Opeth est un groupe qui suscite le débat, la controverse, des
avis divergents, et pas seulement dans notre rédaction. Au
risque d’être réducteur, on peut dire qu’il
existe deux époques et donc deux catégories de fans
séparés par un album, Blackwater Park, qui symbolise un
vrai tournant dans la musique du groupe. C’est avec cet album
qu’Opeth a réellement connu le succès et n’a
plus, avis totalement personnel, sorti d’album de qualité
depuis.
Vous comprenez donc tout de suite que votre serviteur se place
directement dans la catégorie des vieux de la vieille pour qui
Opeth était avant tout la symbolique la plus parfaite de la
ballade en forêt par une nuit d’hiver. Les albums
Morningrise et surtout My Arms Your Hearse atteignaient des sommets
dans cette allégorie. Le diptyque Deliverance et Damnation a
plongé le groupe dans une musique passable au niveau Death mais
brillante au niveau ballades 70’s et dont malheureusement aucune
image ne ressortait, les émotions et l’ambiance
disparaissant réellement en comparaison des albums qui les
précédaient. Ghost Reveries, l’album qui a suivi, a
lui un peu redressé la barre, la qualité étant
réellement présente, mais encore une fois, le
côté trop plastique du son et le jeu en roue libre de son
génial leader Mikael Åkerfeldt ont fait prendre une toute
autre direction au groupe qui n’a pas su assumer totalement ses
influences 70’s à son Death progressif. Vous allez me
dire, pourquoi cet historique tout à fait personnel ? Tout
simplement car après ces péripéties et les
départs consécutifs de Martin Lopez (batterie) et Peter
Lindgren (guitare), on ne donnait sincèrement pas cher de la
peau du groupe. Et c’est certainement ce qui a amené
Mikael Åkerfeldt a se reconstruire et à se sortir les
tripes sur le nouvel album que nous avons enfin entre les mains,
Watershed, qui redonne enfin foi dans le groupe.
C’est un peu comme s’il avait fallu 3 albums pour
qu’Opeth sache enfin quelle direction il fallait prendre, passer
le cap nécessaire, se redéployer dans la nouveauté
afin d’atteindre une partie du Graal. Et de la nouveauté,
nous en avons… De manière liminaire et à titre
d’exemples, citons les éléments suivants :
intégration d’une voix féminine très douce
sur « Coil », premier morceau de l’album et une
ballade, svp ! Plutôt étonnant et délicat comme
entrée en matière. Riffs doom et puissants sur les
premières notes de « Heir Apparent », blast beats
avec de la voix claire par-dessus sur « The Lotus Eater »,
dont le break final au clavier est tout simplement fabuleux, ballade
majestueuse avec « Burden » sur laquelle l’aura de
Deep Purple flotte en messie (bon ok, ça, ce n’est pas
tellement nouveau), riffs doom encore et envolées somptueuses du
chant d’Åkerfeldt sur « Porcelain Heart », qui
a encore fait des progrès, psychédélisme et
émotions palpable sur les 11 minutes de « Hessian Peel
»…
Tout ici est d’un niveau réellement brillant et impose le
respect. Opeth s’assume enfin et déploie tout son talent
en laissant libre court aux claviers de Per Wiberg, en laissant une
place prédominante aux guitares acoustiques, au jeu
étonnement tout en finesse d’Axe, ce batteur que nous
avions enterré après les quelques shows que nous avions
vus avec lui et dont les prestations démontraient à quel
point sa technique collait plus au death vraiment bourrin
qu’à la musique plus versatile d’Opeth. Finalement,
seul le morceau « Hex Omega », final de l’album,
gâche un peu la partie en étant un ton en dessous.
Avec Watershed, Opeth a su se ressourcer suffisamment pour nous livrer
un album immodéré, flamboyant, pas parfait mais qui
rassure sur le futur du groupe et sa capacité à
renaître de ses cendres quand il est au pied du mur. Un grand
bravo !
Site : http://www.opeth.com/
Site : http://www.myspace.com/opeth
Pierre Antoine