Retrouvez toutes les photos de Benighted en live à Lille, le 2 novembre 2007, là :
Salut les mecs, contents de vous avoir en interview, d’autant que votre album est vraiment très bon…
Olivier (guitare) : Ben écoute, merci, c’est un plaisir…
Julien (chant) : Vous
m’excuserez si je ne réponds pas beaucoup mais
j’essaie de préserver un peu ma voix qui a souffert un peu
ces jours derniers. Je répondrai quand Olivier ne saura pas quoi
dire (rires) !
On aimerait bien revenir un peu sur
l’album d’avant, Identisick, pour lequel les
réactions furent très bonnes. Quel retour avez-vous eu ?
Olivier : On en est toujours
très contents de cet album, que ce soit dans le son ou dans le
style qu’on pratique aujourd’hui. On n’a pas fait
véritablement de tournée à cause de nos boulots,
plutôt des week-ends entiers, des dates
éparpillées, et ça s’est super bien
passé. C’était bien la foire en concert ; ça
nous a bien surpris…
Julien : Cet album nous a
ouvert pas mal de portes, notre nom s’est mis à vraiment
circuler, à l’étranger aussi. On aime toujours
jouer ces morceaux en concert, ils sont très efficaces et si on
pouvait tous les jouer, on le ferait ! On espère encore prendre
plus d’ampleur avec le nouvel album, notamment grâce
à la meilleure distribution qu’on va avoir, là.
L’international est vraiment un but maintenant ?
Olivier : Oui, car nous
n’avons pas eu une grosse distribution à
l’étranger avec Adipocere. On a donc bien poussé le
boulot sur cet album, au niveau des compos et du son, et avec le
soutien d’Osmose Productions, qui a une grosse assise
internationale, on espère que cet album va encore nous ouvrir
des portes.
Vous pensez que votre style de musique est plus vendeur chez nous ou à l’étranger ?
Olivier : Peut-être plus
pour l’étranger mais en France, ça prend de
l’ampleur. Dès que tu vas aux USA ou en Allemagne, les
marchés sont énormes et la culture est plus rock. En
France, pour entendre du Métal à la radio ou à la
télé, il faut se lever tôt.
Julien : Nous sommes
déjà allés plusieurs fois en Allemagne et quand tu
vas dans les magasins de disques, ce ne sont pas du tout les
mêmes produits qui sont mis en avant. Ceci dit, même si je
pense qu’on a un potentiel intéressant à
l’étranger, on a quand même la chance de ne pas
vendre trop mal en France déjà… Maintenant, je
pense qu’on est assez costauds en France pour passer à
autre chose à l’étranger.
Parlons d’Icon, le nouvel album.
Nous pensons ici que vous avez plus aéré la musique par
rapport à avant.
Olivier : Oui, il y a plus de
variation, car on a digéré certaines influences. On a
réussi à inclure des pauses, tout en renforçant le
côté grind de nos titres. On a inclus des influences
« doom » entre guillemets pour Benighted, ce qui veut dire
que ce n’est pas très lent en fait (rires). Il y a
des passages un peu plus spéciaux pour nous.
Julien : Identisick
était très compact en fait, et on s’est permis
quelques expérimentations au sein même des morceaux, alors
qu’avant, ce n’était pas le cas. Il y a des moments
très brutaux, d’autres plus cool, mais c’est pour
mieux repartir ensuite. C’est ce qui rend cet album
peut-être plus accessible, plus « easy-listening
»…
Olivier : Ouais, enfin, on n’est pas easy-listening non plus
(rires) ! Chaque morceau a son identité sur Icon, alors que je
pense qu’on sentait moins ça sur Identisick.
Ça a été un constat ou c’est venu naturellement en composant ?
Julien : Non, ça a
été naturel. Avant, quand on composait en
répète, parfois, on se disait « oh la la,
ça, on ne le garde pas, ça ne correspond pas à
notre style… » ! Là, on s’est dit qu’on
s’en foutait et qu’on tentait plus de trucs…
Ça me fait un peu penser
à ce que les mecs de Nile nous ont dit en interview, que les
passages lourds renforçaient l’intensité des
accélérations et des reprises brutales…
Olivier : Oui, c’est
ça. Ça se ressent bien en tout cas en live. Ceci dit, on
a toujours aimé faire ça, mettre des variations dans la
musique. Du blast continu pendant 30 minutes, ça ne nous
intéresse pas en fait…
Et l’épreuve de la scène pour les nouveaux morceaux, ça se passe comment ?
Olivier : C’est impeccable, je dirais...
Avec votre style, il faut cependant que le son soit parfait en live, sinon, ça craint…
Olivier : Oui,
carrément. Notre musique comporte des parties qui changent
très vite et avec un bon son, ça a plus d’impact.
Les morceaux sont taillés pour la scène et on s’est
lancé un petit pari sur cette tournée en jouant plus de
titres neufs en live, alors que peu de personnes ont déjà
l’album. Et franchement, ça fonctionne bien et les gens
s’éclatent avec nous.
Justement, quand vous êtes sur
scène et que vous voyez toute cette énergie dans le pit,
ça vous fait quoi ?
Olivier : C’est le pied
et on en veut encore plus ! Les douleurs que tu peux ressentir à
la nuque ou des trucs comme ça, tu oublies tout en live quand
ça bouge bien devant. T’envoies encore plus la
purée.
Julien : C’est notre
état d’esprit aussi… On aime bien quand les gens
participent et montent sur scène avec nous, pour se marrer.
Revenons un peu à l’album. Pourquoi êtes-vous retournés en Allemagne pour l’enregistrer ?
Olivier : Parce qu’on
s’y sent bien (rires) ! On était contents du son
d’Identisick, et à force d’aller enregistrer
là-bas, on est devenus potes avec les gars du studio ; on
retrouve là-bas l’esprit qu’on a en
répète. On voulait changer quelques détails du son
au niveau de la batterie et des guitares. On voulait quelque chose de
beaucoup plus vivant, moins synthétique et ils ont
répondu à notre attente. Le son fait un peu moins «
triggs », c’est un peu plus sale, plus proche du live
plutôt. A part les grosses caisses, toute la batterie a
été enregistrée de manière naturelle. On a
mis aussi plus de distorsion sur la basse. Pour les voix, on a aussi
testé pas mal de micros, pour avoir le son qu‘on voulait.
Parlons un peu des paroles. Dans le
style extrême, ce sont toujours les mêmes thèmes qui
reviennent. Or, chez vous, il y a une vraie recherche textuelle sur les
maladies mentales…
Julien : Oui, bon, le
thème des maladies mentales n’est pas si original que
ça, et je n’ai aucun mérite, puisque je bosse en
HP… J’ai la chance de savoir exactement de quoi parlent
les maladies, quels sont les symptômes. J’essaie donc
d’écrire des textes qui collent vraiment à la
maladie et qui permettent, quand on les lit, de ressentir ce que les
malades vivent. Mais c’est vrai que sur cet album, j’ai
innové puisque ça ne parle que d’une seule et
même personne bien que ce ne soit pas un concept album. Les
titres expliquent un peu dans le désordre les traumatismes
qu’il a vécus, pourquoi à tel moment, il a
basculé, les symptômes qu’il a
développés. On ressent comment il perçoit
l’autre et comment, petit à petit, il
s’auto-détruit en s’enfermant dans son monde
délirant. Cette histoire m’a bien plu car j’avais
évidemment beaucoup de matière de par mon boulot et
j’ai essayé d’articuler tout ça pour avoir un
truc cohérent et dans lequel il est facile de
s’identifier. Finalement, je suis peut-être moi-même
malade (rires) !
Mais du coup, tu ne déconnectes jamais de tout ça…
Julien : Si parce que le
boulot, c’est beaucoup de stress accumulé, et le groupe,
c’est beaucoup de stress évacué…
Mais quel est le rapport avec une icône (Icon en anglais) justement ?
Julien : De même
façon que le thème, le thème de
l’icône a été utilisé,
usé… Là, en fait, c’est un sigle, la
perception psychotique que la personne a du monde extérieur qui
l’entoure, la conscience infinie du vide qu’on a autour de
soi. C’est ce qui est angoissant et qui nous pousse à
aménager des trucs délirants pour se protéger.
Alors, les thèmes sont assez
fouillés mais sont perdus dans les « gruicks –
gruicks », quand même (rires)…
Julien : Les textes bien
écrits sont là pour crédibiliser le groupe. Mais
je suis conscient que 90 % des gens n’en ont rien à foutre
des paroles, s’intéressent à la musique et aux
« gruicks – gruicks ».
Olivier : Même moi, je
ne m’intéresse que très peu aux paroles de groupes
que j’écoute mais pour Benighted, on s’est toujours
dit qu’on se devait d’avoir des lyrics
irréprochables parce que ça nous paraissant important. Je
veux que ça tienne la route.
C’est pas pour vous graisser la
patte, mais en écoutant l’album dans la bagnole tout
à l’heure, on se disait que vous étiez certainement
le groupe de death grind le plus efficace en France… Et en
parlant de crédibilité, que pensez-vous de tous ces
groupes de grind débilos français qui pullulent un peu
partout ?
Olivier : Ouais, du pipi-caca, quoi…
Ici, on a quand même un
archétype, c’est Gronibard. J’adore leur musique, ce
sont des potes mais leurs textes sont vraiment à gerber.
Les Ultra Vomit et compagnie… Ca me gonfle !!!
Olivier : Tiens, UltraVomit,
j’adore, c’est un de mes groupes
préférés… Après, chacun son trip.
Ultra Vomit, c’est un vrai spectacle en live…
Après, on parle des pionniers du genre, là. Tous ceux qui
se sont engouffrés là-dedans, avec la facilité qui
est la leur, c’est vrai que j’aime beaucoup moins.
C’est pitché à mort, avec des textes nuls,
j’aime pas ça.
Julien : Oui et puis, quand ce ne tient pas la route, ça ne dure jamais très longtemps…
Olivier : Maintenant, si
c’est l’image qu’on donne du grind français
à l’étranger, ça craint…
Heureusement, des groupes comme Sublime Cadaveric Decomposition ou
Inhumate parviennent à s’exporter.
Justement, on se demandait tout
à l’heure comment faisaient les groupes de grind pour
aller faire des tournées dans les pays de l’Est aussi
souvent…Comment vous faites pour rentrer dans vos frais ?
Olivier : Ben
déjà, on ne rentre pas toujours dans nos sous. Et ce
milieu grind qui tourne beaucoup, c’est un peu comme le punk :
c’est un milieu « squats » et compagnie. Faut
vraiment être à fond dedans pour faire ça, avoir
cette mentalité. Y a un échange international de groupes
qui tournent tout le temps. C’est pas comme ça dans le
brutal death…
Julien : Ca dépend
aussi des boulots. Moi, je sais que je ne peux pas me barrer quand je
veux comme ça, en Europe de l’Est, pendant 15 jours. Ces
groupes-là sont constitués de mecs qui n’ont pas de
boulot fixe, je pense. Comment on peut en vivre ?
Olivier : Après, faut
devenir intermittent du spectacle et ne pas faire que ça. Faut
faire du studio, des plans roadie, des trucs à
côté…
Revenons à
l’album… Il y a de nouveaux des guests… Le chanteur
de Disbelief, par exemple. Il habitait à côté du
studio, ou quoi ?
Olivier : (rires). Oui, mais le pire, c’est qu’on l’a découvert après !
Julien : C’est vrai que
quand on a composé le morceau « Human Circles », on
s’est dit que ce serait bien qu’il y ait un invité
dessus, pour lui donner une dimension supplémentaire. Dans ce
titre, il y a des parties questions/réponses qui se
prêtent bien à ce jeu-là. Il fallait qu’on
trouve donc un chanteur qui ait une voix bien différente de la
mienne, et avec une voix bien tordue à la Obituary.
J’adore Disbelief et je trouve que la voix de Karsten Jäger
est tout simplement énorme. C’est comme ça
qu’on est venus à le contacter. C’est là
qu’il nous répond : « hé, j’habite
à 40 bornes du studio, y a pas de problème,
j’arrive ! « (rires) ! Ce à quoi je lui ai
répondu que ça nous arrangeait assez bien ! C’est
un mec adorable, il nous a plié ça en moins d’une
heure. Enorme… On a d’ailleurs bien rigolé en
studio la première fois qu’il a poussé dans les
enceintes ! Oh, l’enculé… Oh, l’enculé
!!! (rires) !
Et puis, y a quand même cet
invité qui rappe sur le 3ème morceau, « Grind Witt
»… Des poils vont se dresser là !
Julien : Oh, et bien, ça a déjà commencé (rires) ! Et puis, bon, ça dure 5 secondes !
Olivier : Oui, et puis, on a
toujours ajouté des sons, des samples sur nos albums, comme des
passages folk, le début de Carmina Burana, du violon, un remix
techno, un passage samba, c’est juste des petits délires.
On ne s’est pas trop posé de questions et on s’est
fait plaisir, d’autant que j’aime bien le rap, surtout le
rap américain…
Julien : La première
fois qu’il m’a fait écouter ça, j’ai
dit que ce n’était pas possible (rires) !
L’idée vient vraiment de Liem, l’autre guitariste.
Et pas de danger que je fasse ça sur scène (rires) !
Une dernière question : comment vous voyez le business de la musique actuellement ?
Julien : Oh là !
C’est chaud comme question, ça ! Le support CD se casse
bien la gueule. Le problème est pour les petites structures.
Nous, le téléchargement, ça ne change pas grand
chose puisque de toute façon, nous ne vivons pas de notre
musique. Par contre, pour le label, ça fait plus chier.
Olivier : Alors, c’est
vrai que ça nous fait de la pub, mais ça pénalise
les labels. On n’a quasiment pas été
distribué à l’étranger, mais on nous
connaît de partout, de Nouvelle-Zélande, du Viet-Nam, des
Philippines, du Mexique…!
Avec Osmose, ça va aller là pour l’étranger…
Olivier : Oh oui, pas de
problème ! On les a choisis car ils sont les premiers qui nous
ont contactés, et ce qu’ils nous ont proposé nous
convenait, donc voilà, ça a été vite. .
Julien : J’aimerais
ajouter quand même, en ces temps troublés pour eux,
qu’Adipocere a été un bon label pour nous. On leur
doit tout le début de notre carrière et on les soutient
dans leurs déboires. Ils avaient des moyens réduits,
c’est pour ça qu’on a du aller ailleurs au bout
d’un moment. Mais on leur dit un grand merci pour ce qu’ils
ont fait pour nous.
Et bien, merci à vous et bon
concert !!! Vous ne partez pas, on fait d’abord une photo avec le
Metal Observer d'octobre 2007 !
Merci à vous pour l’interview et le support, bien cool !
Site : http://www.staybrutal.com