La Madeleine de Proust. Qui n'en a pas entendu parler ? Et bien,
après une intro pétrifiante, Portal me fit
éprouver le même phénomène avec "Outre". En
effet, à peine ai-je entendu les guitares que me voici
transportée il y a quatre ans à un concert de Meshuggah
que j'ai fait sous space-cake. Mais n'allez pas vous méprendre ;
la musique de Portal n'a rien à voir avec la musique du groupe
sus-cité. Par contre, le son, perçu par le prisme de la
drogue verte dans le cas de Meshuggah, et perçu tel quel dans le
cas de Portal, oui. Je me retrouve devant les enceintes à
essayer de percevoir le son des guitares qui me paraît être
une espèce de boule que mon oreille n'arrive pas vraiment
à percevoir (ah, les comparaisons du drogué). En fait,
pour ce qui est du son, "Outre" est quasiment inécoutable. Il
faut s'accrocher pour tenir jusqu'à la dernière seconde
sans appuyer sur le bouton stop. Des guitares qui semblent
étirées et qui semblent étirer le temps sur des
riffs qui pourraient vaguement faire penser à Morbid Angel, tant
l'esprit en proie à l'ennui se met à vagabonder...
Des compos qui en viennent toutes à se ressembler et qui
produisent sans doute bien autre chose que l'effet recherché :
une apathie des plus épaisses. Le tout entrecoupé d'un
interlude non-musical (j'irai même presque jusqu'à dire
a-musical) qui n'a d'autre intérêt que de vous
défoncer les tympans. Bruitiste, en somme. Et que dire de la
batterie qui sonne électronique au possible ? Et comme
décalée ? Bref, la platitude. La platitude dans une
certaine tension, peut-être, mais la platitude n'a t-elle pas
raison de la tension à l'usure ?
Pour ce qui est de l'autre album, "Seepia", et qui est apparemment le
plus ancien, dès les premières notes, me voici en pleine
descente. J'entends les guitares, mais je ne perçois la voix
qu'avec difficulté et j'ai mal à la tête. Un chouia
mieux que "Outre", quoique toujours aussi bordélique,
répétitif, chaotique, cacophonique et fatigant. Une boue
compacte qui ne laisse aucune place à la respiration. On peut
vaguement songer à Revenge ou encore Blasphemy dont ils
pourraient constituer un lointain cousin death metal, quoique Portal se
définisse comme un croisement entre Beherit et Immolation
(personnellement, je pouffe). Le son est sourd, le bruit de fond
permanent, les guitares noient la batterie et la voix qui, de toute
évidence, ne font que suivre les dites grattes. Si la musique de
Portal devait m'évoquer une image, ça serait celle de la
purée de pois cassés non moulinée. Des grumeaux
partout, aucune cohésion d'ensemble à part
peut-être la couleur vert vomi des grands jours. Portal se vante
de ne pas respecter les règles ; le groupe n'a sans doute pas
compris que la déstructuration part d'une structure initiale,
d'où le peu d'intérêt de leur musique. En guise de
déstructuration réussie, je m'en vais écouter The
Velvet Underground et quelques oeuvres de Bartok et Ligeti en buvant un
bon pastis - histoire de remonter le niveau - refermant le Portal,
à jamais certain de ne plus goûter à cette
madeleine avariée.
Site : http://www.portalabode.com/
Prepuce
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