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Dans la plus pure tradition française, Dornfall déboule et chamboule tout avec son heavy prog’, chanté en français, et parfaitement exécuté. Introspectif, mélodique, parfois nerveux, le deuxième album, Précieux Secret, mérite que l'on s'y attarde. Rencontre...

Interview à paraître également  dans le Metal Observer FNAC n°17 de Mars 2008

 Entretien avec Christopher (basse), par Geoffrey
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On peut revenir sur l'histoire du groupe, la formation ?
En 2001, moi, j’ai rencontré Flo, suite à une annonce, dans un magazine spécialisé. On s'est vu et humainement, ça a bien collé. On a commencé à bosser tranquillement sur des maquettes, on a cherché d'autres musiciens, on a vite trouvé un guitariste, un chanteur, le batteur c'était le plus dur. Il faut savoir que c’est une des pièces maîtresse du groupe. C'est donc Florian qui est arrivé, 8 mois après la formation du groupe. On a décidé de changer le nom en Dornfall. On a fait quelques petits concerts, la formation s'est stabilisée. Deux ans après, il y a eu pas mal de changements, arrivée de Steph au chant,  deux semaines avant l’enregistrement du premier album et le guitariste Frédéric Charpentier est arrivé au même moment.

Dès le départ, lors de la formation du groupe, vous aviez une idée précise du style ?
Ca a beaucoup changé. Moi et Flo, au début, on était plutôt dans une période très métal prog un peu à la Symphony X avec les trucs orchestraux qui partent dans tous les sens. Et au fur et à mesure, on a joué la démocratie : Flo, le guitariste, était branché neo, Deftones, Incubus,  Frédéric plutôt branché sur les choses modernes. Donc, ça a beaucoup changé depuis le début du groupe, mais je dirais que c'est complètement volontaire.

Tu définirais comment le style maintenant, heavy prog, ça vous convient ?
J'ai envie de dire que c'est plutôt prog mais heavy non ; plutôt du rock métal prog, on essaye d'enlever le coté heavy de notre musique maintenant.

Ce nouveau disque n'est pas le premier, quels sont les retours de celui d'avant ?
Honnêtement assez mitigé, ce qui me paraît normal avec le recul, dans la mesure où c'était plus une maquette améliorée qu'un vrai album. Déjà, il était court, il durait dans les 40 minutes. Le son n'était pas à la hauteur, les compos étaient jeunes, c'était un peu à l'arrache, étant donné que Steph et Frédéric ne sont arrivés que  deux semaines avant. Si je donnais une note globale, ce serait 6/10. Ce n’est pas un disque que je renie mais c'est clair qu'avec le recul, on ne peut pas dire qu'il ait spécialement bien vieilli. On ne joue plus du tout de morceaux de cet album sur scène car le style a vachement évolué. La formation qui a composé le premier album n'est pas la formation qui l'a enregistré. C'est particulier.

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Et comment s'est passée la compo pour le nouvel album ?
Pareil, de manière démocratique : chacun a apporté ses idées, on a beaucoup travaillé en binôme, on apportait des morceaux plus ou moins finis qu'on arrangeait en studio  puis Steph ajoutait ses textes. C'était très constructif et c'était intéressant de mélanger toutes les influences qu'on peut avoir. Je te dis, moi, je suis branché progressif, Flo c'est plus Queen, Led Zep, et tout ça. Flo et le guitariste de l'époque, lui plus axé neo-métal, ça donnait vraiment une espèce de mélange qu'on retrouve sur l'album.

On peut le considérer comme une vraie naissance, un vrai départ pour le groupe ?
Oui, en tant que groupe, c'est le vrai départ, le line up mis à part au vu du départ de Fred juste après la parution de l'album. On a un peu lutté pour trouver un vrai remplaçant, on a eu deux intérimaires. Cette fois, on a Sam Smith, qui est notre guitariste attitré et j'espère définitif, qui apporte plus de folie et d'énergie rock n’ roll. Tu ne sais jamais trop ce qu'il va jouer mais tu sais toujours que ce sera plein de fraîcheur. C'est différent de Fred mais il apporte vraiment une dynamique au groupe.

C'est si difficile que ça en France de trouver des musiciens ou c'est vous qui êtes exigeants ?
Un peu des deux, je pense. C'est sûr que si tu passes une annonce, tu vas avoir 30 ou 40 réponses surtout si c'est pour des concerts et un album mais je pense qu'ils ne se rendent pas compte de l'implication au-delà de la musique. Déjà, le coté humain et le côté extra musical, interviews, démarches, c'est parfois un peu contraignant. On essaye de se partager les taches, quand tu rentres dans un groupe comme ça, ce n’est pas toujours évident de se fondre dans la formation. Nous, maintenant, ça fait trois quatre ans qu'on est ensemble, ça s'est passé avec des gars avec qui, musicalement, ça se passait bien mais qui ne s'intégraient pas, alors que là, il a tout de suite proposé des trucs, il s'occupe du Myspace, il s'est investi.

Les retours pour l'instant sont très bons. Est-ce que ça ouvre des perspectives pour le groupe ?
Oui, carrément, je pense que ça va nous ouvrir des portes, des premières parties intéressantes, on a franchi quelques pas.

Même une chronique dans la presse people...
Oui, d'un côté, je trouve ça bien. On a une musique pas du tout représentée dans les grands médias. Si c’est pour dire : «attention, il ne faut pas que vos enfants écoutent ça, ils vont se suicider », ce n’est pas la peine… C'est intéressant qu'un magasine aussi lu écrive même 5 lignes positives sur ce style.

Surtout que c'est une musique qui nécessite plusieurs écoutes pour s'imprégner, une écoute n'est pas suffisante pour vraiment apprécier le groupe. C'est propre au progressif métal.
Je pense que c'est un peu vrai, et c'est voulu et un peu logique au vu du nombre d'influences du groupe qui ne sont pas faciles d'accès à la base. Moi, par exemple, je suis très fan de groupes comme Tool, Porcupine Tree. Mais en scène plus rock que métal, je ne suis plus trop fan de symphonique. C'est assez compliqué de rentrer dedans tout de suite, à moins d'être prédisposé à écouter Dornfall.

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Il y a  un autre choix important dans le groupe, ce sont les textes en français.
Oui, ça, c'est un choix qu'on assume tous complètement. C'est vrai qu'au début, moi, je n'étais pas forcément pour, je me disais que l’on n’était pas un groupe de heavy des années 80, mais quand Steph est arrivé, il a commencé à écrire en français, et au vu de la qualité des textes et de la mélodie, ça a suffi pour me convaincre.

C'est très exigeant pour les textes, du coup, chez nous, parce qu'il y a beaucoup de groupes qui tombent dans le ridicule avec leurs textes.
C'est clair, c'est un truc qu'il faut éviter, c'est sûr que c'est doublement difficile : on essaye d'avoir l'accroche mélodique anglo-saxonne. Faire en sorte que les morceaux restent aussi profonds mais plus d'accroche au niveau de l'oreille du premier coup. C'est plus un travail mélodique. En français, on doit en plus avoir une certaine culture de texte. Quand tu vois les Beatles, les mélodies sont merveilleuses mais pas les textes. C'est beaucoup d'exigence mais on arrive déjà à avoir un résultat assez original ; on espère avoir une petite place à prendre là-dedans.

Vu la qualité musicale, tu n’as pas peur que ça vous ferme des portes à l'international,  les textes en français ?
Au début, je me suis dis que ce n’était même pas la peine de viser l'international. C'est clair qu'on cherche déjà à grandir en France, ne serait-ce que pour des moyens techniques. Ce qui est marrant, c'est sur Myspace : il y a au moins la moitié des gens qui nous écrivent qui sont américains. Il y a un petit côté exotique qui peut leur plaire aussi. C'est un peu ce que je reproche : il n’a plus beaucoup de gens qui osent faire quoi que ce soit qui sorte un peu de d'habitude, il y a une espèce de formatage.

La scène française, tu  la vois comment ? Est-ce que vous vous sentez proches de certains groupes ?
Oui, quand même au niveau de l'approche, même si ce n'est pas vrai au niveau stylistique. On est assez potes avec les Old Dead Tree par exemple. Je n'ai pas une culture immense en groupes français, mais c'est de ce genre de groupe dont on se rapproche dans l'idée et dans la démarche.

Mais ça ne t'émoustille pas plus que ça ?
Pour être complètement honnête, je suis assez élitiste dans ce que j'écoute : ce sont des groupes genre Tool ou Opeth qui me touchent. Dans la scène française, le dernier The Old Dead Tree est vraiment bien.

Tu penses qu'on est en retard par rapport aux autres pays ?
Musicalement, je ne pense pas, il y a vraiment de superbes musiciens mais dans le côté structurel, je pense oui. Et y a toujours le fait que les portes se ferment tout de suite dès que tu parles de Métal. Une asso qui va faire 200 concerts de métal aura moins de subventions qu'une asso de 80 concerts d'un autre style. Pour revenir sur le rock allemand, sur Tokio Hotel, je ne suis pas fan de ce qu'ils font mais le seul avantage que je vois, c'est que les jeunes entendent des guitares électriques, de la batterie, de la basse, des vrais instruments, et tout ça.  S’ils restent sur du saturé, c'est toujours ça de gagné.

Il y a des choses de prévues pour le groupe prochainement ?
On démarche pas mal au niveau concerts, on commence à travailler sur le troisième album, on va commencer à l'enregistrer à la fin de l'été ; en attendant, on va essayer de faire le plus de concerts possibles. On a vraiment envie maintenant qu'on a trouvé le guitariste, car on a perdu beaucoup de temps avec ça, maintenant il n’y a plus de soucis…

Tu disais peut-être enregistrer à partir de l'été prochain ; quand il sortira, la situation du disque aura encore empiré. Toi, comment tu vois l’avenir du disque ?
C'est super compliqué, parce que si je vais à la FNAC, il y a plein de disques que je ne trouve pas. Sur le net, même payant, tu ne trouves pas tout, mais tu trouves plus. Je pense qu'avec les lois qui vont passer au niveau du téléchargement légal, ça va peut-être calmer les gens, je ne me rends pas trop compte, par exemple, des grosses ventes d'album, ce que c'est maintenant…


Dornfall - Précieux Secret
Underclass Records / Chrysopée

Site : www.myspace.com/dornfall