Si Alchera, le premier effort des Australiens, peinait malgré sa splendeur à dissimuler ne serait-ce qu'un peu le fait que les musiciens étaient des héritiers directs de Godflesh et de Mogwai, il n'est est rien sur « Fowl ». Heirs a grandi, a beaucoup affiné son écriture, et la singularité qui faisait défaut à son prédécesseur est aujourd'hui plus que jamais présente.
Toujours le même lègue des tous grands, certes, mais le quatuor sert ici un exquis panachage d'indus et de post-rock, tout ça de la manière la plus hypnotisante possible. Et le mélange est cette fois-ci un véritable mélange, et non plus deux styles qui jouent au chat et à la souris. Une alliance onctueuse, qui fait s'interpénétrer le grisâtre de sons crunchy, secs, répétitifs, lancinants et le délicat d'un post-rock auquel on ne peut plus seulement estampiller la simplette étiquette de « joli », mais qui fait se fixer les yeux et qui obsède foncièrement. Pour illustrer le niveau de maîtrise atteint par Heirs, quoi de mieux que l'incroyable « Fowl » et ses folles expérimentions noisy ? Peut-être « Burrow », fantastiquement arrangé et plus efficace qu'un gros demi-litre de cocktail de champi hallucinogènes pour partir en trip ? On s'y perd dans un énorme tourbillon, des averses de psychédélisme nous attirant en son cœur. Assurément un de leurs meilleurs titres. Les Anglais ont une expression, dans leur richissime langue, qui va ainsi : « It grows on you ».
Autrement dit, ce n'est qu'après de multiples écoutes que Fowl dévoile toute sa richesse, à la fois harmonieuse et poignante. Heirs prend donc son envol avec un album sombre et hypnotique, qui demande un peu de temps, mais qui devient vite très méchamment addictif.
Site : http://www.myspace.com/heirsmusic
Gilles Der Kaiser