bon temps, bonne compagnie et bonne musique. Cependant, afin de respecter le timing de l’écriture de l’album et la réalisation de démos, nous avons décidé de faire venir Max, du Studio Sulphonic, de Rotterdam à Istanbul ; il a passé 5 jours ici, nous avons établi un projet de studio et fait quelques trucs, même si je dois admettre qu’on s’est quand même pas mal dispersé. A propos, j’étais réticent pour mentionner ça dans la 5ème édition de cette colonne, mais des choses étranges et intéressantes me sont arrivées ici, d’un point de vue occulte et spirituel, même les gens autour de moi l’ont remarqué : des prédictions, des scénarios, des corrélations illogiques, tout ça s’est produit.

Comme je l’ai mentionné dans la colonne 5, ma mère et moi quittâmes Miami pour revenir à Jérusalem, armé de ma vieille mais sacrée guitare électrique Hondo Explorer (l’Explorer étant un modèle comme celui que James Hetfield utilisait à l’époque) et de ma lanière bien evil, celle avec les chaînes. Avec ça, mon ampli de 10 watts, quelques nouveaux albums et mon patch dorsal Slayer, avec l’aigle en emblème. J’étais bien le seul à avoir ça à Jérusalem puisque mon frère était resté aux USA. Mes potes furent bien impressionnés par ma guitare ! C’était si Metal !

Mon meilleur pote et moi commençâmes à passer beaucoup de temps à jammer dans ma cave, la transformant petit à petit en salle de répète. Il utilisait des bidons rouillés recouvert de scotch (il en restait des tonnes de la guerre qui trainaient partout) en guise de batterie, et curieusement, ils sonnaient bien avec ses baguettes (c’étaient de vraies baguettes de batterie), même si souvent, le scotch craquait et qu’il fallait réparer sans cesse. La batterie faite à la main comportait aussi des cymbales merdiques qu’on avait récupérées dans une école maternelle ; elles étaient suspendues à de fines tiges, qui étaient fixées dans de grosses boîtes en carton. Ces boîtes étaient aussi la base des bidons... enfin, je veux dire, de la batterie de Tom. Il a finalement acheté une caisse claire, c’était une deuxième main qui comportait un logo d’aigle peint à la main ! He he ! J'ai trouvé un grand carton rectangulaire qui devint la base pour mon antenne TV en alu et avec un ingénieux système de démontage et remontage, nous parvînmes à transformer cette atrocité en un fragile pied de micro ! Comme micro, et bien, c’était le classique micro bleu en plastique issu d’un jeu de karaoké, mais celui-ci avait un câble. Je l’avais acheté dans la vieille ville de Jérusalem. Nous commençâmes à composer et sortirent alors de vieux classiques comme « Scimitars Of Demons ». Je me rappelle aussi d’un titre appelé « Hell Is Our Base », ou un truc comme ça et deux autres titres encore. C’était vraiment nul !! Nous ne savions pas comment jouer mais nous faisions une tonne de bruit et nous aimions ça ! Je pense que ce fut vraiment thérapeutique, je parle pour moi en tout cas : j’étais frustré et stressé par tous ces gaz lacrymogènes qu’on respirait et par ces tirs occasionnels de balles en caoutchouc autour de mon école de Jérusalem-est. Il y avait aussi ces bus de transport en commun qui avaient explosé à Jérusalem-ouest. Rétrospectivement, après analyse, je pense que jouer fort et heavy m’aida à enlever cette chape de plomb de ma tête et d’avoir l’esprit plus libre.
 
A côté de l’école et de nos activités de « groupe », nous sortions pas mal en ville, le plus possible en fait. Tout y était possible, comme rencontrer des gens bizarres, bastonner, se faire de nouveaux amis, rencontrer des filles, picoler pas mal, ou prendre un café en terrasse, moment parfois interrompu par l’explosion d’un kamikaze... ce qui n’était jamais un moment marrant.
 
Nous faisions salement la fête et heureusement, les patrons de pubs étaient cool par rapport aux limites d’âge. Du coup, nous sommes devenus des habitués et avions même une table réservée dans un bar appelé La Taverne (quel nom imaginatif). Nous passions aussi pas mal de temps à jouer aux jeux vidéos d’arcade et allions souvent au Cats’s Square, un endroit où traînaient des junkies, les chefs de bande Metal, les punks qui avaient l'habitude d'être assis la boisson à la main. Nous prîmes aussi l’habitude d'aller boire des coups dans le parc central, là où les arroseurs parviennent à refroidir un peu les chaudes nuits d'été, ou simplement à nous balader dans la ville, pour aller à la rencontre de potes, pour parler Metal, échanger des LP ou des cassettes, ou acheter des t-shirts... Le Death Metal régnait en maître à cette époque : tu ne pouvais pas te balader dans aucune rue sans croiser un Metalhead, sans voir un magasin spécialisé dans le Metal ouvert ou une petite salle très underground faire jouer un groupe local. Où que ça puisse se passer, les headbangers attendaient sagement dehors que les portes ne s’ouvrent, et alors, quand le club était plein à craquer, le concert commençait et tout le monde secouait la tête du début à la fin. Parfois, ces shows se passaient en semaine, et dans ce cas, je devais être rentré à la maison à minuit, sauf qu’il n’était pas rare que je rentre à 2 ou 3 heures du mat’. Aussitôt que ma mère m’entendait rentrer, elle descendait dans le salon mais à chaque fois, elle voyait que la pendule indiquait 23 h 55 ou 00 h 15 au plus tard, car voyez-vous, dès que je rentrais chez moi, je déplaçais les aiguilles. Tant qu’elle voyait que je respectais les horaires, ça allait et dès qu’elle était recouchée, je remettais la pendule à l’heure, si bien que le matin, elle ne s’était rendue compte de rien.

A l’école, la même école catholique bien grise, les choses craignaient aussi pas mal : les activités sportives et de loisir, les classes inutiles, tout ça fut abandonné à cause des contraintes de temps. Vous voyez, à Jérusalem-est, à cause de l’agitation qui régnait, en moyenne, nous allions à l'école 3-4 jours par semaine, ne passant en réalité que des demi-journées en cours. L’école était un établissement français avec un système éducatif britannique, mais ils ont dû s'adapter à la situation locale. J’étais un exclu, car le seul headbanger de ma classe, mais c’est là que j’ai commencé à recruter car en tout, nous devions être 8 ou 10 metalheads ! C’est là que j’ai formé un premier groupe avec Lord Curse (1er batteur de Melechesh) et nous avons réussi à convaincre l’école de nous laisser utiliser une vieille et négligée salle de répétition, car pour le coup, cette salle de classe pourrie était équipée de vieux amplis Marshall des années 70. Ce qui est encore plus drôle, c’est que ces amplis avaient été achetés à l’époque par l’oncle de Moloch, le guitariste actuel de Melechesh ! Il avait étudié dans cette école 20 ans auparavant et y avait formé un groupe, parvenant à se faire financer le matériel par l’école !

J’ai eu des problèmes dans cette école ; par exemple, ils ont essayé d’interdire mes nouveaux prodiges métalliques de traîner dans l’établissement sans trop savoir pourquoi, tout comme ils ont essayé de m’obliger à avoir les cheveux courts. Quand j’ai demandé au principal de me montrer le règlement intérieur qui stipulait cette clause, il s’est mis à gueuler en me disant qu’il n’avait pas besoin de se justifier. Pour rendre les choses encore plus compliquées, dans cette école, il y avait une statue de Jésus. Je lui ai donc demandé comment ça se faisait que Jésus avait les cheveux longs, en ajoutant : « le jour où vous mettrez une statue de Jésus avec des cheveux courts, je me couperai les miens »... Le mec a complètement flippé et a appelé ma mère. Elle arriva là très en colère contre moi et mon style de vie Metal extrême, et nous dûmes donc trouver un compromis. J’ai donc raccourci un peu mes cheveux. Evidemment, ceux-ci ont recommencé à pousser mais pour je ne sais quelle raison étrange, un jour, le principal m’a dit qu’il me foutrait la paix avec ça dans le futur. J'ai finalement fait un break…en 92 : j'ai rejoint un très bon groupe de Death Metal en tant que chanteur. L'année suivante, je faisais naître le Némésis, à savoir le Roi du Feu : Melechesh !



Part 7 – Septembre 2009

C'est dur à imaginer mais j'en suis déjà à la 7ème partie de cette colonne, ce qui signifie que ça fait 7 mois que je suis dessus... Moi qui pensais que je détestais écrire autre chose que des paroles, maintenant, je me rends compte que j'apprécie l'exercice et comme je l'avais mentionné au début, ça m'aide à remettre en ordre le chaos qui occupe mon esprit.

Je viens de revenir depuis peu à Amsterdam où j'ai dû rechercher en urgence un nouvel appartement et donc trouver rapidement de nouveaux meubles. L'autre jour, Al' Hazred, notre bassiste originel, est venu avec moi acheter ce dont j'avais besoin et nous avons fait appel à quelqu'un pour peindre mon nouveau logement et poser de la moquette, alors que j'étais dans le logement depuis 3 jours. L'endroit a une belle gueule maintenant, un sanctuaire pour la réfléchir et composer.

Quand j'étais à Istanbul, le mois dernier, j'ai négocié un endorsement avec Agean Cymbals, pour notre batteur XuL, qui fut très content d'apprendre cette nouvelle. Autre chose, la semaine dernière, on a fêté mon anniversaire et on s'est bien marré... On avait réservé une longue table dans un restaurant grec ; il y avait une bonne ambiance, de la bonne bouffe et surtout une quantité ridicule de vin doux grec, d'ouzo et de Jack Daniel's, qui ont rendu les choses intéressantes en fin de soirée ! Nous sommes ensuite allés en ville à Amsterdam, au bar métal The Cave, où le proprio nous a préparé des shooters dont il a le secret et d'autres bons vieux Jack... Ce fut une bonne soirée avec les membres du groupe et certains bons amis.

Mais bon, revenons à nos moutons. A la fin de la colonne 6, je mentionnais que j’avais eu beaucoup de chance de rejoindre un groupe de death metal. Je n’avais en fait jamais trop parlé en public de ce groupe car je n’en ressentais pas la nécessité par rapport à la carrière de Melechesh. Pour quand même rétablir le sens de l’histoire, sachez que ce groupe s’était formé sur les cendres de deux groupes de Jérusalem. Leurs membres avaient besoin d’un vocaliste donc ils m’appelèrent. On répétait assez souvent et je peux clairement dire que même encore maintenant, je pense que ces mecs avaient beaucoup de talent. Nous eûmes finalement la chance de donner un concert au Pargod Club, le plus underground de tous, et nous nous sentions prêts pour ça, d’autant qu’il y avait eu pas mal de pub pour le show et que nous étions donc attendus. J’étais tellement à fond dedans que je n’arrêtais pas d’y penser mais quelques secondes avant d'entrer sur scène, j'ai commencé à avoir d'autres pensées et à devenir très nerveux... J'ai commencé à me demander ce que je faisais là, pourquoi je le faisais, mais quand je suis monté sur scène, je me suis rendu compte qu'en fait, à cause de l'extrême intensité lumineuse des spots et le noir dans la salle, je ne voyais personne. La première chose que j'ai dite fut en fait une grosse connerie ! Alors que je voulais annoncer le nom du groupe, j'ai annoncé en fait le nom d'un des 2 groupes défunts sur lesquels s'était formé le nôtre ! J'ai alors dit : « Bonne soirée, Jérusalem ! Nous sommes Divinity ! ». J'ai entendu des rires. Je me suis alors rattrapé en disant que je déconnais et ai donné le vrai nom du groupe : « Nous sommes Crushed Cenotaph et cette chanson s'appelle ''Silence Has No Disguise'' ». Immédiatement, la musique commença et nous nous mîmes à tous headbanguer simultanément (comme les vrais militants Metal que nous étions.... humm, que nous sommes !). Je vis alors le public du bord de scène headbanguer aussi comme des maniaques, et je me suis rendu compte que tout le public en faisait autant quand les lumières éclairaient un peu la salle. A ce moment-là, je fus en pleine extase et c'est depuis ce temps, même si ça sonne cliché à mort de dire ça, que j'adore l'énergie et l'adrénaline que procurent les concerts ; c'est inimaginable.

  
J'étais vraiment très impliqué dans le Metal underground international par le biais du tape-trading, recevant et envoyant des flyers, des fanzines et des lettres du monde entier. Les emails n'étaient pas encore utilisés par l'underground ; c'était un monde et une manière d'agir complètement différents : envoyer ou répondre à une interview prenait entre 1 et 2 mois, car il fallait tout écrire à la main, envoyer les courriers, etc... Je ne vais pas dire que ça me plaisait tant que ça parce que c'était un sacré boulot. Comme je l'ai précisé au début de cette colonne, je n'aime pas trop écrire. Bref, les choses ne se passaient pas trop mal pour nous mais je n'étais pas personnellement complètement satisfait, je sentais qu'il manquait quelque chose au groupe techniquement pour qu'il soit parfait. Je voulais faire quelque chose de plus sincère par rapport à mes goûts et mes envies.

Un jour, j'étais chez un pote à matter sa collection de vinyles pendant que lui et un autre pote jouaient au billard. Je suis alors tombé sur un disque de Bathory – The Return Album, que je n'avais jamais écouté (je connaissais seulement la version epic/thrash de Bathory, au travers des albums Hammerheart, Twilight Of The Gods et Blood, Fire, Death...). J'ai dit à mon pote que je n'avais jamais entendu cet album. Il me répondit alors que c'était naze, ce à quoi je lui répondis à mon tour que je jugerais par moi-même une fois que je l'aurais écouté. Je l'ai donc posé sur la platine et j'ai pris une claque monumentale. Je me suis retrouvé d'un seul coup complètement possédé par le titre ”Possessed And Total Destruction”… Je me rappelle très bien m'être alors dit à moi-même : « Ça, c'est sincère et ça a des couilles ! Voilà le genre de groupe que je veux monter, un truc qui ait cette vibration » !
 
Cette même année, mon meilleur pote quitta Jérusalem pour aller à l’université aux USA. Il y est toujours, où il bosse maintenant comme scientifique en chimie. Il m’a fait l’honneur d’être son témoin lors de son mariage en Califiornie il y a quelques années. J’en parle parce que lui et moi avons passé la majeure partie de notre temps libre ensemble à traîner et nous étions comme des frères. Les seuls moments où nous ne fûmes pas ensemble, c’est quand je quittai le pays suite aux évènements. Mais cette fois, la donne changea et c’est lui qui partit. Je pense qu’à partir de ce moment-là, je me suis encore plus réfugié dans la musique. J’ai alors commencé à pratiquer la guitare seul chez moi, juste pour tenter d’écrire des trucs bien evil et c’est à cette époque-là que je me suis rendu compte qu’ajouter des parties orientales et des schémas de batterie différents pourrait être une bonne chose parce que ça donnait une coloration nomade à la musique et que ça créait une nouvelle donne evil… En outre, avec le temps, j’étais toujours à me demander combien de groupes Metal semblaient utiliser des paroles relatant mon background musical, notamment grâce au succès de ce livre fictionnel, le Necronomicon, qui relate en fait les anciens dieux mésopotamiens / sumériens (bien qu’ils y soient mal représentés). Comme je suis en partie Assyrien - et oui, les gens ! Les Assyriens existent toujours, puisqu’il existe une diaspora arménienne d’origine assyrienne au Moyen-Orient et aux USA !! – je me suis dit qu’il serait logique d’ajouter des thèmes mésopotamiens à Melechesh. Je voulais inventer un son, le Black Metal du Proche-Orient et j’étais vraiment déterminé à y arriver. En outre, monter le premier groupe de Black Metal dans la Ville Sainte fut simplement un honneur, et je peux dire encore aujourd’hui que ce fut un luxe rare ! Quoique, le mot luxe n’est pas vraiment approprié car je n’avais aucune idée de l’accumulation de challenges qu’essayer de mener Melechesh à un statut professionnel allait engendrer. Même si je n’aime pas employer des idées toutes faites, je pense que les choses qui sont faites avec conviction finissent toujours par produire une substance dont est absente la médiocrité.


Ok, passons à autre chose maintenant. Vous vous souvenez certainement que j’ai abordé dans une autre colonne l’histoire de ce principal de collège qui voulait que je coupe mes cheveux longs et que j’avais avancé des arguments irréfutables afin de contourner cette obligation. Bien que je m’y sois plié un moment pour éviter de devoir toujours argumenter, très vite, j’ai laissé repousser mes tifs pour qu’ils soient finalement assez longs à la fin de mon cursus, qui a duré 3 ans. Alors que j’étais prêt d’avoir mon Bac, il a continué de se moquer de moi et même s’il était un Frère, un catholique, c’est lui qui ressemblait vraiment à un primate ! Il n’arrêtait pas de me dire qu’un jour, il m’aurait avec cette histoire. Moi, ça me faisait sourire. Et bien, alors que j’étais dans le dernier mois de mon cursus, le mec est revenu à l’attaque en me disant qu’il ne me laisserait jamais entrer dans la salle d’examens, à moins que je ne coupe mes cheveux vraiment courts. Je fus choqué par son comportement. Je lui ai dit : « Mais bordel, qu’est-ce que vous attendez de moi et pourquoi diable, ne me foutez-vous pas la paix, en me laissant faire ce que je veux de mes cheveux longs ? ». Il m’a répondu qu’il m’avait promis qu’il m’aurait un jour, qu’il ne me laisserait pas faire et que ce jour était enfin arrivé. Putain, il était vraiment sadique et flippant. Même 15 ans après être sorti de cette école, j’ai toujours la même piètre opinion de lui. Mais j’ai gagné !! J’ai refusé de couper mes cheveux, il m’a donc renvoyé chez moi, me refusant l’accès aux examens. Cette ordure voulait simplement ruiner mon futur mais j’ai gagné parce que beaucoup de gens de l’extérieur et d’autres de l’école qui m’appréciaient ont fait pression sur lui pour me permettre de passer mes examens, ce que j’ai fait. Je les ai réussis et maintenant, je suis titulaire d’un Master en économie (Bac + 5).

Mais revenons au commencement du projet Nemesis. J’ai commencé à écrire des chansons pour Melechesh, et franchement, j’aime toujours les quelques premiers titres que j’ai composés. J’ai recruté Lord Curse à la batterie et un guitariste que je connaissais. Mais comme je savais que ce mec était du genre fainéant, je lui ai donné une semaine pour apprendre mes titres en lui précisant que s’il manquait une seule répète sans raison valable, il était dehors. Ce qu’il fit évidemment, donc dehors ! J’ai alors discuté avec Lord Curse et le nom de Moloch est apparu, car il avait déjà joué avec Lord Curse dans un autre groupe auparavant. En fait, Moloch était issu d’une famille « distante » de la mienne (NDLR : Moloch est palestinien). J’ai dit qu’on pouvait faire un essai. Tout le monde était motivé à 100 % mais pas toujours très discipliné. Par exemple, nous ne trouvions pas toujours nécessaire d’accorder nos guitares avant de jouer et ça ne nous dérangeait pas plus que ça de jouer un ton ou deux en-dessous de la normale. On ne jugeait pas non plus obligatoire d’acheter de nouveaux médiators (on avait plus besoin d’argent pour la bière), donc on utilisait ce qu’on trouvait, comme des morceaux de cartes de téléphone qu’on découpait en triangles. Si on cassait une corde, on pouvait aussi très bien en utiliser une autre qui n’était pas de la bonne épaisseur, pourvu que ça marche ! Les pédales de double de Lord Curse étaient tellement mauvaises qu’il dut faire des soudures à l’arrache. Définitivement, nous devions improviser. Malgré tout, pour être parfaitement honnête, j’aimerais dédier plus de temps sur cette époque et vous donner plus de détails sur la manière dont Melechesh est né ; donc, je finis mon article là pour le moment et le mois prochain, j’insisterai plus sur Melechesh et vous parlerai des challenges qui se sont dressés devant nous mais aussi de nos échecs. 



Part 8 – Octobre 2009

Le mois a passé vraiment vite, tellement vite que j’ai eu à peine le temps de finir la colonne 7 qu’on m’envoyait déjà un mail pour me demander celle-ci ! Vraiment, le temps passe vite dans une vie ! Bref, je suis assis dans un avion, n’ayant rien à faire, donc autant tirer avantage de ce temps libre pour taper la nouvelle colonne mensuelle.
 
Quand j’ai commencé Melechesh, Jerusalem n’avait tout simplement pas de scène black metal, personne ne pouvait trouver de CDs de black et les 2 magasins spécialisés avaient soit déjà fermé leurs portes ou s’étaient orientés vers un nouveau modèle de business, pour s’accommoder à la vague naissante de fanatiques du grunge. Je n’ai jamais aimé ce style et à cette époque, j’avais vraiment une dent envers ça parce que beaucoup de metalheads avaient arrêté d’écouter du Metal et s’étaient juste focalisés sur ce nouveau truc. Aujourd’hui, mes goûts sont plus larges mais ça ne m’empêche pas de toujours me sentir jaloux quand une nouvelle mode musicale est susceptible de mettre à mal le Metal. Cependant, il y eut quelques survivants mais ils ne connaissaient pas le black metal, donc ce que je fis, c’est de commander un certain nombre d’albums de différents labels que je revendis aux gens que je connaissais, pas pour le profit mais uniquement pour répandre la bonne parole.

Pour revenir à Melechesh, le groupe me prit tout mon temps, c’était comme un appel divin et ensemble avec les autres gars du groupe, je savais que nous tenions un truc spécial. D’une façon ou d’une autre, les chansons étaient sincères. L’idée globale d’avoir du black metal couplé à des schémas de batterie orientaux sonnait super et faire ça à Jérusalem était juste magique. En ce qui concerne le nom du groupe, nous voulions quelque chose d'original contenant certains côtés occultes et nous voulions surtout être sûrs qu’il n’existerait pas quelque part un groupe avec le même nom. J’ai donc longtemps réfléchi et nous nous sommes creusés la tête, moi et un pote complètement féru de kabbale, qui est même devenu prof aujourd’hui sur ces thèmes. Nous arrivâmes à la conclusion que le nom du groupe nécessitait le mot Melech, qui signifie « roi » dans les langages de la région, l’Araméen, l’Hébreu et l’Arabe (avec différentes prononciations). J’avais souvent lu ce mot dans des livres occultes et j’aimais sa sonorité. Nous avons alors ajouté Esh pour « feu » omettant délibérément le Of de King Of Fire, afin de créer vraiment un mot de notre invention avec des références hébraïques et araméennes. Nous avons aussi créé une chanson intitulée « Malek al Nar », qui a exactement le même sens, mais en arabe, juste pour entretenir le fait qu’un jour ou l’autre, nous aurions à nous justifier du fait que des gens allaient penser que nous étions exclusivement palestinien ou israélien, ce qui dans les deux cas est complètement faux : nous avions un Palestinien dans le groupe (Moloch), qui est partiellement Assyrien, et moi-même, un Arménien Assyrien, et notre batteur qui était également Arménien. Parmi nos différents bassistes de l’époque, certains furent israéliens. Mais on s’en foutait, notre musique transcendant les mondanités politiques.

Mais depuis cette date, nous sommes faussement labélisés : certains disent que nous sommes Arabes, faux ! Certains disent que nous sommes Israéliens, faux ! Certains disent que nous sommes Juifs, faux (d’autant plus que si tu fais du black metal, tu ne peux appartenir à aucune religion). A chaque fois qu’on a dit non à une de ses affirmations, on nous a traités de racistes ! Un comble quand même, quand vous voyez nos origines multiethniques ! Le concept entier de racisme est très flou (même d’un point de vue sociologique et scientifique) et souvent sans rapport avec la réalité. Certains ont dit que nous étions Musulmans, c’est faux. Plus rarement, certains ont cru que nous étions Chrétiens, faux là encore (même si certaines de nos familles ont un background de chrétiens non-pratiquants). Tous ces essais de classification sont faux et nous avons toujours essayé de ne pas en parler, sauf que nous avons quand même nos identités et même si ça dérange certaines personnes, elles sont ce qu’elles sont. Être de Jérusalem ne signifie pas que tu doives être X ou Y, tant cet endroit a été le berceau de tant de peuples, minorités et nationalités différentes.

A l’époque, et pour aucune raison spécifique, nous n’avons pas tenté d’être associés aux autres groupes émergents de la scène black-metal du pays, voulant rester nous-mêmes. Par contre, nous avons fait des flyers pour répandre internationalement notre première démo de 1994. Après un an de correspondance acharnée, notre nom s’est mis à circuler un peu partout : aux USA, en Europe de l’Est, Amérique du Sud, Europe de l’Ouest… Tous se sont alors rendu compte qu’il existait une scène underground en Israël…

Ce fut un sacré challenge de réussir à garder la même salle de répètes. Comme je l’avais déjà raconté, nous avions commencé en jouant dans cette ancienne salle de musique de mon école, localisée dans la vieille ville. Ils nous avaient dit que nous pouvions l’utiliser mais le backline était très ancien (rappelez-vous que le matos avait été acheté dans les années 70 par l’oncle de Moloch). On a aussi essayé de répéter dans la maison de Moloch, à Bethlehem, mais après quelques répètes, nous décidâmes de retourner à Jérusalem parce qu’il était de plus en plus compliqué de franchir à chaque fois les check points militaires qui barraient les routes. Malheureusement, dans la pure tradition de cette école de merde, certains saboteurs dirent que nous avions ruiné le matériel afin que nous virions de là et qu’ils aient plus de temps pour jouer de leur pop propre et générique. Les gens en charge de la salle de musique nous informèrent alors que nous n’avions pas le droit de jouer « fort » car apparemment, les guitares distordues ruinaient le matériel. Nous ne comprenions pas pourquoi tout ceci se produisait alors que nous avions été les premiers à réutiliser cette salle poussiéreuse, que nous avions complètement remise en état. Néanmoins, nous continuâmes à jouer avec de la disto mais à chaque fois que le superviseur (qui était un de ces singes Catholiques) se pointait, nous coupions la disto avec nos pédales d’effets and continuions de jouer en acoustique, disant que si ça sonnait si fort de dehors, c’était à cause de la résonnance naturelle du bâtiment. Mais bien évidemment, je finis par être banni de cette salle. Mais ce n’est pas ça qui allait nous arrêter ! J’ai continué à aller là-bas et quand les mecs venaient voir si nous étions là, je me cachais derrière un gros ampli jusqu’à ce que ce vieux naze de superviseur ne se casse, après avoir fait son speech à propos des harmonies et de la « vraie » musique… Nous avons répété aussi occasionnellement dans un endroit pro mais c’était vraiment trop cher ; ceci dit, même encore jusqu’à aujourd’hui, c’est le studio de répètes pro que j’ai eu le plus de plaisir à utiliser !

Nous avons dû faire un break, le temps de trouver une solution quand j’ai eu l’idée d’aller voir une noble organisation de Jérusalem qui aidait les jeunes à se sortir de la drogue et d’autres trucs, car elle avait une superbe salle de répètes en bordure du parc central de la ville basse. La salle était grande et circulaire et avait été en fait aménagée dans un abri anti-bombardement. L’endroit était très underground mais était super bien équipé, avec même une salle de repos et d’autres trucs pour le confort. Avec le temps, je me suis retrouvé un peu plus impliqué dans cette organisation en tant que superviseur junior de la salle et on m’avait donné une clef. Ça signifie que nous pouvions répéter tard le vendredi soir puis aller en ville boire un coup dans les bars, et retourner à la salle ensuite si nous voulions jouer plus. Parfois, nous invitions des potes et nous jammions jusqu’à plus d’heure. Nous étions tellement isolés de l’extérieur dans cette pièce, en plus avec le volume auquel nous jouions, qu’une fois, un bus a explosé à 30 mètres de là et nous n’avons rien entendu. Dehors, c’était le chaos complet mais nous, nous avons continué à jouer pendant 3 / 4 heures. Nos familles ont vu les news à la TV mais nous restions évidemment injoignables. En plus, la sortie du bunker se trouvait à l’exact opposé de l’endroit où le bus avait explosé dans le parc, ce qui fait que nous ne nous sommes rendu compte de rien du tout, partant tranquillement à pieds pour rentrer chez nous. Quand je suis arrivé chez moi, j’ai vu ma mère vraiment pâle, et elle me montra les news. L’endroit avait été filmé sous toutes les coutures et ce fut marrant de voir que nous étions à 30 m de là en train de répéter et que nous n’avions aucune idée de ce qui venait de se produire.


A partir de fin 94, le groupe était stable et nous avions un nombre assez décent de titres. Nous avons fait quelques cassettes démos enregistrées en répètes que nous avons envoyées un peu partout dans le Monde. Nous avons aussi fait notre première démo pro que nous avons appelée de manière métaphorique As Jerusalem Burns et qui est sortie en 1995. Je me rappelle très bien du jour où nous avons reçu les cassettes de l’entreprise qui les avait faites : ils firent les cassettes, nous nous occupâmes des jaquettes, que nous avons toutes pliées une par une chez moi. Cette démo a été bien reçue mais certaines personnes croient qu’il s’agit de notre premier album car elle a été rééditée en CD depuis, ce qui est faux évidemment. De toute façon, comme je l’ai dit, le feeling était vraiment bon : nous faisions du black-metal dans la Ville Sainte en énervant vraiment tout le monde. Les yeux étaient braqués sur nous et le nombre de personnes venant au black-metal grâce à nous ne faisait que grandir, en même temps que la merde qui commençait à se répandre, des rumeurs comme quoi il y avait un culte satanique en train de se développer à Jérusalem, bla bla bla… Les heurts avec nos familles ont commencé à se produire régulièrement et on a commencé à perdre un peu le contrôle.

A Jérusalem-Est, j’étais considéré comme un pestiféré, tandis que Jérusalem-Ouest était plus libéral et les choses se passaient mieux. Un jour, alors que j’étais allé voir un groupe de potes donner un concert, des gars me dirent qu’un journaliste me suivait à la trace et voulait entrer en contact avec moi. Ce journaliste allait apparemment aux endroits où je traînais, dans les lieux de musique où il y avait du rock ou des concerts, espérant me trouver. Cette nuit-là, il réussit. Il travaillait pour un des plus gros journaux de la ville et il me dit qu’il voulait écrire un article à propos de Melechesh, parce que c’était la première fois à Jérusalem qu’un groupe faisait ce type de musique spécifique. Il était très insistant et voulait même me payer pour l’histoire, ce que je refusai d’accepter. Je pensai que c’était une bonne idée de faire une interview pour la promo de notre démo ; j’avais déjà été interviewé plusieurs fois par des journaux locaux pour mon premier groupe et tout s’était bien passé. Je lui ai donc dit : « c’est OK, mais garde bien à l’esprit que ton article ne doit pas aborder autre chose que ce qui concerne la musique du groupe ». Le mec me donna sa parole et on prit alors un taxi pour aller chez moi, afin que je lui montre les livres que j’aimais lire, pour prendre quelques photos promo pour mettre en haut de l’article et on termina l’interview là. Quelques jours plus tard, alors que Moloch, Lord Curse et moi nous dirigions en ville pour aller chercher le journal, j’ai entendu des gens nous apostropher (certainement à cause de notre look ; enfin, c’est ce que je pensais) : « Hey, vous êtes les membres de ce culte satanique, et bla bla bla… ». Nous vîmes alors le journal et nous comprîmes vite que je m’étais fait avoir : nous étions à la une du journal avec en gros titre un truc comme quoi un culte satanique existait à Jérusalem, de surcroît dans la partie la plus sainte de la ville… Je suis devenu fou quand j’ai vu ça parce que tout ce qui était écrit n’était que pure invention, le gars avait même fait une photo bidon avec des gars appartenant au soi-disant culte Melechesh pratiquant de la magie noire dans un cimetière (même notre photo promo de la démo n’avait pas été faite dans un cimetière) ! Il nous décrivait comme étant des gars qui portaient des longs cheveux, habillés tout en noir et arborant des pentagrammes, etc… et l’article stipulait même que nous pratiquions des sacrifices rituels sur des animaux ou autre. Quiconque me connaît de près sait très bien que si je vois quelqu’un faire du mal à un animal gratuitement, je peux devenir très méchant.

Des gens m’ont alors dit que la police me recherchait pour me poser des questions. Soudainement, il fut aussi proclamé que pratiquer le Satanisme à Jérusalem était illégal, ce qu’on peut comprendre car avant cet incident, personne n’avait entendu parler de Satanisme à Jérusalem. La dernière fois que ça s’était produit, ça remontait à plusieurs siècles auparavant, donc la seule idée de rendre illégal le Satanisme à Jérusalem n’avait même pas germé, d’autant que le gouvernement de la ville est assez libéral, vu le nombre d’ethnies et de confessions qu’il y a ici. L’émoi était donc très fort et je fus montré du doigt. A l’époque, j’ai dit à beaucoup de personnes que s’ils disaient encore des trucs faux sur moi, ils auraient beaucoup de problèmes tandis que beaucoup d’autres étaient de notre côté parce qu’ils savaient que nous n’avions rien dit de tel que ce qui était écrit dans le journal. Heureusement, la police ne connaissait pas nos vraies identités parce que nous avions des corpse paints et que nous utilisions nos noms de scène, et le journal avait refusé de les leur communiquer. S’ensuivit alors une vraie chasse aux sorcières, mon ex-petite amie fut arrêtée parce qu’elle portait un pentacle. Elle m’appela en disant qu’elle n’avait rien dit. Je me rappelle d’une fois où tous les groupes extrêmes du coin et des potes étions prêts pour aller à Tel Aviv pour un concert ; nous nous étions tous donné rendez-vous à Jérusalem pour prendre le bus. Un car de flics qui patrouillait par là arriva doucement, sans que ce ne soit pour nous forcément, mais je me rappelle que nous avons tous détalé dans les allées pour aller se rassembler ailleurs pour prendre le bus. Certains adolescents vinrent même me trouver dans les bars où j’allais en me disant qu’ils voulaient aussi se joindre au « culte », ce à quoi je leur répondais : Quel culte ? De quoi tu parles ? Fuck Off !

Malheureusement, certains ados des banlieues des environs de Jérusalem prirent connaissance de cet article et se mirent à essayer de faire ce que l’article suggérait, incluant les sacrifices de jeunes animaux. Ça m’a vraiment foutu les boules de savoir que des animaux souffraient à cause d’un foutu article de journal  mensonger. Les gars de l’organisation qui gérait notre salle de répétitions me conseillèrent alors de rester un peu en retrait pendant quelques semaines, le temps de faire retomber la pression. Je me suis dit que c’était une parfaite opportunité de rendre visite à mon frère, qui était directeur de la compagnie Seagram (Chivas Regal, Jack Daniel’s, Absolute Vodka, cognac Martel). Et oui, j’avais un accès illimité au « jus du Diable » même à Jérusalem (j’en reparlerai un peu plus tard) via mon frangin qui se trouvait en Indonésie.

J’ai pris alors l’avion pour l’Indonésie où j’ai passé 2 mois fabuleux, vivant là les moments les plus luxueux de ma vie, avec tous les excès possibles. Mon frère avait forcément de par son travail des connexions avec le monde la nuit et sa copine était un super top-model qui passait tout le temps à la TV, du coup, on pouvait aller dans n’importe quel bar ou soirée sans souci, étant toujours considérés comme des VIP. Ce fut un sacré changement par rapport à la situation que j’étais en train de vivre à Jérusalem ! J’entrepris alors de me rendre dans les petites rues de la ville, pour aller à la rencontre des metalheads indonésiens. Mon frère me dit de ne pas y aller, que c’était vraiment très dangereux. Je lui répondis alors que si j’avais survécu à Jérusalem avec mes potes métalleux, y avait pas de raison de ne pas y arriver en Indonésie… Et ce fut le cas, j’ai rencontré des mecs vraiment cool. Mais sérieusement, les mecs, le fossé qui sépare le riche du pauvre est stupéfiant : j’ai vu là-bas des gens vivre dans des cabanes pourries, ne pouvant se nourrir que de riz trois fois par jour, tandis que moi, j'étais invité sur une île privée appartenant à un ami de la famille… dingue ! J’ai adoré les temples de Bali. Imaginez un black-métalleux passant le plus clair de son temps sur un jet-ski sur une île tropicale (Bali), ce qui fut vraiment salvateur après tout ce bordel à Jérusalem. Mais je n’avais rien demandé et donc, même quand les trucs les plus sournois se produisent, il se produit quelque chose qui va dans le bon sens… Je dois admettre que les temples de Bali sont surréalistes. Après ces vacances bienvenues, je suis retourné à Jérusalem, où les choses s’étaient calmées car ils avaient des trucs politiques plus importants à gérer… A partir de cette époque, nous avons fait profil bas.

OK, je dois sortir manger un morceau et faire quelques bars ensuite (oui, j’ai fini cet article hors de l’avion, quand j’avais un peu de temps dans la semaine), je m’arrête donc là pour le moment. Il y a tant à raconter sur les débuts de Melechesh et l’évolution du groupe. Gardez toutefois bien ceci à l’esprit : je parle de Melechesh dans un type d'articles biographiques ; d'abord, j'ai pensé que c'était étrange, mais en fait, c'est parfaitement clair car ce groupe est une partie de moi. Il a défini certains de mes comportements et m'a appris beaucoup de choses. Je suis sûr que beaucoup d'entre vous qui avez fondé un groupe, vous aurez aussi certainement ce sentiment dans plusieurs années…



Part 9 – Novembre 2009

Voilà novembre et c’est l’hiver, très gris et les « robots » arpentant les alentours sont plus froids, plus gris et plus courbés que jamais cette année. D’un autre côté, j’aime ces périodes car on peut être beaucoup plus productif à l’intérieur pour composer, lire, le tout sans être distrait. Je suis actuellement chez moi en Hollande depuis 3 semaines, sans avoir du tout voyagé, ce qui est assez rare pour moi depuis un certain temps et j’apprécie le fait de boire actuellement un bon café dans mon mug géant (mes potes hollandais se moquent souvent de moi avec ce truc parce qu’ici, le café, très fort, est toujours servi dans des petites tasses) tout en écoutant la très bonne musique de Secret Chiefs 3. Trey Spruance de SC3 et moi avons l’un pour l’autre beaucoup de respect mutuel quant à notre musique. Je conseille définitivement à tout le monde d’aller voir ce groupe en concert ; c’est un… sublime art sonore !

La semaine dernière, le groupe Absu a joué ici, ce qui m’a donné l’occasion de revoir Proscriptor et son gang. Ce fut cool parce que la dernière fois que je les avais vus, c’était en juillet. Ils sont donc restés un peu à Amsterdam chez moi et nous avons pu programmer une répétition ensemble pour jammer. Ils m’ont invité à monter sur scène avec eux pour le titre « Swords And Leather » ; j’ai adoré l’idée et ça l’a carrément bien fait !

De nouvelles choses se profilent à l’horizon pour Melechesh puisque je vous annonce l’arrivée officielle dans nos rangs de Rahm au poste de bassiste, qui joue avec nous depuis un moment en tant que musicien session. Nous sommes aussi à la recherche d’un nouveau guitariste session pour les shows à venir que Moloch ne pourra pas assurer. Nous sommes actuellement en train de bosser dur pour finaliser l’album mais je ne confirme aucune date de sortie pour le moment puisque je n’en sais rien moi-même.

Dans la dernière colonne, je vous avais parlé de l’Etoile Galactique en Guerre, enfin, je veux dire Jérusalem, que j’avais dû quitter pour aller en Indonésie, le temps que les choses se calment autour du groupe, avec toutes ces histoires de culte satanique. Quand je suis revenu, les choses s’étaient calmées concernant ce problème. En effet, le Premier Ministre israélien venait d’être tragiquement assassiné (je dis tragiquement car il était un des rares à avoir encore du bon sens) donc, la dernière chose que les gens avaient en tête était cette histoire de culte satanique ou je ne sais quoi d’autre.
Politiquement, les choses s’envenimèrent à Jérusalem entre Palestiniens et Israéliens. Il ne se passait pas un jour sans qu’on n’entende parler d’explosions dans les cafés ou les abris bus. L’atmosphère était très tendue et chacun estimait que les choses n’allaient pas s’arranger de sitôt, ce qui se vérifie encore aujourd’hui. J'en ai dit beaucoup sur le sujet et je pourrais donner plein de raisons pour tenter d’expliquer ce chaos mais je préfère m'arrêter là.

Ce fut une année étrange en fin de compte : ma grand-mère décéda. Elle était le seul grand-parent que je n’avais jamais connu et la mère de mon père, lui aussi décédé depuis un moment. Elle représentait donc beaucoup pour moi mais je n’ai pu la voir que très peu de fois dans ma vie car elle a vécu à Istanbul puis en Australie. Le jour où j’ai appris cette mauvaise nouvelle, une autre arriva : une nana que je fréquentais quand j’allais en ville fut violée et brutalement tuée. Elle était très jolie et on se voyait de temps en temps, discutant parfois (je dois dire que ce genre de crimes est très rare à Jérusalem). 


Malgré toutes les tensions politiques, je voulais prendre du bon temps et vivre comme je l’entendais ; je n’étais pas le seul, les gens voulaient avoir des vies normales au regard de ce qui se passait. J’ai passé beaucoup de temps à jouer de la guitare, tandis que ma famille et les amis de la famille pensaient que c’était une perte de temps (classique comme réaction, non ? Combien d’entre nous se sont déjà entendus dire ça ?). Ils se foutaient souvent de moi, me sortant des trucs du genre : “Hey, Beethoven, t’as composé quelque chose aujourd’hui ? Alors, tu n’es pas encore une star ?“… Pas encore mais j’étais obsédé par ce que je faisais. Ce fut et est d’ailleurs toujours un point d’achoppement entre eux et moi, car certains ne comprennent toujours pas pourquoi je joue une telle musique… Dans leur esprit, ils ne comprenaient pas que je puisse être autre chose qu’une simple part d’une machinerie musicale, alors que j’en étais l’architecte. J’espérais qu’ils parviennent  à comprendre certaines de mes définitions abstraites mais c’était compliqué pour eux alors qu’ils avaient tous un grand sens de la réflexion.

Comme je l’ai dit, j’appréciais ma vie de l’époque. Je faisais mon truc, je ne bossais pas, j’allais quelques jours par semaine dans une école d’ingénieurs du son et le reste du temps, je jouais de la gratte ou allais trainer en ville, lisais des livres d’occultisme. Je m’étais fabriqué un vrai style de vie rock n’ roll. Je n’avais pas besoin de fric en fait ! Comme je l’avais expliqué dans la précédente colonne, mon frère dirigeait Seagrams en Indonésie, une compagnie qui produisait les bouteilles de Chivas Regal, de Martell Cognac, d’Absolute Vodka, de Finlandia, de téquila Mariachi, les vins B&G Wine et tout un tas de trucs… J’avais donc autant de bouteilles que je voulais. Quand j’étais à sec, j’appelais mon frère qui appelait à son tour la centrale de distribution de Tel Aviv, qui me fournissait alors une carte spéciale pour aller au supermaché me servir de tout ce dont j’avais besoin. Pour une compagnie qui brasse des millions, ma petite escapade au supermarché ne représentait rien. Parfois, je prenais une de ces bouteilles et j’allais la siffler avec quelques potes au square du coin (même si à Jérusalem, ce n’est pas comme aux USA : boire en public est très mal vu). D’autre fois, j’avais besoin quand même de fric pour acheter des albums ou des cordes de guitare. Dans ce cas, je prenais quelques bouteilles dans un sac et me rendais dans les bars où j’avais l’habitude d’aller : je revendais d’excellentes bouteilles de whiskey moitié prix de ce qu’elles valaient réellement ici et tout le monde était content. Ce qui signifie évidemment que j’avais droit à des bières gratos dans ces bars ! Pour bouffer, c’était la même chose : pas mal de mes potes bossaient dans des snacks ou des trucs du genre, et en échange des boissons gratos que je leur fournissais, ils me filaient des hamburgers, des pizzas ou des glaces à l’œil… Je n’avais donc pas réellement besoin d’avoir de l’argent sur moi, ce qui fait que je n’ai jamais été obsédé par le fric. A ce point de la discussion, je dois quand même avouer qu’en quelques occasions, j’ai aussi vendu un peu d’herbe. Vendre de l’herbe n’est pas en soi une grande affaire mais c'était impardonnable. C’est pourquoi je remplissais une boîte d’allumettes avec l’herbe d'un ami, je prenais juste quelques boulettes que je mélangeais ensuite avec des feuilles de figuiers séchées. Les gens à qui je filais ça me remerciaient en disant que ce que je leur vendais était de la super qualité… ils étaient juste de vrais idiots. Sauf qu’une fois, alors que j’étais assis dans un bar avec quelques potes, des mecs menaçants vinrent me voir en me disant que je leur avais vendu un truc de merde… Je me suis levé d’un seul coup de mon tabouret, ai choppé le mec par la gorge, lui ai fait traverser le bar pour le bloquer finalement contre un mur, tout en gueulant : « mec, je t’ai vendu le meilleure truc de tout Jérusalem et c’est comme ça que tu me remercies ?! »… Le mec, dun coup, pâlit et il me balbutia « merci… merci… excuse-moi… ». Je dois donc ajouter maintenant que j’étais un putain de voyou et un vrai trou-du-cul !

Même les potes de mon groupe avaient parfois peur de moi : un jour que j’étais chez Moloch, et que j’étais en train de me faire un sandwich, dans la cuisine, je vis qu’il était en train de mettre un album d’Immortal dans la chaîne… Pour le faire flipper, j’ai lancé le couteau à travers tout le salon, couteau qui est allé frapper le mur juste à côté de lui, pour rebondir à 2 cm de Moloch… Il m’a incendié et aujourd’hui, je suis bien content qu’il ne lui soit rien arrivé. Je peux vous dire que Moloch pourrait raconter beaucoup de choses quant à mes frasques, je le respecte vraiment rien que pour avoir réussi à me supporter tout ce temps, mais lui-même me dit que je lui ai appris beaucoup aussi… en tout cas, j’espère… Je suis une personne différente maintenant et ai changé depuis un bon moment. La naissance, le réveil, l'interrogation, la rébellion, la destruction, le réveil, l'éclaircissement et enfin la création, je suppose que ce sont des phases par lesquelles passe tout individu.

Revenons à l’histoire de Melechesh. Le groupe continua à répéter intensivement et à envoyer la démo un peu partout dans le monde, au mieux de notre habileté et de nos contacts. Nous fîmes quelques interviews avec des fanzines underground et notre réseau se mit à grossir. Nous avons alors senti qu’il était temps de donner notre premier concert et l’idée était de monter le tout premier vrai concert de Black Metal de l’histoire de Jérusalem, avec tout le cirque théâtral : les corpse-paints, cracher du feu (ce qui nous fut refusé du fait de l’exigüité du club), les machines à fumée, l’intro bien glauque, les éclairages sombres… Je portai une sorte de cape (oui… je sais…) ; pour ma défense, elle était bien cool, avec deux lions en Metal sur le col… La cape avait appartenu à une amie britannique dont le père était un prêtre anglican ! Elle l'avait « empruntée » pour l’occasion donc je la mis sur mon dos. L’affluence du concert fut très bonne ; quand nous avons regardé par la suite la vidéo, nous nous sommes aperçus que quelques personnes disaient : « oh mon Dieu, qu’est-ce que c’est que ça ? ». Certains furent vraiment intimidés et choqués. Par contre, certains savaient déjà de quoi il en retournait par rapport au Black Metal, donc pour eux, ce fut une confirmation. En somme, les gens ont aimé le spectacle. Les pompiers sont même intervenus durant le show, ce qui est hilarant quand on sait que Melechesh signifie le Roi du Feu ! Ils sont en réalité venus parce que toutes les alarmes de fumée dans le club s’étaient déclenchées et avaient directement envoyé le signal dans leur caserne. Ils sont venus et ont voulu arrêter le spectacle, mais le propriétaire du club a été cool, leur expliquant que ça venait de la fumée vraiment dense qu’on avait créée ; inutile de vous dire le propriétaire, que je connaissais depuis plusieurs années, nous a interdits de jouer dans son club par la suite. Une chanson live de ce premier concert, intitulée “Malek Al Nar”, constitue un des bonus-tracks de la réédition de notre premier album. 

Pour en venir au 1er album, et bien, les choses se sont assez bien passées pour le groupe. Nous avons reçu deux propositions dans un laps de temps de quelques mois : la première provint d’un label allemand, pour faire un EP 7 " vinyle et une autre pour un album complet, en tant que première sortie d’un label nouvellement créé. Je me rappelle très bien du jour où, à la poste, j’ai reçu une lettre en provenance d’Allemagne qui disait qu’ils voulaient nous signer pour un EP 7’’ ; j’étais trop content ! J’ai réuni les autres membres du groupe, on a très vite réservé un studio et on a enregistré deux titres, “Malek Al Nar” et la première version de “The Siege Of Lachish”. “The Siege Of Lachish” peut être vu aujourd’hui comme une sorte de testament du style que nous pratiquions à l’époque. L’EP fut édité à 666 exemplaires et fut rapidement sold out. C’est ce fameux EP que Proscriptor a réédité il y a un environ sur son label Tarot Productions, en format Picture-disc.

Peu de temps après, une nuit, à peu près vers 3h, le téléphone de la maison se mit à sonner, ce qui me fit chier car personne ne répondit en bas… Je dus donc me lever, et comme j’étais énervé, j’ai engueulé le mec qui appelait. La personne, de l'autre côté du fil, lutta alors pour pouvoir en placer une, me demandant quand elle pouvait rappeler, me disant même qu’elle ne raccrocherait pas tant qu’elle n’était pas sûre de pouvoir me rappeler plus tard. C’était en fait Andy Harris, plus connue maintenant sous le nom d’Akhenaten, du groupe Judas Iscariot. Mais à cette époque, son groupe n’avait encore pas sorti d’albums, si mes souvenirs sont bons. Il me rappela donc et m’expliqua qu’il était en train de monter un label et qu’il voulait que l’on soit sa première signature. Moloch et lui communiquèrent alors par Internet (en 1995 ou 96, je ne sais plus bien) ; c’étaient les débuts du Net et les comptes email étaient très primitifs, c’était du style 27364859@compuserve.com... Je me dis aujourd’hui qu’Andy a eu de sacrées couilles en misant sur nous pour lancer son label alors qu’il aurait pu faire comme plein d’autres de l’époque, qui jouaient la sécurité en ne signant que des groupes norvégiens. Il prit un risque, lisant en quelque sorte entre les lignes, appréciant l’idée qu’il allait signer un groupe de Black Metal de Jérusalem ! Sacré argument promotionnel ! Il a co-publié l’album avec un label américain appelé Pulverizer Records qui s’occupa plus ou moins surtout de la distribution. J’ai récemment appris que le propriétaire du label a été tué dans un accident de voiture… 
Au vu de la motivation qui était celle de Breath Of Night Records pour sortir notre démo de manière brute, je me suis dit qu’il valait mieux proposer un vrai album, qui comporterait des touches orientales. Nous avons donc composé d’autres chansons qui avaient ce style très brut. Il nous a fallu un certain laps de temps ensuite pour définir exactement ce qu’allait être le son de Melechesh, en tout cas celui pour lequel on est connus aujourd’hui.


À ce jour, j'estime toujours ce 1er album (As Jerusalem Burns... Al'Intisar), tout naturellement pour des raisons sentimentales et peut-être fausses dans mon esprit, mais surtout techniquement parlant : beaucoup d'albums de Black Metal sont maintenant enregistrés dans des studios performants, où chaque coup de caisse claire ou de cymbale peut être corrigé, nettoyé, avec des grosses caisses triggées… Le batteur peut même corriger une erreur au milieu d’une partie rien qu’en appuyant sur le bouton de pause de l’enregistreur. Tous les batteurs enregistrent aussi au clic maintenant. Au contraire, notre 1er album fut enregistré de manière complètement live, avec tous les musiciens jouant ensemble, sans pause. Si quelqu’un faisait une erreur, il fallait refaire tout le morceau. Nous ne pouvions pas faire autrement à l’époque, vus nos moyens. Je trouve toujours aujourd’hui que les riffs sont cool ! La basse et les vocaux furent ajoutés plus tard car nous avions enregistré à trois.  

C’est alors que nous avons fait des choses stupides : par exemple, nous ne parvenions pas à trouver des ceintures avec des balles, que la plupart des groupes européens et américains portaient. Du coup, Moloch s’est renseigné autour de lui, et dans la ville de Bethléem (en Cisjordanie - rive ouest), il a trouvé un gars qui a réussi à nous obtenir une chaine de vraies balles M60, ceinture qui était très longue d’ailleurs. Moloch réussit à la passer à travers les points de contrôle de l’armée israélienne (NdWill : je vous rappelle que Moloch est palestinien donc ça aurait pu très mal tourner cette affaire) et l’a cachée dans son école française. Si l'armée avait découvert ce truc, je suppose que ça aurait pu créer un incident international entre la France et Israël... Ah ah ah ! Nous avons alors séparé la chaine de balles pour en faire plusieurs ceintures mais le problème était que c’était encore trop lourd. Ben oui, ces balles étaient encore chargées ! En fait, notre batteur, Lord Curse, fut l’homme de la situation car il savait comment vider des balles. Je me rappelle très bien de lui, assis dans mon jardin, une clope au bec, en train de vider chaque balle avec deux tenailles. Nous avons rassemblé la poudre d'arme à feu et l'avons allumée, ce qui est toujours cool à faire de toute façon. Nous avons aussi fait nos propres pointes, pour cela, créditons de nouveau Lord Curse, car il était le seul d’entre nous à savoir se servir de certaines machines et outils, de goujons, de pointes etc.

Il y a eu tant d’incidents étranges et de rumeurs que, quand nous y repensons, nous font rire aujourd’hui pour la plupart… Par exemple, celui-ci : la famille de Moloch savait ce qu’il faisait mais n’approuvait pas. Une fois, sa mère aperçut beaucoup de symboles et de textes occultes et ne sut pas trop quoi en penser. La mère de Moloch est une personne très raisonnable et intelligente mais elle fut déstabilisée par cette découverte. Elle en discuta avec certaines de ses connaissances et une personne suggéra alors de faire pratiquer un exorcisme sur Moloch. Sa famille n’est pas religieuse mais comme ce problème comportait une nature théologique, ils pensèrent que ça aurait pu être une bonne idée. Mon téléphone retentit et Moloch, qui était à l’époque très jeune, se mit à vraiment flipper : « mec, ils veulent pratiquer un exorcisme sur moi ! ». Je lui répondis : « Bien, écoute, puisqu’ils pensent que nous sommes dingues, dis-leur que si un exorciste se pointe chez toi, je viendrai le poignarder ! ». Résultat ? Ils y ont cru et le gars n’est jamais venu… Ceci dit, les années ont passé et ils sont devenus plus compréhensifs envers ce qu’il fait.
Quand ma mère était en colère envers moi, elle me disait que j’avais invité le diable sous son toit. Je lui répondais non, sauf que notre salon était devenu au fil du temps le point central du Moyen-Orient occulte, avec des lettres, des flyers, des pentagrammes, des livres occultes, des LPs, CDs et autres démos d’un peu partout…

 
Une fois, alors que nous étions dans une autre ville que Jérusalem, nous eûmes vent d’une rumeur comme quoi nous avions pris une épée pour couper le bras de quelqu’un. Cette histoire nous laissa vraiment perplexes. D’où venait encore cette connerie ? On a alors réfléchi et nous nous sommes rappelés d’une de nos photos session, où nous nous étions maquillés avec des corpse-paints et où nous brandissions des épées. Des gars qui étaient là nous dirent alors qu’ils n’aimaient pas ça et pour les faire flipper, on leur avait dit que s’ils continuaient à dire des conneries sur nous, on en embrocherait un avec ! Evidemment, c’était du pur bluff mais devant notre réputation sulfureuse naissante, un des gars avait littéralement paniqué et s’était barré en courant. Pour nous, c’était une plaisanterie mais quelqu’un répandit l’histoire et je suppose qu’un des mecs a déformé ça en disant que les musiciens de Melechesh s’étaient amusés à couper le bras d’un gars.

Un autre fait dont nous n’avons jamais parlé est que j’ai été batteur de Melechesh pendant 3 semaines ! On s’était pris le chou avec Lord Curse pour des queues de cerise et du coup, nous n’avions plus de batteur. Je me mis alors derrière les fûts ; on a même enregistré une répète avec moi comme batteur et Moloch comme seul guitariste. J’avais pris l’habitude de jouer un peu donc je pouvais le faire… Quoique… Du coup, on a vite préféré régler les choses avec Lord Curse.

Plusieurs mois se sont écoulés, notre premier album sortit et les choses roulaient pour le groupe. Mais je voulais plus et bien que j’étais follement amoureux de Jérusalem (je le suis toujours), pour certaines raisons, la manière dont les choses se passaient ne me convenait pas. Laissez-moi vous parler de ça la prochaine fois… En attendant, je veux juste profiter d’un bon whisky Maker’s Mark et matter un film intéressant…


Part 10 – Décembre 2009

Me voici une nouvelle fois assis devant mon ordinateur portable, prêt à écrire la 10ème partie de mes articles biographiques. Je suis très honoré et reconnaissant par le haut degré d’intérêt exprimé par les gens et les médias pour ce projet. Beaucoup de gens m’ont fait part d’un sincère et positif retour et ces articles sont publiés dans plusieurs langues : Allemand, Anglais, Français, Espagnol, Serbe, Italien, Grec, Finnois… Et certaines connaissances des médias m’incitent aujourd’hui à en faire un livre. Je considère vraiment particulièrement cette idée puisque beaucoup de personnes m'ont écrit et m’ont demandé si une telle chose existait déjà. Peut-être que cette idée se concrétisera quand j’aurai fini l’enregistrement du 5ème album de Melechesh.

Je suis de nouveau de retour à Istanbul (Ndlr : l’amie d’Ashmedi vit là-bas) ! Je vais passer les fêtes de fin d’année ici tout en bossant sur les textes de l’album. En gros, depuis juillet, j’aurais passé ici un truc comme 10 semaines ici. Il y a beaucoup à faire ici et la ville est source d’inspiration mais aussi d’amusement. Ma fidèle guitare m’accompagne, aussi je suis capable de continuer à composer. Il ne me reste que peu de temps avant de devoir définir des dates de studio, donc mon planning commence à être extrêmement serré.

Il y a 2 / 3 semaines, nous avons annoncé l’arrivée définitive en nos rangs de notre nouveau bassiste, Rahm. C’est une arrivée logique puisque Rahm joue avec nous en live depuis 13 mois maintenant en tant que bassiste session. Il s’est avéré être de bonne compagnie, mentalement stable et il a la bonne attitude. Le groupe est dans une bonne passe et tout le monde est au taquet, prêt à enregistrer un nouvel opus de magie sonore. Moloch va s’envoler pour Amsterdam le mois prochain afin de prendre part avec le groupe à une série de répétitions intensives pour finir la composition avec moi et intégrer tous les titres. Cet été, j’ai passé des nuits entières éveillé à attendre juste que vienne l’inspiration pour la musique que je veux pour ce groupe et plus le temps a passé, plus j’ai senti que les choses allaient dans la bonne direction. Je dors beaucoup mieux maintenant.


Je voudrais principalement axer cette colonne sur les deux / trios dernières années que j’ai passées à Jérusalem, que j’ai quittée il y a maintenant 12 ans :

Notre 1er album, As Jerusalem Burns…Al’Intisar venait de sortir et les choses se passaient bien pour nous, puisque nous étions le premier groupe du Moyen Orient non-israélien à avoir été signé internationalement, ce qui était vraiment une nouveauté ! Et d’avoir été en plus le premier groupe de Black Metal de Jérusalem, d’avoir été en plus le premier groupe de Jérusalem à avoir inventé ce style de Black Metal oriental, tout ça nous fit franchir rapidement plusieurs paliers. Nous pouvions être fiers de ça.

En parlant de ça, de notre son Black Metal du Moyen-Orient, comme je l’avais évoqué l’autre fois, nous avions enregistré As Jerusalem Burns…Al’Intisar en devant écarter certaines compositions par manque de place et aussi parce qu’elles devaient encore être travaillées, et ce sont ces chansons qui se sont retrouvées ensuite sur le EP The Siege of Lachish. Al’Hazred venait de déménager aux Pays-Bas et nous avons dû engager un bassiste session pour deux concerts ; ça a été une très grosse erreur parce que le mec a massacré certains riffs, réinventant même certaines parties qui ne collèrent pas avec les nôtres… même si nous restons toujours ouverts à de nouvelles idées. On décida donc de se focaliser sur l’écriture, en pratiquant beaucoup en répètes, pour donner vie à des titres comme « Dragon’s Legacy » ou encore « Genies, Sorcerers and Mesopotamian Nights », etc… (Ndlr : qu’on retrouve sur l’album Djinn, sorti en 2001). On savait que ces titres seraient bien reçus car ils étaient nouveaux, avec une touche mystique et qu’ils allaient faire bouger pas mal de têtes.

A la même époque, j’ai commencé à me poser beaucoup de questions quant au fait de rester ou pas à Jérusalem… Il y avait plusieurs raisons à cela : j’étais fatigué par le statu quo de la situation là-bas, étant considéré comme un citoyen de deuxième zone, puisque je n’étais ni israélien ni palestinien, me trouvant au milieu d’une lutte entre deux peuples où je devais rester neutre, puisque j’avais des amis dans les deux camps. Petit  à petit, mes convictions personnelles à propos de ce qui se passait dans le secteur se sont affinées et puis, je voulais aller plus loin dans ma carrière de musicien et je sentais bien qu’il n’y avait aucune perspective à Jérusalem ; du coup, mon salut ne pouvait venir que d’un départ.   

En attendant, un jour, j’ai reçu un appel téléphonique de quelques personnes qui voulaient faire un documentaire sur Melechesh. Nous les avons rencontrées et nous avons consenti à faire le documentaire mais sous certaines conditions, car nous savions à quel point certains membres des médias pouvaient être vaseux, nous rappelant du fiasco de notre premier article de journal, avec toute cette histoire de culte satanique montée de toutes pièces. Nous avons refusé d’être payés et avons accepté à la seule condition qu’en échange, les mecs réalisent pour nous un vidéo-clip professionnel et qu’ils ne répandent pas de fausses accusations comme quoi le groupe pratiquait un culte satanique ou un truc du genre sans aucun sens... Les sessions pour le film prirent plusieurs jours : nous nous sommes par exemple rendus une fois très tôt le matin dans la vieille ville de Jérusalem et ensuite, nous sommes allés dans le désert près de Jericho.
Une chose bien marrante et stupide se produisit alors quand nous étions dans la vieille ville : il y avait une scène où Moloch devait jouer de la guitare à l’intérieur des vieilles fortifications. Nous nous trouvions dans une tour de garnison et l’escalier derrière lui était très sombre. On a donc décidé que pour créer un effet pour le clip, il serait bien d’avoir du feu et de la fumée remontant de cet escalier sauf que nous n’avions aucun matériel pyrotechnique pour faire ça. Qu’à cela ne tienne, comme j’étais cinglé, j’ai dit que j’allais m’en charger, et que j’allais réussir à créer une boule de feu assez grosse pour créer cet effet pyrotechnique derrière Moloch, sans toutefois que je n’apparaisse sur les shoots… Ce fut tout sauf une bonne idée ! En effet, le réalisateur me cria de me tenir prêt pour l’action. J’ai alors pris la plus grosse lampée possible de kérosène (c’est ce qui marchait le mieux selon moi), allumé ma torche et attendu le signal. Ma bouche était vraiment pleine de ce carburant mais tout ne se passa pas exactement comme je l’avais voulu : il y eut quelques minutes d’attente parce que la caméra ne voulait pas démarrer. Et je ne voulais pas recracher le fuel parce que nous n’en avions pas beaucoup. Je me suis alors concentré pendant au moins 5 minutes comme ça mais à la fin, j’en avais marre et j’ai alors fait de grands signes au réalisateur, en lui disant de se magner le cul ! Mais en faisant ça, j’ai accidentellement avalé cette grosse gorgée de kérosène !! Je me suis alors précipité en haut pour leur dire ce qui venait de se passer, et pour appeler une amie qui était infirmière. Celle-ci me conseilla alors de boire tout un tas d’eau, comme je n’avais pas réussi à dégueuler le produit, et pour enlever le goût du kérosène, j’ai bouffé un citron entier !! Ce fut une belle connerie, comme, je vous l’ai dit ! Mais en même temps, j’en ris aujourd’hui car il n'y avait plus aucun goût de carburant et rien ne m'est arrivé ; nous avons donc continué le travail sur le tournage, mais à un moment, j’ai roté et une horrible odeur de pétrole s’est échappé de ma bouche, un peu comme si j’avais littéralement été une machine métallique alimentée par de l’essence ! Ah ah ! 

Une nuit, l’équipe vint nous rejoindre à l’intérieur d’un appartement que nous avions dans la vieille ville, qui appartenait à la famille de Lord Curse. C’était un endroit bien cool, rempli de trucs occultes, de livres, d’albums Metal… donc, c’était un très bon endroit pour filmer. Quelques jours après, nous avons filmé à l’intérieur du studio de la production, pour faire une interview. Je me souviens bien de ma tronche ce jour-là : elle était toute gonflée à cause d’antibiotiques que j’avais dus prendre pour une grippe. Nous avons également fait une vidéo pour la TV, sur le titre brutal « Hymn To Gibil ». Le show fut en premier diffusé à Jérusalem, puis un peu partout dans le pays sur la télé nationale. Au final, ils n’ont pas tenu leur promesse quant au vidéo-clip, dont on n’a jamais vu la couleur !


Comme mentionné un peu plus haut, j'envisageais de quitter le pays, mon meilleur ami aux USA étant assez convaincant envers moi pour aller là-bas, pour poursuivre mes études dans son université, etc… J’ai donc commencé la procédure, ça me paraissait chose logique car j'étais une sorte de chat noir à Jérusalem-Est, et un citoyen de seconde zone pour Jérusalem-Ouest, sans aucune possibilité de progression sociale et nous sentions que le groupe avait atteint un statut que nous ne pourrions pas dépasser en restant là. Beaucoup de mes meilleurs amis avaient déjà déménagé, j’étais fatigué par la politique et je préférais étudier en anglais, car c’était plus facile pour moi. Je m’orientai donc vers une université américaine mais dans le même temps, Al’Hazred mentionna qu’il existait aussi des universités à Amsterdam où on parlait anglais. Je me suis renseigné et j’ai découvert que la plupart des pays européens avaient également de très bonnes universités, capables de rivaliser avec les USA en termes d’études et qui demandaient surtout une somme ridicule pour y entrer, comparé à ce qui se pratiquait aux USA. Je me suis dit : « Amsterdam n’est qu’à 4 heures d’avion de Jérusalem… pourquoi pas finalement ?! ». J’ai fait les papiers nécessaires et ai été accepté ; quelques mois avant de partir, j’ai annoncé à tout le monde que j’allais quitter le pays. Beaucoup furent surpris.

Nous avons alors booké un studio à Jérusalem pour enregistrer un nouveau promo CD de Metal Mésopotamien qui allait être envoyé ensuite pour démarcher les labels. La session d’enregistrement se déroula avec de bons amis à nous du coup, le prix demandé fut très bas. Nous avons enregistré 5 titres qui se sont retrouvés ensuite sur notre deuxième album, Djinn. Ce fut le dernier enregistrement que nous ayons fait avec notre pote Lord Curse. J’avais prévu de partir à la mi-août 1998, du coup, nous avons aussi planifié un concert d’adieux à Jérusalem. Ce fut un très bon concert, des gens vinrent de tout le pays ; la nuit, la station de bus centrale de Jérusalem fut pleine de metalheads dormant à même le sol en attendant l’arrivée du premier bus… Ce fut un très beau spectacle ! 

Quelques jours plus tard, je fis quelques valises, prépara ma guitare (celle avec laquelle je joue d’ailleurs en ce moment) ; j’étais prêt à partir. Tous les membres du groupe et mes amis vinrent chez moi et les adieux prirent du temps. Ma mère, comme d’habitude, me supporta dans mon choix mais elle craqua complètement quand je me mis en route, ce qui me dévasta aussi totalement. Je ne supportais pas de la voir dans un tel état et j’ai bien failli tout abandonner pour rester là. Elle était, est toujours, une femme célibataire, mon frère vivant comme je l’ai plusieurs fois mentionné en Indonésie, et moi, j’étais en train de me barrer à Amsterdam. Elle se sentait complètement abandonnée mais savait que c’était pour la bonne cause.

Je pris alors la route pour l’aéroport, en direction d’un pays et d’un futur inconnus, je savais que Melechesh allait continuer mais je ne savais pas encore comment. Tout ce que je savais, c’est que j’avais avec moi mes promo CDs et ma guitare et que j’étais à l’aube d’une nouvelle grande ère…


Part 11 – Janvier 2010

Le samedi 23 janvier, nous avons donné un show unique à Rotterdam. L’organisateur nous a demandé si Inquisition pouvait ouvrir pour nous et nous avons été d’accord car c’est un bon groupe et les mecs sont cool… Nous avons également invité un groupe local appelé Ctulu, parce que le mec du groupe me demandait sans arrêt quand ils pourraient ouvrir pour nous. Le timing était donc parfait donc je lui ai envoyé un email début janvier pour lui dire que c’était OK… Nous avons joué un nouveau titre lors de ce concert, sur lequel je n’ai pas chanté car les lyrics ne sont pas terminés.

Voilà ce que ça a donné :



C’est mon premier blog pour 2010. 2009 fut une bonne année dans le sens où j’avais plusieurs challenges à relever et je suis content qu’ils soient derrière moi. J’ai célébré la nouvelle année à Istanbul avec plusieurs amis des Pays-Bas, dont Max qui enregistre nos démos et Florian, le chanteur de Dark Fortress. On s’est baladé ensemble dans Istanbul et c’était cool. Les choses sont maintenant extrêmement agitées en ce moment : Moloch est chez moi pour répéter et terminer la composition du nouvel album, il est venu des USA avec notre ex-bassiste et un autre pote et là, ils viennent de partir matter le film Avatar. Je l’ai déjà vu et ça ne me dit rien de le revoir, à cause des effets spéciaux. Bref, je préfère rester ici tranquille pour écrire cette colonne 11. Les mois suivants, les colonnes seront plus courtes car je vais avoir beaucoup de travail.   

A la fin de la partie 10, j’abordais mon départ de Jérusalem vers les Pays-Bas en disant qu’une nouvelle ère s’ouvrait à moi. Après les nombreuses formalités habituelles de sécurité à l’aéroport de Tel Aviv, j’ai embarqué dans l’avion et suis arrivé aux Pays-Bas. Je me rappelle avoir atterri vers 8/9 heures du matin un vendredi matin d’août 1998 ; un pote de mon bassiste de cette époque vint me chercher à l’aéroport pour me conduire dans un appartement qui lui appartenait et qu’il avait mis en vente. Mon bassiste et sa copine étaient à cette époque en vacances et leur appartement était dans le même immeuble. J’ai déballé mes bagages et suis parti immédiatement voir où se trouvait mon université, et leur dit que je devais aller en ville pour terminer certains papiers administratifs le jour-même. Quelques heures plus tard, j’étais dans le centre d’Amsterdam pour ouvrir un compte en banque néerlandais. J’ai parcouru ensuite un peu la ville, suis allé acheter deux trois bricoles et suis retourné à mon appartement temporaire. Le truc avec cet apprt’, c’est qu’il y avait l’eau et l’électricité mais pas de gaz, donc impossible de faire cuire quoique ce soit ou de prendre une douche chaude. Et ce mois d’août 1998 fut particulièrement froid et pluvieux, malgré le fait que c’était l’été… Je me rappelle encore bien de ces douches glacées prises à l’époque, ça te mettait vite d’aplomb le matin !

Quelques jours plus tard, j’ai déménagé mes affaires chez mon bassiste pour une semaine, le temps de trouver mon propre appartement. Un jour, après l’université, je me suis rendu dans un magasin de disques Metal et ai rencontré quelques Black Métalleux qui passaient par là. Ils m’ont alors demandé d’où je venais et quand je leur ai dit que j’étais de Jérusalem, ils m’ont immédiatement demandé si je connaissais Melechesh ! Je fus très étonné car nous étions encore très underground à l’époque. Je leur ai alors dit que j’étais le fondateur du groupe et ils sont devenus alors très amicaux envers moi, c’était bien cool. C’est à la même époque que j’ai emménagé dans une ville appelée Haarlem (oui, le nom du quartier de Harlem, à New York, provient de cette ville), près d’Amsterdam, pour quelques mois. Et les Black Métalleux que j’avais rencontrés venaient de ce coin, je ne me sentais pas trop étranger avec eux.

Mon appartement à Haarlem était spécial puisqu’il se trouvait dans une église reconvertie en studios d’étudiants. De l’extérieur, ça ressemblait à une église normale mais dedans, tout avait été rénové et il y avait des studios sur 3 étages. Les baptistères avaient été transformés en cendriers, et l’ancien autel était devenu une salle TV commune, la télé remplaçant l’autel. Le balcon où les gens chantaient était devenu une salle de ping-pong , etc… L’ironie a donc voulu que je quitte la Ville Sainte pour la ville de tous les péchés pour me retrouver à vivre dans une église !! Ça me fait encore bien marrer ! Ah ah… 

Les premiers mois aux Pays-Bas furent un réel plaisir. J’avais énormément de travail à l’université mais j’ai aussi eu la chance de pouvoir assister à de nombreux concerts. Je mourrais d’envie de voir tous ces groupes internationaux et si vous connaissez un peu les Pays-Bas, vous n’êtes pas sans savoir qu’il ne se passe pas un jour ici sans qu’un gros concert de n’importe quel type de Metal ne soit programmé. Le mauvais côté fut de devoir tout recommencer ici pour Melechesh et ce ne fut pas facile ; par contre, le côté positif est qu’ici, les structures musicales sont très développées. Malgré le bon temps que je prenais, je me sentais un peu perdu et j’ai très vite récupéré un ampli pour pouvoir rejouer de la guitare et composer à nouveau. Une chose qui me manquait aussi beaucoup était ma nourriture habituelle ; Al’Hazred m’emmena donc dans un resto grec bien cool parce que les saveurs et la culture étaient finalement assez proches de ce à quoi j’étais habitué. Ce fut salvateur et j’y suis encore allé avec Moloch la semaine dernière. Je ne compte plus les fois où je suis allé dans ce restaurant. Un de ces premiers week-ends, alors que j’étais dans mon appartement, quelqu’un sonna  à la porte. C’était une fille qui je connaissais bien, une bonne amie de Jérusalem, qui trainait toujours avec nous et autour de Melechesh, nous préparant parfois du thé ou des cafés lors de nos répétitions. Elle était anglaise mais avait grandi à Jérusalem, comme beaucoup d’entre nous l’ont fait. Je fut alors très surpris, lui demandant même si elle avait fait le voyage exprès pour me voir. Elle me dit que non, qu’elle avait aussi déménagé en Hollande. Le hasard voulait qu’elle se trouve dans la même université que moi et dans le même immeuble étudiant ! Pour être honnête, ça m’a mis sur le cul car ce fut une excellente surprise. J’ai découvert avec le temps que cette fille était amoureuse de moi et qu’elle m’avait en fait suivi. Je fus flatté mais je l’aimais comme une amie, rien de plus et nous avons convenu que les choses devaient en rester là. Nous sommes restés d’ailleurs de bons amis ici…

D’autres personnes sont venues chez moi, sans s’être annoncés : un jour que j’étais à l’université, de bons amis suisses avec qui j’ai grandis, qui étaient retournés en Suisse à ce moment-là, ont fait une halte à Amsterdam et ont appris que j’y étais. Al’Hazred m’a alors appelé pour me dire qu’ils étaient là et ils ont attendu que je revienne de mes cours. Quand je suis arrivé, je leur ai demandé : « mais bordel, qu’est-ce que vous foutez là, les gars ? ». Ils m’ont répondu qu’ils n’étaient là que pour une journée et qu’ils ne pouvaient pas être à Amsterdam sans me voir et ce fut un très bon moment. Peu de temps après qu’ils ne soient partis, c’est Moloch qui s’est pointé. Comme je l’ai dit le mois dernier, Jérusalem n’est qu’à 4 heures de vol d’Amsterdam.


Je me rappelle bien du premier hiver que j’ai passé ici. C’était le moment des vacances et tout le monde était retourné chez lui. J’étais resté là seul et je me faisais pas mal chier, car je n’avais pas prévu de retourner à Jérusalem tout de suite. Mais alors que je me baladais dans les rues, j’ai vu une pub pour un vol vraiment pas cher pour Jérusalem. Je me suis empressé d’acheter un ticket, c’était en début d’après-midi. Je suis retourné chez moi prendre quelques affaires et ai filé à l’aéroport pour prendre l’avion le soir-même. Je suis alors arrivé chez ma mère à 3 heures du matin et ai frappé  à la porte. Très surprise, ma mère me demanda ce que je faisais là, ce à quoi je lui répondis que j’étais venu laver mon linge (rires) !

De retour à Amsterdam, j’ai eu quotidiennement accès à Internet et ce fut la première fois que je vis notre propre site Web. Un ami l’avait fait l'année précédente. Je n'avais aucune idée à l’époque de la manière dont Internet changerait à ce point le visage de l’industrie musicale et je n'avais non plus aucune idée de la manière dont des exilés comme moi allaient pouvoir rester en contact avec leurs proches, même à l’autre bout du monde, en se téléportant de manière métaphorique via les webcams et les systèmes de messagerie.  

Après quelques mois passés aux Pays-Bas, je me suis mis à chercher un batteur ; j’en ai essayés plusieurs mais ça ne fonctionnait pas. Je me disais que je n’allais jamais réussir à trouver un batteur qui ne veuille pas jouer du death metal standard ou du black metal typiquement influencé scandinave… C’est alors que j’ai pensé à contacter Proscriptor d’Absu, que je connaissais bien. Je lui ai envoyé un mail pour lui demander s’il ne connaissait pas quelqu’un susceptible de convenir pour le poste ou si même lui n’était pas intéressé pour nous rejoindre. Il me répondit promptement que l’idée lui plaisait.  Pour nous, ce fut une très bonne surprise car tout le groupe l’appréciait et aimait la musique d’Absu. Dans le même temps, Moloch vint s’installer en Europe, en France exactement, dans le Nord, à Lille. Il choisit cette ville pour son université et surtout parce que ce n’était qu’à peu près 3 heures de route d’Amsterdam. Chacun son tour, on s’est alors mis à faire des allers-retours Amsterdam / Lille.  

Nous avons donc envoyé par mail notre nouveau CD promo à Proscriptor et il apprit les titres. Juste avant ça, on avait été contactés par un label de Singapour qui voulait sortir notre deuxième album. Tout semblait réglé mais hélas, quelques mois avant d’entrer en studio, le label fut déclaré en banqueroute. A ce moment, j’ai cru que le monde s’était écroulé mais j’ai aussi appris une bonne leçon : quand les choses ne se passent pas forcément comme tu les avais envisagées, ce n’est pas forcément mauvais, je vais y revenir bientôt… Nous décidâmes donc d’aller de l’avant et d’enregistrer l’album sans l’aide d’un label car nous étions sûrs d’être signés par la suite. Nous pensions que notre musique était originale, nouvelle et crédible. Nous avons pris un gros risque : j’ai emprunté de l’argent à un pote et nous avons booké le studio Harrow, à Losser, aux Pays-Bas. Proscriptor a pris l’avion et nous avons répété pendant seulement 5 jours avant d’enregistrer. Il connaissait la plupart des titres grâce au promo que je lui avais envoyé, nous n’avons ajouté que 3 nouveaux titres.  Nous sommes alors entrés en studio et avons commencé le long processus d’enregistrement de Djinn. Nous avons aussi pris la photo qui figure sur l’album dans le studio et avons essayé de faire le maximum de choses là, comme le mix. Une fois terminé, nous avons envoyé les bandes au studio Nomad, au Texas, pour le mastering. 


A alors commencé la lourde tâche d'obtenir une signature. Le groupe en entier s’est relevé les manches et nous avons commencé à chercher des adresses. Nous avons obtenu environ 5-6 offres de contrat d'enregistrement. Nous avons finalement choisi de signer avec Osmose Productions et encore aujourd’hui, je dois accorder le plus gros du crédit à Proscriptor, car il a travaillé dur pour l'obtention de ce contrat. J’ai alors discuté avec Hervé, le dirigeant d’Osmose Prod, et il était très content de nous signer. Nous l’avons finalement rencontré à Lille en 1999, lors du concert de soutien donné pour Chuck Schuldiner. Des gens (NDLR : dont votre serviteur !!) m’ont alors dit qu’Hervé était le gars qui ressemblait à Jésus, avec de longs cheveux, une barbe, etc…  Pour être honnête, le gars n’avait rien à voir avec cette image, me faisant plus penser à un méditerranéen, avec ses cheveux teints en noir). Bref, vous voyez de quoi je veux parler. Je vis alors un gars m’appeler avec son accent français et nous nous rencontrâmes enfin.    

La première chose qu’il voulut savoir, c’était si j’avais bien reçu le virement bancaire pour le budget d'enregistrement. J’ai répondu oui, lui précisant que j’avais déjà tout donné à la personne qui nous avait prêtés l'argent pour enregistrer Djinn (je voudrais souligner que celui-ci n’a jamais insisté pour récupérer vite son argent). Comme vous pouvez imaginer, le fait de signer et de pouvoir rembourser tout l’argent fut un grand soulagement. Le reste de la nuit fut dingue et nous avons tous finis saouls. Quelques groupes d’Osmose étaient là, un certain nombre de labels français aussi, et aussi quelques journalistes. C’était dingue, tout le monde fut bien intoxiqué ce soir-là ! Hervé n’arrêtait pas de tendre son majeur en direction des autres responsables de labels, pour plaisanter, en disant : « Je les ai signés d'abord ! Je les ai signés d’abord ! Allez vous faire mettre !! » [Nde Will : je me souviens très bien de cette soirée qui se termina très tard dans le Splendid, à l'époque où les voisins n'avaient pas encore forcé la salle à fermer ses portes à minuit... Avoir pu assister au commencement de cette nouvelle ère pour Melechesh est un honneur pour moi et un sacré souvenir éthylique ! Hips...]

Djinn était sur les rails pour sa sortie.   



Part 12 – Mars 2010

Un an ! Voilà un an que j’écris cette série !

Ce sont des moments intenses et chaotiques, je m’occupe beaucoup d’écriture de musiques, de paroles, d’arrangements, de roulements de batteries, la gestion du groupe, les répétitions, le démarrage d’un business… En même temps, je fais la navette entre Amsterdam et Istanbul où vit ma petite amie. Entre temps, j’essaie de diner à l’extérieur et de regarder des films intéressants pour me détendre.

Moloch est retourné en Virgine et va bientôt revenir à Amsterdam pour les prochaines répétitions. Le mois dernier, comme je le disais plus tôt, nous étions sur le point d’aller jouer à Amsterdam. Eh bien, nous avons joué, le concert était intense et la réaction à notre nouveau morceau sans titre a été très bonne. Une bonne vidéo de la chanson jouée live peut être vue sur Youtube et d’autres sites du même genre (voir colonne précédente).

Au fait, je recherche ardemment une entreprise qui pourrait sortir deux guitares électriques en V à 12 cordes pour Moloch et moi. On voudrait avoir des grattes comme ça avec nous en tournée. Nous avons parlé avec plusieurs grandes entreprises mais aussi avec de plus petites. Heureusement, nous avons tous les deux une guitare électrique à 12 cordes que nous allons utiliser sur le prochain album. Si vous connaissez ou si vous êtes un constructeur de guitare, contactez-nous. A propos de l’album, on va très bientôt annoncer les dates d’enregistrement. Je suis en contact avec le studio en ce moment.

Bon, le mois dernier, je parlais de l’enregistrement de Djinn. L’album est sorti et je suis allé à Paris et ai rencontré plusieurs journalistes, et puis j’ai passé trois à quatre jours au téléphone à faire la promo pour divers magazines à travers le monde. C’était usant. De longues journées mais qui valaient le coup. Djinn est sorti et les critiques étaient très positives. A l’exception d’une aux Pays-Bas où notre chanson « Genies, Sorcerers and Mesopotamian Nights » a été comparé à un chant à la Iron Maiden ! (!!&^%$). Et d’autres chansons ont été comparées à Impaled Nazarene ! Au bout de dix ans, je suis encore déconcerté. Si vous n’aimez pas, pas de problèmes bien sûr, mais Maiden et Impaled ? Les humains… hein ? (oui, je soupire)


Comme je le disais, le retour sur Djinn était très bon et il y a eu un intérêt massif des médias pour le groupe. Nous avons bien sûr apprécié ça. Nous étions déjà en couverture du magazine grec Metal Invader et il y avait des tonnes de bons magazines et d’interviews en radio. Nous avons dit que Djinn était un album de Metal de Mésopotamie juste pour le différencier des autres genres. Puisque que c’était le nôtre. Plus tard, certaines personnes ont eu tendance à nous qualifier de Metal oriental, un terme avec lequel je ne suis pas à l’aise. C’est quoi du Metal oriental ? Tu vois, le terme est faux. L’Orient est un mot qui était souvent utilisé en anglais britannique pendant la période coloniale pour faire référence à la partie Est de l’hémisphère, alors ça comprenait le Proche-Orient, le Moyen-Orient, l’Inde, la Perse et ça allait jusqu'à l’Est de la Chine, le Vietnam, la Thaïlande (comme la chanson dit « Bangkok, Ville orientale… », bla bla bla, bla), le Japon… Donc, ce terme est très imprécis, c’est comme si on appelait chaque groupe de Metal en Europe et en Amérique du Nord du Metal occidental. Du Metal du Moyen-Orient, du Metal du Proche-Orient, du Metal de Méditerranée, tous ces termes sont plus exacts pour décrire la musique Metal avec des mélodies du Moyen-Orient mais même là, c’est encore assez vague puisqu’il y a plusieurs approches et même des genres différents dans le Metal qui utilisent des rythmes et des « machins trucs » du Moyen-Orient. Au diable les termes Metal, black metal, prog… Je sais que le jargon n’est pas trop important et de temps en temps stupide mais je le mentionne par souci de précision. Je sais, par exemple, que le terme Orient en Allemand veut strictement dire le Moyen-Orient, mais pas en Australien, Américain, Canadien, ou Anglais Britannique. Il y a une description intéressante du mot sur Wikipedia. Allez voir. C’est plutôt compréhensible que beaucoup mettent tous les groupes dans le même panier parce qu’il n’y a pas tant de groupes que ça qui font du Metal de style Moyen-Orient et c’est un phénomène assez nouveau, par rapport à plusieurs groupes qui jouent certains styles depuis dix ans ou plus.

Dans tous les cas, revenons-en au sujet de notre deuxième album. Un peu après que Djinn soit sorti, nous avons filmé le clip «  Genies, Sorcerers and Mesopotamian Nights ». Maurice, de Lowlife Media, et aussi chanteur de Legion Of The Damned, l’a filmé et réalisé. J’ai fait la mise en scène avec le peu de ressources que nous avions. Malgré le manque de moyens financiers, nous avons réussi à faire un bon clip qui fasse son devoir. Nous devions penser avec créativité et travailler ensemble pour que le clip soit le plus convaincant  possible. Je connaissais quelqu’un qui à l’époque possédait beaucoup d‘oiseaux de proie, comme des aigles, des faucons, des vautours, des hiboux ; je veux dire, il en avait 20-30. Il habitait en Belgique et de temps en temps, j’allais dans les Ardennes belges pour faire voler les oiseaux avec lui. Ce sont vraiment des créatures étonnantes.  L’aigle, par exemple, s’envolait de son bras et disparaissait à quelques kilomètres dans les montagnes. Je portais un gant de protection et mettais un petit morceau de viande dans ma paume comme récompense et je devais signaler à l’aigle de revenir vers moi en tapant sur le gant. Bien sûr, je ne voyais pas l’aigle à cause de la distance et des arbres, mais je savais vers quelle direction il volait. Donc, je voyais alors un vague point noir qui apparaissait doucement et qui prenait petit à petit la forme de l’aigle et avant qu’il n’arrive juste au dessus de ma tête et de mon bras, il bloquait littéralement le soleil de ma vue et le son du battement de ses ailes était clairement audible. Il atterrissait alors doucement sur mon bras et savourait sa récompense. Eh bien, cet ami a amené quelques-unes de ces géniales créatures aux Pays-Bas pour qu’elles figurent dans notre clip. Il l’a fait malgré l’interdiction de transférer des oiseaux à cause de la peur de la grippe aviaire. Alors, c’était vraiment sympa de sa part. Il y a une scène où j’ai un vautour et un faucon (ou un aigle) sur chaque main, mais avant que le tournage de cette scène ne commence, deux personnes me soutenaient les bras à cause du poids des oiseaux. En fait, on le voit dans le clip - quand mes bras sont grands écartés avec les oiseaux dessus – petit à petit mes bras se baissaient encore et encore. (Rires) Je ne portais pas les gants de protection, bien sûr, et j’ai donc eu des griffes sur les bras. Les serres ont réussi à me couper les mains qui n’étaient pas protégées. Rien de sérieux cependant. Le clip a finalement était diffusé à la télé dans plusieurs pays alors ça valait tous ces efforts.


Comme le nom de groupe prenait de l’ampleur, un avocat d’Anvers a contacté notre label parce qu’il voulait le CD pour inspecter les paroles. Des gens inquiets nous critiquaient. Alors, le label lui a envoyé un CD, avec la facture pour le CD, et c’est la dernière fois qu’on a entendu parler de lui. Je suis encore bien curieux de savoir ce qu’il espérait. Commencer une chasse aux sorcières, certainement… 

En même temps, à cette période, je terminais ma Licence et j’ai obtenu un job de management chez EMI Music Pays-Bas. EMI incluait les labels comme Virgin, Capitol, Blue Note… C’était une vraie aventure là-bas, j’ai rencontré plein de gens géniaux, mais aussi beaucoup de gros faux-culs. C’étaient des moments étranges. En fait, je pouvais avoir n’importe quel album.  J’ai renouvelé des CD’s de Megadeth, Maiden, Black Sabbath et ainsi de suite. Aller bosser n’était pas vraiment aller travailler. Je prenais mon pied. L’inconvénient,  c’est que j’étais rarement à la maison, toujours sur la route – mais dans des hôtels 5 étoiles super luxueux, des limousines et des hélicoptères. L’autre inconvénient, ce sont les vrais faux-culs que j’ai rencontrés. Mais je dois insister sur le fait que j’ai aussi rencontré des personnes étonnantes, qui m’ont inspiré et aidé. Vous seriez choqués si je vous disais avec quelles grosses pop stars j’ai diné. Je n’y attachais pas vraiment d’importance mais j’ai été surpris de voir par exemple comment se comportent Kylie Minogue, Tom Jones et autres du même style. Très terre à terre, comparés à des demi-dieux autoproclamés de groupes de Metal underground. Je présume que ça a à voir avec l’insécurité de l’individu. Enfin bref, j’aimais aller travailler et trouver le nouveau CD de Slayer, par exemple, posé sur mon bureau par un autre employé qui avait rendu visite à Universal le jour d’avant. Eh bien, en général, j’ai beaucoup appris sur le côté professionnel et discipliné que l’industrie de la musique peut avoir. J’ai aussi vu comment certains cadres font une distinction entre de la musique de merde mais qui va vendre encore et encore et la vraie musique de qualité durable.

Je viens juste de mettre l’album The Return de Bathory pour me réveiller de ma transe. J’écoutais de la musique Sufi et d’autres trucs. Purée, j’aime cet album. C’est comme boire du jus d’orange après s’être lavé les dents, c’est comme manger du chocolat noir amer, comme du café fort sans crème ni sucre, comme une douche glacée, comme un shoot d’absinthe ou de whisky, c’est comme l’odeur du sang et le gout du métal rouillé. C'est-à-dire, c’est brut, aiguisé comme un rasoir, mais c’est trop bon, ça sonne comme l’Enfer. J’adore !  


Part 13 – Avril 2010

Nous sommes début Avril, je viens de quitter Amsterdam et le temps s’améliore après un long et froid hiver, c’est ce que certains appellent « kvlt » (pourri) maintenant ! Je suis dans un avion, essayant de passer mon temps efficacement : je suis assez soulagé de dire que la date d’enregistrement en studio a été confirmée et nous commençons le 10 avril 2010. Nous avons décidé de rester fidèles à notre esprit : casser le moule et garder la tradition de Melechesh  en défiant la norme ; donc plutôt que d’enregistrer à l’Ouest comme c’est la coutume, nous irons à l’Est. Melechesh a décidé d’enregistrer le prochain album à Istanbul, nous devrions y passer environ un mois.

Faire un album est une tâche colossale (ici, en l’occurence : une tâche de la taille d’une corne de mammouth) : ça peut être comparé à une corne de mammouth, qui commence à la base avec plein d’idées différentes et qui se développe vers le haut, pour atteindre  le point culminant qui est l’album fini. Il y a plein de petits détails qui peuvent être facilement mis de côté, donc je me concentre sur ces choses en ce moment. Les répétitions ont été très intenses et riches. À vrai dire, depuis que j’ai quitté Amsterdam avant les autres gars de Melechesh, ils répètent maintenant sans moi, ils s’occupent des petits détails.  Je termine d’écrire les paroles et je travaille sur l’organisation du chant. Comme toujours, les bases seront prêtes mais nous laisserons aussi de la place à l’improvisation sur place. Nous avons toujours fait ça comme ça, ça reste plus intéressant pour nous. La plupart des riffs de guitare et les lignes de chant seront improvisées sur place. Cela dépendra de mon humeur.  L’équipe de tournage du film qui fait ce documentaire sur moi (oui, ça me fait bizarre de dire : un documentaire sur moi) ira aussi à Istanbul pour faire quelques interviews là-bas et filmer le processus d’enregistrement.


Ok, revenons-en à l’aspect biographique, dans les épisodes précédents de Lost !!!, autrement dit, la dernière fois, je me suis arrêté en parlant de mon travail chez EMI Music. C’était à la fois un défi et gratifiant d’être là-bas. Cependant, c’était stressant parce que mis à part le travail que requiert cet emploi, le futur était incertain là-bas du fait de leurs immenses pertes financières, à cause des chutes drastiques de ventes d’albums. D’un point de vue plus réjouissant, la rumeur est sortie dans le groupe EMI (incluant Virgin, Capitol…) que j’étais le gars « Metal » du label. Alors, un jour, à ma grande surprise, j’ai trouvé sur mon bureau la promo de Volcano de Satyricon, parce que EMI Norvège les avait signés. La plupart des branches d’EMI en Europe Centrale n’avait aucune idée de ce qu’était le Black Metal, et ce que beaucoup de gens ne réalisent pas, c’est que chaque branche nationale d’un grand label comme EMI (et Sony BMG, Universal…) est semi-autonome, ils ont le droit de sortir ou de refuser certaines sorties, à moins que la signature ne soit faite par les services généraux du label. Quand j’ai eu le promo, je me suis vraiment battu avec le chef pour qu’il accepte de le sortir, j’ai expliqué que les fans étaient déjà là et que la promotion du disque au Pays-Bas serait beaucoup plus facile que pour les sorties pop. Heureusement pour Satyricon, EMI Pays-Bas a accepté, et la Belgique peu de temps après aussi. La branche EMI au Royaume-Uni en a eu vent, et alors, le chef des branches Européennes m’a appelé pour me demander de coordonner la sortie avec l’Allemagne, la Suisse… L’album de Satyricon est donc sorti dans plusieurs pays. C’est comme ça que ça marche avec les grands labels. Ce n’est vraiment pas un endroit pour les groupes de Metal extrême. Je ne pense même pas que les gars de Satyricon savent que c’est le mec de Melechesh qui a réussi à faire sortir leur album Volcano dans quelques pays (je veux dire, de cette manière-là).

A cette période-là, nous travaillions sur notre 3ème album, Sphynx, celui après Djinn. A propos, Djinn est réédité cette semaine en édition double digipack, avec un nouvel artwork, nouveau livret, remasterisé et inclut un CD bonus, la démo promo de 1998 Mesopotamian Metal qui a été enregistrée à Jérusalem des jours avant que je revienne m’installer à Amsterdam. La manière dont nous avons travaillé sur Sphynx était très organisée, nous faisions beaucoup de démos de pré-production et on les envoyait aux Etats-Unis pour que Proscriptor apprenne les chansons. On avait réservé le studio d’Andy LaRoque (le guitariste de King Diamond) à Göteborg en Suède pour une session d’enregistrement en décembre 2002. Avant qu’on puisse entrer en studio, nous avions fait des répétitions quotidiennes pendant un mois en Hollande. Tous les membres du groupe étaient là et nous avons travaillé à la finalisation de l’album et puis on est allé en Suède pour l’enregistrer. Ça a plutôt été une session d’enregistrement intéressante. On a à peine vu la lumière du jour parce que chaque matin, on allait au studio et il faisait généralement noir quand on en sortait après la journée d’enregistrement. Ça nous a maintenus concentrés, je suppose. Andy a fait un excellent solo de guitare en tant qu’invité, je me rappelle encore quand il est venu nous chercher à l’hôtel, il a dit j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle, c’est qu’hier soir, j’ai passé des heures sur le solo et c’est maintenant enregistré… On s’est tous tu et dit : « et la mauvaise nouvelle ? ». Et il a répondu « oh non, il n’y a pas de mauvaise nouvelle, je plaisantais ». Puisque que le groupe était au complet, on a décidé de faire notre session de photos là-bas, j’étais soulagé qu’on l’ait faite parce que le photographe était très talentueux. Pendant ce temps-là, je travaillais sur la couverture de l’album avec des contacts que j’avais au George Lucas Industrial Light And Magic.  L’artiste qui s’occupait de notre couverture était occupé avec les films de Star Wars et de Hulk, alors il n’avait pas trop le temps. Pourtant, il a fait notre couverture de manière très professionnelle et ça n’a pas pris trop de temps. J’aime encore cette pochette d’album. Tout particulièrement le fait que le taureau ailé de Mésopotamie / Sphinx a été fait avec des plaques de bronze qui sont boulonnées dessus (comme un vaisseau spatial). Et pour mettre en relief la taille du Sphinx, en face du sabot, il y a un prêtre debout sur la ziggourat. Le sphinx est activé par les rayons de l’espace quand il prend vie. Je me rappelle que le groupe avait discuté du fait que si l’album s’appelait Sphynx, les gens croiraient que la couverture serait sur le thème Egyptien ; c’est une association d’idées simple mais fausse (merci les médias). Parce que beaucoup de gens pensent à tort qu’il n’y a qu’un seul sphinx, LE sphinx en Egypte et non pas que n’importe quelle créature de cette nature peut être appelée sphinx comme en Grèce ou en Mésopotamie aussi. Nous avons quand même appelé l’album Sphynx pour faire référence à la créature mythologique de Mésopotamie. Mais nous avons maintenu notre décision de garder ce nom, et oui, beaucoup de gens ont fait le lien (avec l’Egypte) comme prévu. Mais avec le temps, beaucoup de personnes ont commencé à mieux nous comprendre. L’album a fait une percée en Europe et ça nous a ouvert énormément de portes. A la même période, notre premier album a été réédité en digipack en Espagne. Nous avons aussi enregistré une reprise de « Babylon Fell » de Celtic Frost pour un album hommage, cette chanson a été ajoutée plus tard sur la version US de Sphinx.

En ce temps-là, je finissais aussi mes études (une licence) et tout allait bien. D’un autre côté, les Pays-Bas évoluaient et se détachaient de ses valeurs fondamentales qui les rendaient uniques et se dirigeaient vers une voie inconnue et plus sombre, et dont les effets aujourd’hui se sont amplifiés en grosses vagues, qui pourraient très vite devenir un tsunami. Eh bien, rien ne dure toujours. Et je suppose que quand les gens (pas tous mais la majorité quand même) prennent les choses pour acquis, alors, au final, ils sont condamnés à se rappeler et être nostalgiques du « bon vieux temps » et puis ils exigeront une amélioration ; en ne sachant pas, de façon hypocrite, qu’ils sont la base de la cause du déclin du bon vieux temps. Un mouton sensationnaliste, au discours hébété et crédule (un genre très dangereux). En ce temps-là, on a eu plusieurs propositions de tournées que nous avons refusées parce qu’elles allaient faire gagner de l’argent au promoteur et pas au groupe, mais nous avons quand même commencé à jouer live. Nous avons faire quelques concerts en Allemagne, France, Belgique, Canada et nous sommes allés en Terre Sainte pour un concert très cool et dingue à Tel Aviv. J’ai vraiment pris le goût pour la scène et heureusement, après la sortie d’Emissaries, nous avons fait plein de concerts. Je parlerai plus de la période d’Emissaries dans la prochaine partie. Je vais faire de mon mieux pour la finir avant fin avril ou mi-mai, au pire, si j’ai le temps. Ok, je vais maintenant reprendre la lecture du journal Néerlandais pour garder mes connaissances de cette langue.   Dag allemaal en tot de volgonde keer (NDLR : En néerlandais dans le texte, ce qui signifie en gros « A un de ces quatre ! »)


Part 14 – Juin 2010

L’été approche et là, j’écris la 14ème édition. J’ai laissé tomber un article ou deux parce que c’était trop chargé au studio. Mais comme dit le dicton : « mieux vaut tard que jamais !». Je vais plus axer cette édition sur la situation actuelle plutôt que me pencher sur le passé.

Je suis à Amsterdam pour quelques temps seulement. Je n’ai pas été à la maison depuis un moment. Environ une semaine ou deux depuis les 2 derniers mois. Je vais faire la lessive, préparer les bagages et puis je vais retourner à Istanbul pour finir l’album.

Le week-end dernier, nous avons joué au Maryland Deathfest à Baltimore, aux Etats-Unis. C’était génial. Nous avons été très bien reçus. Très bon public. Avant d’aller au Maryland, j’étais à Charlottesville en Virginie, là où habite Moloch. Puisqu’il était là-bas, on s’est dit que ce serait logique qu’on se retrouve là-bas. Nous devions répéter et voir où il habite. J’ai enfin compris pourquoi il est si content et satisfait avec ses études de philosophie. L’université là-bas est pleine d’inspiration. Et je dirais même que c’est un lieu de vacances ! Mon ami d’enfance et le premier batteur de Melechesh, Saro (Lord Curse), sont aussi venus de Californie. La dernière fois que je les avait vus remonte à 2006. On a trainé ensemble (et profité de chaque instant) pendant 3 jours car c’est vraiment une occasion rare. Les répétitions là-bas furent bonnes. Et en fait, l’architecte acoustique du studio où on a bossé est le même qu’aux studios Babajim (où nous enregistrons à Istanbul). Le monde est vraiment petit ! Saro a fait de la batterie donc nous avons pu jouer certaines des toutes premières chansons de Melechesh ! C’était cool…


Puis nous sommes allés à Baltimore. Ce n’était pas trop loin de Charlottesville. On s’est enregistré à l’hôtel et nous sommes allés au festival pour y retrouver Proscriptor et sa femme Tiamatsu. La dernière fois que je l’avais vu remonte à 2002 à Amsterdam, donc c’était bien de se revoir. Voir Ross d’Immolation m’a aussi rappelé de bons souvenirs de tournée. En gros, nous avons vu beaucoup d’amis et de connaissances des Etats-Unis, du Canada et du Pays-Bas. J’ai aimé ce festival. Très différent de ce que je connais ici en Europe. C’était très urbain. Je n’avais jamais pensé pouvoir marcher dans le centre-ville d’une grande ville américaine ou d’une autre ville en entendant du Death/Black Metal résonner dans les rues ! Les Métalleux ont envahi la ville. C’était super à voir. Ça ressemblait à un clip de Suicidal Tendencies, celui où ils jouent dans un parking de Los Angeles en pleine journée d’été. ÇA m’a aussi rappelé le clip « Bring The Noise » d’Anthrax. En tout cas, j’ai vraiment aimé être aux USA. Selon l’endroit où je suis, je me sens chez moi là-bas. Je trouve que les Américains sont très sociables, ouverts d’esprit et extrêmement amicaux.

Peut-être que certains d’entre vous se demandent où en est le nouvel album. Avant d’aller aux USA, nous étions à Istanbul pour enregistrer pendant 5 semaines. Nous n’avons toujours pas fini. J’y retourne demain pour terminer les chants et mixer l’album. Tout le procédé est intense. Nous y avons passé 12 à 15 heures par jour. La musique ? Eh bien, comme je l’ai dit il y a environ un mois, ça représente Melechesh dans une de ses phases. C’est organique et enregistrer avec des instruments traditionnels était très intéressant aussi : un mathurin Azéri, un Santur Perse, un Ney, un Bag lama Saz, un Bindir, un tambour, un sitar indien… Ne vous n’inquiétez pas pour autant, l’album est vraiment très Metal ! Ces instruments apportent une touche cosmique et sont destinés à améliorer l’ambiance et (certaines) mélodies.

Le studio est extrêmement agréable et le personnel est très courtois. A un moment donné, j’ai été épuisé mentalement. Un gars du studio a passé quelques coups de fil et m’a trouvé un yacht. Que demander de plus ? Eh bien, un super son pour l’album ! Beaucoup de musiciens sont venus nous rendre visite et quelques journalistes aussi. Avoir un album terminé signifie des changements dans la vie de tous les jours, puisque depuis 2 ans je passais beaucoup de temps à écrire pour ce disque.


Revenons en arrière, pour parler de la genèse d’Emissaries. Donc, après Sphynx, j’avais la pression et le plaisir de vouloir le surpasser. Donc beaucoup disaient : « On veut te voir surpasser Sphinx ». Merci les mecs et les filles. J’ai mieux dormi après ces remarques !  J’ai commencé à écrire des riffs un jour alors que je traînais avec mon ancien bassiste studio. Il a dit : « Allez ! Enregistrons quelque chose ! »… « Leper Jerusalem » était né. En parlant de ça, les paroles de ce morceau sont extrêmement personnelles et décrivent ma vision et mes sentiments envers la ville. C’était aussi l’époque où mon droit de résidence permanent était terminé légalement. Je peux encore me battre en justice pour ça mais ça voudrait dire y retourner, y passer quelques années et beaucoup de frais. « Ladders To Sumeria » a été écrite en une heure ! D’autres morceaux ont pris 2-3 mois. Je voulais faire une reprise de la chanson d’un groupe canadien, The Tea Party (remettez-vous ensemble les mecs !) et l’adapter un peu. Y ajouter des touches personnelles. J’aime ce groupe et je voulais que plus de fans de Metal les écoutent. Après en avoir parlé avec eux et leur manager, nous avons eu le feu vert. Nous avons enregistré « Gyroscope ». J’ai été soulagé de voir qu’ils l’aimaient beaucoup.

Donc, nous devions trouver un studio convenable. La première idée a été d’enregistrer au Woodhouse en Allemagne et de mixer avec un certain producteur néerlandais. Une semaine avant l’enregistrement, je me suis fait très mal au dos et mon « super » docteur m’a prescrit de très bons et forts antidouleurs, de la famille de la morphine mais qui sont mixés avec des calmants pour que la personne tolère la douleur. Il m’a dit de prendre plusieurs de ces gélules par jour. Je trippais littéralement et je voyais des trucs ! Un de mes amis les a essayés. Il a aussi essayé de l’opium et m’a dit que ces gélules étaient beaucoup plus fortes. Mon docteur ne m’a rien dit sur les effets secondaires (il y en a plusieurs centaines possibles) et ne m’a pas conseillé sur l’arrêt du traitement. Il a simplement dit : « Arrête ! », ce qui était le mauvais conseil car ce genre de trucs, il faut les arrêter progressivement. Sinon, entre autres choses, tu disjonctes et t’es en manque. Donc pendant l’enregistrement tout était sous contrôle et nous avons adopté une routine stricte.


Quand la douleur a cessé, j’ai arrêté le traitement comme ce pauvre type me l’avait conseillé. J’ai eu une discussion mouvementé dans le studio. Et soudain, toutes mes émotions ont pris une ampleur démesurée. J’ai littéralement flippé. Je ne me suis pas reconnu et les autres non plus. J’ai pété un câble! Je suis sorti du studio, me suis trouvé un coin tranquille et me suis allongé dans la neige. C’était au milieu de l’hiver. Puis je suis retourné chez le docteur. Il ne m’a pas aidé. J’ai fait mes propres recherches et consulté un autre médecin. Et vous savez-quoi ? C’était cette merde qu’il m’avait prescrit qui m’avait fait disjoncter ! Et je passe certains détails !

Eh bien, malgré ça, Emissaries a été enregistré mais pas mixé. Nous sommes allés voir ce producteur et il l’a mixé. Pendant qu’il mixait, le son était pourri. Je n’arrêtais pas de le lui dire. Il me répondait : « Mec, je sais ce que je fais. Tout va se mettre en place lors du mixage et la masterisation ». Une réponse merdique classique. Et pourtant, je l’ai cru car il était convaincant. L’album sonnait comme une démo. Je lui ai demandé pourquoi les pré-mixes sonnaient mieux. Il n’a pas répondu. Même Woodhouse était étonné d’entendre que c’était aussi mauvais. Nous avons mis le gars face à ça. Il a refusé de mixer, de nous rembourser ou autre. On s’est aperçu plus tard qu’il mixait plusieurs trucs en même temps ! Heureusement, l’ingénieur du Woodhouse - Dennis Koehne - a remixé le truc entier chez lui dans son studio. Et bon, vous savez comment ça sonne maintenant ! Génial ! Plusieurs mois plus tard, l’album est sorti et j’ai été content de son accueil. Nous avons fait des tonnes d’interviews en Europe puis nous sommes partis aux USA pour en faire davantage. Mon cher ami Adrian Bromley (RIP), qui croyait au groupe et qui était éditeur d’Unrestrained Mag, a fini par travailler pour notre label américain et ce mec nous a poussés en avant. Il a fait beaucoup de bonnes choses pour le groupe. J’aimerais qu’il soit toujours sur cette Terre. Je me demande ce qu’il penserait de nos nouveaux morceaux. Il nous manque beaucoup !

Eh bien, il est 4 du matin, et j’ai beaucoup de faire à demain donc je devrais dormir un peu.
Salutations Sumériennes.


Part 15 – Octobre 2010

Cet été a été très chargé. L’enregistrement de l’album a pris tout mon temps et mon attention, j’ai perdu la notion du jour et de la nuit, j’ai passé plus de 100 jours dans le studio, à quelques jours près. Alors, je suis excusé pour le temps que j’ai mis pour rédiger cette nouvelle colonne ? Je voudrais remercier tout le monde pour sa patience, mais bon ! The Epigenesis est né ! Il est même gravé ! Il est né ! Et en Europe, les disques sont dans les camions et les magasins.

Le principal discours des médias et des fans, c’est que cet album est très attendu ! Je vous assure que je pense la même chose. Quatre ans d’écriture et près de 3 mois d’enregistrement, et là, 2 mois à faire des interviews et de la promotion. Tout se met en place !

Cette fois-ci, je vais éviter de me plonger dans le passé, puisque parler d’autres périodes de ma vie et d’autres albums semble inadapté pendant la sortie de The Epigenesis.


Lors de la précédente colonne, je parlais du Maryland Death Fest alors je vais vous dire ce qui s’est passé ensuite. Donc, après avoir fait une pause à la fin de l’enregistrement et être allé au Maryland pour le concert, je suis retourné aux Pays-Bas quelques jours, puis je suis retourné à Istanbul pour terminer l’enregistrement et le mixage. Ça a été un break très sain qui m’a recentré sur mon objectif. Et j’ai été très content de retrouver les autres mecs de Melechesh, puisque j’avais passé beaucoup de temps au studio tout seul, ça m’avait un peu affecté. Le chant s’est avéré être meilleur que ce que j’avais prévu avant le break, l’enregistrement a été génial. Bizarre, mais excellent ! Je dis bizarre car j’ai chanté l’album en étant à poil, seulement vêtu de mon bijou de sage ; il y avait une petite lampe rouge et quelques reliques mésopotamiennes pour créer l’ambiance. Le studio est immense et j’ai eu le luxe d’apprécier son intimité : la pièce de contrôle était un étage au-dessus donc j’étais tout seul dans le local réservé aux chants. J’enregistrais les chants à partir de 9-10 h du soir jusqu’à l’aube plus ou moins. L’endroit avait quelque chose de sinistre, l’ingénieur du son était un étage au-dessus et tout l’étage où j’étais était vide, sans rien, bien loin de cette petite lampe rouge qui a permis de créer l’ambiance. La raison pour laquelle j’ai fait les chants comme ça était d’essayer d’évoquer un instinct primitif et permettre au chant d’être aussi réel (ou irréel) qu’il est humainement possible. Ça a marché. Selon moi, c’est ma meilleure performance jusqu’à présent.

Reuben, notre ingénieur du son / producteur, m’a apporté un sitar acoustique. J’ai fait quelques enregistrements avec la guitare/sitar hybride électrique mais avec un jeu de cordes différent, pour être exact. Je suis assez branché sitar indien mais je n’en avais jamais joué. J’ai passé 2 jours à jouer de cet instrument pour le découvrir, c’était très naturel, pas forcé, rien de tout ça. Deux jours après, j’ai fait quelques prises avec l’instrument, ça sonnait et rendait bien. Heure après heure, jour après jour, nous approchions de notre but. The Epigenesis avait commencé et le géant se réveillait. Il y a tant d’atmosphères sur cet album, des chansons simples et complexes, des morceaux longs et courts, des morceaux bruts et mélodiques… c’est un vrai album ! Complet et organique, du vrai Metal, pas un truc en plastique !

Après le mix qui a épuisé votre serviteur et après avoir annulé deux fois mes vacances, j’ai enfin trouvé un peu de temps pour m’évader au soleil. Je suis allé dans le sud de la Turquie dans un village côtier appelé Olympos. Cet endroit était tout à fait ce dont j’avais besoin, très alternatif, une petite merveille cachée dans une vallée entre de hautes montagnes. Les logements étaient de simples maisons en bois ou des cabanes dans les arbres, la plage était vierge et protégée et pour y aller, on devait passer par des ruines romaines et traverser un ruisseau. Il n’y avait pas de pollution due aux éclairages urbains donc je pouvais voir la Voie Lactée le soir. J’ai fait quelques feu de bois la nuit, c’était très primitif. J’ai aussi pu naviguer pendant 4 jours dans des endroits superbes sur la côte turque méditerranéenne, ça a été vraiment une expérience cicatrisante/reposante.


Peu après pourtant, j’ai dû retourner en Europe pour la presse, à Donzdorf, en Allemagne exactement, au QG de Nuclear Blast, puis je suis parti en Finlande pour un festival, et puis encore de la promo à Londres. Londres a été super, j’ai rencontré beaucoup de vieux potes et me suis fait de nouveaux amis. Sam, le responsable chargé des relations avec les artistes pour Jackson Guitar UK est venu aussi, ça a été bien de le voir enfin en vrai. Les mecs de Dimmu Borgir étaient aussi là pour la presse au même hôtel, donc on a traîné ensemble, ce sont vraiment des mecs cool.

A propos de Jackson guitar UK : ils nous ont fourni une King en forme de V pour la faire gagner par un concours… J’ai malgré moi dessiné dessus quand on m’a demandé de la signer mais on m’a dit que les gens l’aimeraient comme ça ! Et puis j’ai trouvé que c’était vraiment sympa de la part de la société d’organiser ce concours en notre nom.

Pour changer de sujet, beaucoup de gens ont spéculé à propos du documentaire qui se faisait sur votre serviteur. Voilà la situation : je suis le sujet abordé dedans, pas le créateur, donc je n’ai pas grand-chose à expliquer. Mais ce que je peux dire, c’est que la première partie du film a été perdue ! Et après ça, le réalisateur a rencontré des problèmes médicaux qui l’ont empêché d’avancer. Un autre réalisateur a pris le relais. Je suppose que plus d’infos seront disponibles un jour ou l’autre, mais soyez assurés que ce sera finalisé un jour et que ça ne devrait pas trop prendre de temps.

La tournée, eh bien, ce sera une période chargée, la campagne magique des Sumériens va commencer dans quelques mois. Nous avons une mini tournée prévue en Europe centrale, le « Awakening The Giants Tour », pendant laquelle nous ferons 4 ou 5 dates dont une avec un set allongé, des jam sessions, et des morceaux que nous ne jouerons pas sur les autres shows. En janvier, on prend la route avec Nile en Europe. D’après ce que j’ai entendu, les gens semblent contents que ça devienne enfin réalité, nous aussi, car nous sommes deux groupes qui véhiculent la mythologie du Proche-Orient. Peu après ça, nous partirons en tournée aux Etats-Unis avec Rotting Christ, une autre virée mystique méditerranéenne.

Je dois vraiment y aller maintenant et m’entraîner à la guitare. J’espère qu’à partir de maintenant, je vais de nouveau rédiger mes articles plus régulièrement ! La prochaine fois, je continuerai avec l’histoire chronologique. Je suis en train d’apprécier un bon vin alors il paraît opportun de vous dire : cheers, proost, salud, sherefe, lehaym, sihtak, kong chien, santé, yamas, kampai, budem…


Part 16 – Janvier 2011 

Première colonne de l’année 2011 et nous en sommes au n°16. Pour quelqu’un qui détestait écrire, je trouve que c’est une vraie réussite. 2010 a été une année très productive, c’est l’année où The Epigenesis fut enregistré et est sorti il n’y a pas longtemps donc j’éprouve un sentiment de réussite et de soulagement.

Actuellement, on se prépare à démarrer une longue tournée en Europe avec Nile. Dew Scented, Zonaria et Darkrise seront avec nous pendant la première partie de la tournée. Bibleback, Pressure Points et Goat The Head seront sur la 2ème partie. Je suis impatient mais les 3 mois à venir seront très intenses physiquement et mentalement, car quelques jours après cette tournée, nous partirons aux Etats-Unis pour une tournée avec Rotting Christ.

Les derniers mois ont été rythmés par beaucoup de promo pour l’album et les répétitions. J’avais aussi besoin de m’entraîner à jouer les nouveaux morceaux pour le live, d’assurer le chant et la guitare en même temps, ça m’a pris 6-8 semaines. Dès que la promo a été terminée, nous avons attaqué nos shows avant la sortie de l’album, cette tournée s’est appelée Awakening The Giants Tour. Ça a consisté en un petit circuit de 6 dates surtout axées sur le Benelux, la France et l’Allemagne, c’était bien pour s’échauffer. Jouer la chanson éponyme qui dure 12 minutes a été une nouvelle expérience. C’était comme un voyage dans les ondes sonores et jouer ce morceau a été très gratifiant et en même temps difficile. Je suis ravi que le public l’ait apprécié car ce morceau a une atmosphère psychédélique improvisée et pas du tout accessible, Moloch a utilisé la guitare électrique 12 cordes et moi la 6 cordes pour garder les sons agressifs. Ce qui est très important pour moi, c’est que The Epegenesis a commencé  à se fondre dans le public. L’album est très personnel et complexe mais à la fois très simple et je savais que beaucoup d’auditeurs auraient besoin de quelques jours ou semaines pour digérer pleinement toutes ses dimensions et couches. Je savais que plus le temps passerait, plus l’album s’ancrerait dans le psychique humain. Après cette tournée en Europe sous la neige, nous avons dit au revoir aux autres, c'est-à-dire à Svart Crown, un excellent groupe de Black Metal français, au crew du Massive Music et à Noctefiria qui a d’ailleurs fait 15 heures de route depuis la Slovénie jusqu’aux Pays-Bas sous la neige dans un van rempli de leurs matos, chapeau les gars !


Juste après la tournée, Melechesh est allé à Istanbul pour tourner un vidéo-clip pour « Grand Gathas Of Baal Sin » : nous avons choisi de retourner là-bas pour rester dans la lignée de l’enregistrement de l’album et des séances photos, et en plus nous avons trouvé un endroit superbe, The Basilica Cisterns (ou Yerebatan Sarnici). Cet endroit a été construit il y a 1700 ans, puis il a été inondé et est devenu une réserve d’eau. Il y a une statue de Médusa à l’envers là-bas, c’est sympa. Le site est ouvert aux touristes car il fait partie des lieux historiques d’Istanbul donc nous avons dû le louer via le ministère de la culture pour une nuit après la fermeture. Des scènes de James Bond, du film Bons Baisers de Russie, ont été tournées là-bas ! C’était intéressant, Nuclear Blast va sortir quelques vidéos du tournage donc vous pourrez voir comment les choses se sont passées.

Laissez-moi vous parler du tournage, ce fut quelque chose ! Pour commencer, la logistique a été très difficile, il faisait très froid donc l’eau de la Basilica Cisterns aussi, je parlerais de ça plus tard. Le premier soir, le groupe a rencontré le producteur Rouzbeh Heydari qui a fait le voyage depuis Toronto au Canada. Je connais Rouzbeh depuis plusieurs années et je l’ai rencontré plusieurs fois au Canada. Nous avons fait un planning avant la production puis le jour suivant, nous nous sommes répartis en groupes et nous sommes allés en ville pour trouver des objets et des accessoires, la même chose le samedi matin.

La compagnie de batterie chez qui nous avions réservé une batterie nous a laissés en plan, ce qui était un manque de professionnalisme de leur part, donc j’ai dû passer plusieurs coups de fils à mes contacts et un ami d’un groupe appelé Undertakers nous a trouvé une batterie que je pouvais louer. Des cymbales Agean, marque qui sponsorise Xul, était fournies avec donc c’était bien. Nous avions deux voitures conduites par des amis mais nous avons eu besoin d’une troisième plus grande pour le matériel de tournage. Il nous a manqué des chauffeurs, ça a posé problème. La plupart de mes gars ne savent  pas conduire : vous savez, aux Pays-Bas, passer le permis peut être très onéreux, près de 2000 euros. Et beaucoup aiment leur vélo ou se contentent du service de transport en commun. Donc, on ne peut jamais compter sur mon bassiste et mon batteur pour conduire. Rouzebh conduit mais comme la plupart des gens en Amérique du Nord, il ne sait conduire que des automatiques. Donc nous avons dû trouver un van ou une camionnette automatique. Nous en avons trouvé une après de longues recherches et bien sûr, ils nous l’ont facturée à prix d’or. L’équipe était géniale et efficace, au total, en comptant le groupe, nous étions 12. Le maillon faible était les assistants, c'est-à-dire le chef des photos qui était censé faciliter les choses.


Rouzbeh s’est dévoué à la tâche et a fait un travail fantastique pendant que beaucoup d’ « assistants » restaient assis bêtement avec les yeux grands ouverts, à nous regarder en mangeant de la pizza, il en a bavé pour construire une estrade pour la batterie, il en a oublié de manger et dormir pour travailler comme une bête, pas beaucoup de sommeil et de nourriture pendant presque deux jours.  Le dernier jour du tournage, quand nous avons dit « coupé » et tout rangé, il s’est mis sur le côté et s’est effondré.  Rouzbeh est une personne intéressante que je peux aujourd’hui dire avec plaisir qu’il est aussi un ami. Il y a quelques années, il est resté dans le coma pendant un mois. Après avoir appris cela, je voulais savoir s’il était conscient pendant son coma et il m’a dit qu’il avait eu des cauchemars étranges. Il savait qu’il ne pouvait pas bouger, parfois il entendait des gens autour de lui, mais cela lui a paru durer des jours et non pas un mois. Je suis très intéressé par tout ça : j’ai lu des articles sur des gens restés dans le coma pendant 2 ans et ils disent qu’ils entendaient tout ce qui se passait, mais d’autres ne sont pas d’accord. L’esprit est fascinant. Pas de soucis, je ne dévoile rien sur lui sans son accord.

Revenons en au clip, la plupart des problèmes de logistique sont dus à la taille de la ville, il y a plus de 13 millions de gens ici, donc aller chercher quelque chose peut prendre 3 heures juste à cause de la circulation. Et pour la batterie, j’ai du déplacer une double caisse de 5 étages depuis le lieu de location qui est en fait un local de répétition.  Tout le monde était sur place alors pendant que j’attendais qu’une voiture vienne me chercher, pour gagner du temps, j’ai décidé de descendre la batterie. Et dans des scénarios comme ça, il y a toujours des merdes. La voiture était pleine à craquer, c’était marrant. J’ai dû rentrer dans une grosse caisse et laisser une partie de mon corps dedans parce que la grosse caisse était sur le siège arrière. La voiture a dû rouler à 30km/h maximum car à n’importe quel sursaut brusque, ma jambe se serait cassée et se serait disloquée vu comme j’étais assis. Mais nous en avons bien rigolé, quelqu’un a dit que je ressemblais à un personnage de Sesame Street !

Quant au Cisterns, cet endroit est hallucinant et les piliers qui soutiennent l’édifice rappellent la couverture de notre album et certains thèmes de textes. Nous avons dû aller dans l’eau (jusqu’aux genoux) mais il faisait sacrement froid. Nous avons commencé à filmer mais avant ça, certains acteurs ont fait des scènes d’auto-flagellation et ça a bien rendu. Les choses ont commencé à traîner, les employés (les gars de la sécurité et de l’entretien…) du site sont devenus nerveux et voulaient qu’on parte. Il était minuit, mais finalement ils ont été d’accord pour rester plus longtemps, jusque 6 h du matin… un gros « pourboire » a sûrement facilité les choses. J’ai dû rester sur une échelle qui était dans l’eau pour une scène, c’était pour avoir le bon angle, donc mes hanches balançaient sur l’échelle, cela à pris au moins 2 heures. Mes jambes étaient mortes car ma circulation sanguine était stoppée ; quand je suis descendu de l’échelle dans l’eau froide, le sang est vite descendu dans les jambes mais comme l’eau était vraiment froide, ma température corporelle a chuté d’un coup. J’ai commencé à trembler sans pouvoir me contrôler donc on m’a emmené dans la salle du staff pour me déshabiller, me mettre une couverture et me faire asseoir devant un radiateur. Mon pantalon était trempé mais on l’a oublié dans le coffre de la voiture jusqu’au lendemain quand nous avons dû tourner des scènes en extérieur.


Nous nous sommes couchés à 7 du matin et le réveil a sonné à 9h30 ou 10h pour rejoindre le lieu de tournage en extérieur. Manque de sommeil = danger quand il faut rouler avec 3 voitures dans la circulation dingue en Turquie. Rejoindre le lieu nous a pris la moitié de la journée. Nous avons manqué la lumière du jour mais nous avons pu tourner quelques scènes. Pendant ce temps, le van s’est embourbé dans la boue près d’un ravin. On s’est rendu compte que le van n’était pas un 4x4. Incroyable pour un van aussi cher ! Coincé dans la boue sans être un 4x4, aucune chance d’en sortir. Alors, pendant que le crew filmait des scènes où ne devait pas figurer Melechesh, on est allé pousser le van que ma petite amie conduisait, et en fait ça n’a pas marché. Il a encore glissé de 2 mètres, très près du ravin. J’ai dit stop et elle est allée au village pour trouver un fermier avec un tracteur. Il est venu et nous a sortis de là.

J’ai dû porter mon pantalon mouillé et gelé parce qu’il était resté dans la voiture et n’avait pas pu sécher là. On m’a filmé devant une falaise avec la mer derrière moi, il y avait donc un vent glacial. Nous avons encore tourné et avons rejoint l’autoroute ; je conduisais la plus petite voiture et à 3 reprises, des dingues ont presque accroché ma voiture. A un moment donné, Rouzbeh, qui conduisait le van derrière moi, a vu un gros camion me doubler et passer à quelques centimètres de moi. Il a cru que j’étais fini ; du coup, il a presque failli avoir un accident aussi. Ils roulent comme des dingues franchement ! J’ai poursuivi une voiture qui avait failli me rentrer dedans, je voulais aller casser la gueule au type mais il s’est barré. Je ne veux pas être ennuyeux avec tous ces détails mais même le jour après le tournage, le groupe et le producteur étaient dans un hôtel moderne dans un beau quartier mais même là, je peux vous dire qu’on a été réveillé par des coups de feu et quelqu’un qui hurlait. Apparemment, une femme s’est pris une balle dans la jambe, l’ambulance est venue, on m’a dit qu’il y avait du sang, très étrange.






Je n’ai pas écrit depuis quelques jours mais me revoilà. Encore une fois dans un avion avec rien à faire donc j’ai trouvé que c’était le meilleur moment de terminer cette colonne, j’avais promis de revenir sur la chronologie. Dans la partie 15, je m’étais arrêté sur l’enregistrement de The Emissaries et tous ses défis. Cela va sans dire, quand il est sorti et comme souvent avec Melechesh, il a fallu un mois pour que les fans le digèrent. Nous avons été contents de voir que l’album a été bien reçu par la presse et qu’il figurait en haut des playlists et des albums de l’année, et pour moi c’était un soulagement énorme car mon objectivité était absente. J’ai tout évité, même d’écouter l’album pendant plusieurs mois. J’ai fait de la promo à Paris et je suis allé à New York pour assurer la promo nord-américaine, c’était bien d’être là-bas.  Comme je l’ai déjà raconté dans une colonne précédente, j’ai vécu aux Etats-Unis pendant quelques mois avant ça mais c’était en Californie. J’y étais allé pour être le garçon d’honneur au mariage de mon ami d’enfance. Lord Curse (Saro) était là aussi. Le mariage était génial, c’était dans une vigne, donc on a pu goûter du bon vin. J’ai ensuite trainé à Berkeley, San Francisco, San Jose, Las Vegas et Hollywood. C’était cool de retourner à Hollywood, je n’y étais pas retourné depuis la fin des années 80. J’y ai vu de la famille et des amis, j’ai traîné dans mon bar préféré, « The Rainbow », je suis allé voir  le collège où j’étais resté un peu (Le Conte Jr High). Je suis allé au bureau de Century Media / Nuclear Blast puisque que j’étais dans le coin pour dire bonjour à ceux que je connais. C’était cool et ce soir-là, des potes sont venus me chercher et nous sommes allés dans un studio à Glendale, c’était excellent. Il appartenait aux meilleurs batteurs d’Arménie à l’époque. Le propriétaire a été très accueillant, son fils est un fan de Melechesh et c’est lui qui m’avait invité. Nous avons tous jammé jusqu’à l’aube. Mais ce batteur a une tumeur maligne dans le cou donc il ne pouvait pas parler ; il avait une tumeur grosse comme une balle de tennis mais comme un dingue, il s’est mis derrière la batterie et a commencé à jouer ! Tu pouvais voir toute la joie dans ses yeux, c’est comme s’il oubliait le monde entier. Ça m’a beaucoup touché ! Il y avait quelqu’un de marrant avec nous ce soir-là. Je suais à force de jouer et j’ai dit à cette personne que je ne nommerais pas : « purée, il fait très chaud et je sue comme un cochon ». Il a répondu : « pense à ça pendant une seconde : je porte un t-shirt blanc, je n’ai pas chaud » ! Hum, il était 3 heure du mat’ donc pas de soleil. Des fois, je me dis que je vis pour observer la comédie naturelle humaine.

J’ai laissé mes pensées divaguer encore une fois… Je disais donc que j’étais allé à New York pour faire de la promo, c’était vraiment génial. J’ai rencontré plein de journalistes et des éditeurs de magazines. Je dis ça car malheureusement, beaucoup de magazines ont disparu en Amérique du Nord comme Metal Maniacs, Metal Edge et Unrestrained. Celui-là s’est arrêté après la mort de son éditeur, qui était notre promoteur presse, Adrian Bromley. C’était mon hôte à New York et on avait passé une super semaine ensemble. Emissaries est sorti et les offres de concerts n’ont pas arrêté. Melechesh a occupé tout mon temps. J’ai donc décidé de me consacrer au groupe et c’est comme ça que c’est devenu ma principale et seule activité. A partir de là, j’ai enchaîné festivals sur festivals, concerts après concerts. Ça n’arrêtait pas ! J’étais très content mais l’anxiété et le stress étaient énormes. Ça se voyait à la maison mais c’était un rêve éveillé. Comme toujours, ma famille à Jérusalem me torturait mentalement pour que j’arrête et du coup, je les ai ignorés comme je l’ai toujours fait mais d’une manière polie et philosophique. La guerre familiale des choix,  qui avait commencé au début des années 90, n’allait pas s’arrêter. Je ne me suis jamais imposé à personne, il s’agissait de ma vie et de mes rêves.


Part 17 – Mai 2011 - NEW !!!

Me revoilà de retour après un long silence. Que puis-je dire ? J’ai naïvement pensé que je pourrais écrire quelques lignes pendant les tournées hivernales et… j’avais tort ! J’ai en effet été malade comme un chien durant la majorité de la tournée européenne de février / mars, du coup, ma routine était simple : je passais du lit à la scène, puis de la scène au lit. Jour après jour. Après la tournée, j’ai eu quelques jours de repos et je suis donc allé à l’hôpital me faire examiner afin de trouver la raison de tout ça et me faire soigner. Ça a été mieux ensuite.

La tournée européenne d’hiver s’est déroulée en compagnie de Nile, Dew-Scented, Zonaria et Darkrise pour la première partie, puis Nile, Bibleblack, Pressure Points et Goat The Head pour la fin. Ce fut excellent malgré certaines difficultés techniques et un temps souvent exécrable, mais nous avons finalement mieux fini en Irlande et Grande-Bretagne. La réponse du public fut phénoménale. 

En Amérique du Nord, nous avons tourné avec Rotting Christ, Hate, Abigail Williams et Lecherous Nocturne (ou Nocturne Lecherous, tels qu’ils furent annoncés en Arizona !). J’ai adoré tourner aux USA, notamment au niveau de la diversité des paysages et des climats (on est passé des montagnes enneigées aux déserts, sans oublier les plages ensoleillées). Les tour-bus américains sont très confortables, ce qui est d’autant plus utile quand il n’y a pas de backstages pour se changer. Par contre, la location coûte très cher et c’est vraiment un challenge de tourner aux USA quand tu viens d’Europe, je pense surtout aux infrastructures et aux pratiques du business, pas à la réponse des fans ou ce genre de choses. En Europe, un groupe comme le nôtre n’a aucun mal à tourner. Il suffit juste de dire que nous cherchons des dates et on nous en propose. Le matos est prêt à l’avance, tout comme le crew, le tour-bus, la bouffe et les boissons. Aux USA, au contraire, chaque groupe doit bien spécifier ce qu’il veut et doit arranger lui-même (ou le label) son propre transport, sa propre équipe technique, son propre matos. A ce titre, nous avons été extrêmement chanceux d’avoir notre label manager en Amérique (Gerardo de Nuclear Blast) qui connaissait tout ça, et qui a tout arrangé pour nous et qui a aidé pour la promotion. EVH nous a filé des amplis à lampes et Pearl la batterie, par le biais d’une entreprise de location de matos de New York.


A part ça, la tournée fut excellente. On a rencontré beaucoup de gens différents : cela allait des protestataires chrétiens – qui n’avaient que la haine dans leurs yeux (tout comme ils ont la haine envers tout ce qui ne les concerne pas), en passant par des gangsters, des peaux-rouges ou encore des hippies. Je suis très content d’avoir pu revoir certains de mes potes d’enfance en Californie. En parlant de ça, jouer à Hollywood a été spécial pour moi car je connais bien l’endroit, y ayant vécu à la fin des années 80 ; ce fut vraiment cool d’y revenir pour un concert. La réponse du public au Key Club fut phénoménale et évidemment, comme prévu, nous avons fini au Rainbow pour une fiesta. De plus, le premier batteur de Melechesh (Lord Curse) et mon meilleur pote nous ont suivis à travers la Californie ; le fait de les avoir avec nous fut donc super, d’autant que mon pote d’enfance ne nous avait jamais vus en live !  Il a rattrapé ça puisqu’il s’est finalement tapé 4 concerts d’affilée ! La tournée s’est achevée en Caroline du Nord et j’ai repris un avion vers la Californie pour passer une semaine avec mes amis.  J’ai pu ainsi visiter les studios Industrial Light & Magic de George Lucas, où Lord Curse bosse. J’ai pu voir des costumes terribles comme celui porté par Dark Vador dans le premier épisode de La Guerre Des Etoiles, le robot original R2-D2 et d’autres trucs du genre. C’est assurément un endroit sympa pour travailler mais je préfère quand même mon « métier » actuel !
 
En parlant de films… En premier, lors de la tournée est sorti notre clip pour “Grand Gathas of Baal Sin” et je suis extrêmement satisfait du résultat. Après le show de Toronto, le réalisateur, qui se trouve être originaire de cette ville, nous a invités à son studio, et devant quelques cocktails, nous a montré le résultat sur grand écran. Nous fûmes contents de voir enfin ce que ça donnait. Après quelques petits soucis, le clip est finalement sorti et les retours ont été très positifs. Faire un clip n’est pas anodin, cela étant principalement dû au fait que les budgets alloués sont plutôt ténus. Le nôtre a été dépensé dans la location de l’endroit où nous avons tourné, auprès du Ministère du Tourisme et de la Culture de Turquie, et aussi dans les avions et autres frais. Aussi, le plus souvent, la plupart des groupes n’ont d’autre choix que de se jouer devant un écran vert et d’ajouter ensuite des images digitales. Pas de problèmes dans ce cas-là, mais si le budget alloué est ridicule, le résultat risque de l’être encore plus et de n’être pas crédible. Nous avons fait en sorte d’éviter ce genre de choses et je suis donc fier de ce clip. 


Le deuxième sujet à propos des films s’est aussi déroulé au Canada. Il y a ici une nouvelle émission TV en production, appelé The Cool Guys Files. L’émission tente de poser un regard sur les vies des gens qui ont une vie extraordinaire. Par exemple, un épisode s’est intéressé à un snow-boarder, un autre à un entrepreneur. Eh bien, j’ai été honoré d’avoir été choisi en tant que sujet d’une de leurs émissions. Une équipe m’a alors suivi à Montréal et Toronto, a interviewé le groupe et moi-même, a filmé le concert et le tour-bus et tout ce qui se passe derrière la scène. Ça va être diffusé au Canada et en Chine, et probablement aux USA également ! J’espère que ceci compensera légèrement ma contribution au film Global Metal (la version de cinéma), dont le traitement fut influencé politiquement et mal informé, indépendamment de l'idée générale qui était bonne. Eh bien, la saga continue, je suppose.

Beaucoup d’entre vous m’ont demandé pourquoi nous avions laissé partir notre bassiste, Rahm. C’est un bon gars, il a été officiellement avec nous 1 an même s’il était déjà notre bassiste session live avant. Mais ses duperies ont énormément énervé les pros dont nous faisons partie et il y a eu trop d'incidents, certains tout à fait sérieux. J’en parlerai peut-être plus tard avec plus de détails mais je pense que ce n’est pas le moment. Tout ce que je peux dire, c’est que nous en sommes arrivés là afin de ne pas devoir louper des concerts pour des raisons évitables. Beaucoup de candidats se sont présentés. Certains provenant de formations musicales déjà bien établies et d’autres un peu moins. On  admire même certains candidats par rapport aux groupes dans lesquels ils jouent ou ont joué, avons même parfois partagé des affiches avec eux, mais ça n’influencera en rien notre processus de prise de décisions. On espère que nous choisirons un candidat bientôt mais nous prendrons notre temps pour l’annonce officielle.

Allez, je vais finalement retourner à Jérusalem pour quelques semaines parce que j’ai un peu de temps libre devant moi avant les festivals d’été et les tournées de cet automne. Ça sera ma première visite là-bas depuis deux ans et je suis impatient de retrouver ma famille et mes potes. Moloch sera là aussi donc nous en profiterons pour écrire des titres. Il se pourrait bien que ça se passe dans mon jardin familial : du beau temps, des boissons fraîches et de la musique ! Que demande le peuple ?


A suivre....



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