Depuis le début du millénaire, il faut bien avouer qu'en
matière de jeunes groupes dans le petit monde du metal, rares
sont ceux qui sont parvenus à tirer leur épingle du jeu.
On mise le plus souvent sur les albums des vieux groupes (Iron Maiden,
Judas Priest...), voire ceux de la génération
précédente (Iced Earth, Nightwish) mais parmi les groupes
formés après l'an 2000, il est difficile de voir en telle
ou telle formation celle qui assurera la relève de demain.
Même si le succès de Scar Symmetry ne semble pas
prêt d'exploser les barrières du metal pour aller
conquérir le grand public (d'ailleurs, le groupe n'est pas
encore assez connu au sein des hordes barbares), en matière de
succès artistique, Scar Symmetry a tous les atouts pour se
détacher sérieusement de la masse. Pourtant,
c'était mal barré lorsqu'est sorti son premier album:
Symmetric in Design, en 2004. Un bon album, mais malheureusement trop
inscrit dans la lignée de ce qui se faisait en matière de
death metal mélodique à l'époque: couplets riffus
et agressifs avec une voix de troll, refrains aériens au chant
en provenance directe des cieux, on était en terrain (trop)
connu et les comparaisons étaient inévitables: "Soilwork
et In Flames ne sont pas loin, blablabla...". Deux ans plus tard, le
groupe était de retour avec un opus qui m'a assis par terre: le
renversant Pitch Black Progress. Plus extrême dans ses parties
extrêmes, plus mélodique dans ses parties
mélodiques, les comparaisons étaient déjà
moindres. D'une parce que les groupes référentiels dans
le genre avaient sorti dans le même temps des albums sans grand
intérêt (Dark Tranquillity avec Character) ou assez
controversés, flirtant avec le metalcore, la branche vulgaire du
melodeath dont la frontière est si infime qu'elle peut
être franchie par mégarde (Soilwork avec Stabbing the
Drama, In Flames avec Come Clarity), de deux parce que Pitch Black
Progress était un putain d'album, avec des titres de folie et
des hymnes de tous les côtés. Le groupe était en
train d'acquérir une personnalité et surtout, venait sans
doute de livrer l'album le plus paroxysmique du genre : difficile
d'assurer une telle cohérence musicale en pratiquant pareil
jusqu'au-boutisme extrême et mélodique, même si
passer d'une humeur à l'autre a pu en déconcerter
certains.
Avec Holographic Universe, son premier album conceptuel, le groupe a
choisi d'accentuer son côté mélodique. Une
évolution logique finalement : un premier album assez direct et
agressif, un deuxième où l'alternance agressivité
/ mélodies se faisait encore plus nette et un troisième
où les mélodies ressortent davantage. Les parties
agressives restent bien sûr de la partie avec une fois de plus
des riffs qui marquent les esprits, n'empêche qu'une fois l'album
terminé, ce que l'on retient le plus, ce sont ces refrains
chantés en voix claire (remarquable performance de Christian
Ävelstam au passage, redoutable de versatilité), ces solos
racés dégoulinant de mélodies qui se taillent la
part du lion sur cet album, s'insérant au sein des couplets ou
venant ponctuer un riff, et ces claviers prédominants qui
confèrent une saveur éthérée à
l'ensemble de cette galette.
Holographic Universe se montre du coup moins percutant (c'est son
défaut) mais aussi plus homogène que son superbe
prédécesseur. Pas de caresse dans le sens inverse du
poil, ici, les breaks coulent de source, les chansons
s'enchaînent sans accroc, l'ensemble est d'une fluidité
exemplaire... et le groupe y gagne encore en personnalité.
Peut-on encore parler de "death metal mélodique" ici ? Selon
moi, le groupe évolue plus dans le registre du metal
mélodique tout court. Si je devais le comparer à un autre
groupe, ce serait sûrement Arch Enemy: une musique
mélodique avec une voix d'écorché vif, sauf que
Christian Ävelstam propose un registre vocal bien plus
varié que la beugleuse saoulante Angela Gossow et que l'ensemble
est bien moins inégal que ce que propose le groupe des
frères Amott. Pas vraiment de titre en dessous des autres sur
Holographic Universe (ainsi que sur les deux précédents
opus), tout est solide et cohérent du début à la
fin.
Certes, on ne nie pas que le groupe arrive avec cet album au bon
moment. En regard de la scène dont il est censé faire
partie et qui se casse furieusement la figure à défaut
d'une vraie concurrence, le groupe a tout le champ libre pour s'imposer
sur un territoire qui reste à reconquérir. Mais il est
incontestable que l'argument le plus valable pour vanter les
mérites de cet opus reste la qualité de son contenu.
Site : http://www.myspace.com/scarsymmetry
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