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Vous pensiez peut-être que les mecs de Slayer étaient en stand-by. Tranquillement assis autour d'une piscine, en train de siroter un p’tit cocktail. C'était vrai l'année dernière. Épuisé à cause des tournées incessantes, le groupe s'est reposé pendant un an, pour revenir en force cette année. Le Unholy Alliance III démarre en novembre (le Zénith de Paris sera pris d'assaut le 11 novembre 2008) et gageons que le groupe va encore faire honneur à sa réputation de machine de guerre scénique. En plus, Tom nous a révélé que le groupe planche actuellement sur de nouvelles compos et qu'un nouvel album risque de sortir l'été prochain. Déjà que l'hiver est généralement une période pénible, mais là, l'attente risque d'être encore plus longue ! On a assez tourné autour du pot, place à un entretien prestigieux, relax et honnête, avec l'une des figures les plus charismatiques du thrash : Tom Araya.

Interview à paraître également dans le METAL OBS' n°24 de Nov. 2008

 Entretien avec Tom Araya (basse, vocaux), réalisé le 17 octobre 2008 - Par Yath
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Salut Tom ! On est content de t'avoir pour le Metal Obs', je te remercie au nom de toute l'équipe !
Tom : Super, merci à vous tous, les gars !

Le Unholy Alliance III va bientôt démarrer, et les deux premières éditions ont apparemment eu un joli succès.
Ouais, c'est très cool...

Vous allez tourner avec de super groupes cette fois encore : il y a Mastodon, Trivium et Amon Amarth pour l'Europe, vous les choisissez vous-mêmes ?
En fait, les promoteurs font une liste, avec pas mal de groupes, en insistant sur ceux qu'ils considèrent être les meilleurs choix. Ensuite, on écoute et on donne notre accord. Mais tu sais, on fait confiance aux promoteurs et aux managements, même si au final, on décide de dire oui ou non à tel ou tel groupe nous-mêmes.

Vous avez choisi de bons groupe là, jeunes et très forts sur scène. Ou trouvez-vous encore l'énergie, après 25 ans de tournées, pour remonter sur scène derrière eux et leur botter les fesses ?
(rires) C'est juste parce qu'on a pris une année pour nous reposer (rires) ! Voilà la source de notre énergie ! (rires)

C'est clair que les jeunes groupes qui n'arrêtent pas de tourner ne peuvent rien contre ça ! C'est le privilège des anciens (rires).
(rires) Ouais, c'est exact ! On a la possibilité de nous arrêter parfois pour reprendre des forces.

Vous avez tourné à peu près partout dans le monde, quel est le pays le plus bizarre ou exotique dans lequel vous avez joué ?
Hummm, je dirais l'Egypte. On n'a pas vraiment joué en live, on a enregistré une vidéo. À mon avis, c'était vraiment notre destination la plus étrange. On n’entend pas souvent parler d'un groupe de metal qui joue dans ces pays-là...

Je voulais t'en parler justement, parce que Slayer est vraiment un des groupes les plus populaires dans les pays arabes. J'y suis souvent allé et j'ai rencontré des fans incroyablement tarés ! Même dans des pays comme l'Arabie Saoudite ! Si vous donnez un concert là-bas, je peux t'assurer qu'il y aura des émeutes !
Je le sais ça, je suis au courant de notre fan-base dans ces pays, et je suis d'accord avec toi, ils ont l'air d'être vraiment tarés (rires) !!!!

Slayer

Vous avez récemment joué en Amérique Latine, où le public à la réputation d'être très chaud aussi...
Exact, on a joué pour la première fois en Colombie, au Venezuela récemment et les gens étaient vraiment fous ! C'était des super dates... L'Amérique Latine commence à devenir un marché très important pour le metal maintenant...

Parlons un peu de vos set-lists. Vous avez tellement de classiques que vous devez avoir du mal à choisir chaque soir. Et en plus, vous devez vous sentir prisonniers de ces titres mythiques que tout le monde veut vous voir interpréter...
Ouais, tu sais, il y a des chansons qu'on doit jouer. Ce n'est pas qu'on PEUT les jouer, c'est qu'on DOIT les jouer. Tous les soirs. C'est comme ça et on l'accepte. Après, il y a une liste de chansons que nous aimons jouer et d'autres que le public aimerait également voir sur scène. Donc, on doit faire le tri. Et choisir avec attention nos set-lists. Et ces chansons qu'on doit jouer, on les joue avec plaisir, ne te fais pas de souci pour ça. Si ça ne nous amuse plus, on arrêtera. Mais on adore les jouer, c'est tout (rires) !

Ouais, donc autant que les fans, vous aimez rejouer ces vieux classiques...
Tout à fait. On aime les interpréter sur scène simplement parce qu'il s’agit avant tout d'excellentes chansons...

Et puis la réponse de la foule à chaque fois que vous jouez South Of Heaven, par exemple, doit être si énorme que vous en tirez un énorme plaisir...
C'est clair, c'est un sacré plaisir pour nous ! Surtout quand les fans attendent ça depuis un moment et qu'ils explosent au début du morceau, c'est tellement énorme !

Donc on va encore avoir droit à ces classiques pour le Unholy Alliance III.
Oui, mais pas seulement. On va bien évidemment jouer des titres mythiques, mais on a essayé de regarder un peu notre catalogue pour choisir des vieilles compos qu'on n'a pas jouées depuis un moment. On va ressortir des titres qu'on n'a pas interprétés sur scène depuis plus de 20 ans... On a répété quelques trucs comme ça que vous allez redécouvrir sur scène...

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Revenons un peu à l'année dernière, qui était quand même spéciale pour Slayer, avec votre 25ème anniversaire et ce Grammy Award. Ça ne vous donne pas envie de relâcher un peu et de vous dire, « c'est bon, on a assez donné, là ! » ?
Non, ce n'est pas vraiment ce qui s'est passé, même si on sort là d'une longue période de repos. On n'a pas arrêté de tourner depuis quelques années. C'était très éprouvant, on ne s'arrêtait plus ! Et là, c'était la première fois qu'on a pris un break pour de vrai. C'est-à-dire que c'est la première fois qu'on n’a RIEN FAIT. Littéralement. On ne s'est pas vus, on n'a pas parlé business. On est chacun rentré à la maison pour se reposer. D'habitude, on rentre à la maison, mais on continue de nous occuper de tel ou tel truc pour le groupe, alors que là, on vraiment pris une année sabbatique !

Et là, vous êtes de retour en force !
On est de retour, on va faire cette grosse tournée, ensuite on va finir de travailler sur le nouvel album. On a déjà commencé à bosser dessus. Normalement, on va le finir le printemps prochain pour pouvoir le sortir l'été 2009. Donc on retourne au charbon, là et on va de nouveau être très occupés !

Voilà une bonne nouvelle ! Et cette année d'anniversaire vous a peut-être donné l'occasion de regarder un peu en arrière. Te rappelles-tu des débuts du groupe ? Quelle était l'idée derrière Slayer, quelle était votre ambition ?
La seule ambition du groupe au départ, était d'être plus heavy et plus rapide que ce qu'il y avait sur cet album, le Metal Massacre (première édition d'une série de compil' sortie en 1982 par le mythique Brian Slagel, aujourd'hui boss de Metal Blade Records). C'est aussi simple que ça. On ne voulait pas  non plus ressembler à cette merde qui sortait de Hollywood. On n'en avait rien à faire de la popularité et tout ça. On voulait juste faire un album et tourner. Voilà les principaux objectifs de Slayer à sa formation.

Vous n'aviez pas imaginé que seriez là 25 ans après à jouer dans de si grosses salles...
Non, absolument pas. On vivait au jour le jour, tu sais. Même maintenant, on n'a pas changé, c'est le principe même du groupe. On avance tranquillement, sans avoir d'ambition particulière, en essayant de progresser à chaque pas. Quand Brian (Slagel, le même) nous a proposé d'enregistrer un single pour le Metal Massacre, on est rentré en Studio, et on l'a enregistré. À nos frais d'ailleurs. Ensuite, Brian a dit « enregistrez-moi un album entier, les gars! ». Alors, on a trouvé la thune et on fait l'album. Ensuite, il nous a dit qu'il montait une tournée. On a fait la tournée. On ne s'est pas posé de questions, on a eu une opportunité, on l’a saisie et on a avancé. On a toujours fonctionné comme ça. On ne s'est jamais posé pour décider « on va faire ceci ou cela pour durer 30 ans » ni pour définir les contours de tel ou tel prochain album. D'ailleurs, après cette première tournée, Brian nous a demandé un deuxième album. Ok, on a fait un deuxième album... Un peu plus tard, Rick Rubin (Def America) a voulu nous signer. On a dit OK, on a signé et on a enregistré un album avec Rubin. Ensuite, on a tourné, puis enregistré un nouvel album.

Vous aimez ce que vous faites, donc vous ne vous posez pas trop de questions tant que vous avez la possibilité d'enregistrer et de partir en tournée...
C'est ça, on prend la vie telle qu'elle est, on saisit les opportunités les unes après les autres et on essaye d'avancer. Et franchement, on a eu de la chance. On a toujours eu beaucoup de propositions, et on a juste eu à dire oui, OK, on est partants...

Et quels ont été les moments clé, ceux où tu as réalisé que le groupe était devenu mythique ?
Humm… Wow... Il n'y a pas vraiment eu de moment particulier. C'est assez récent cette histoire, tu sais. Peut-être à partir du moment où les gens ont commencé à parler de Reign In Blood comme étant un album culte. On a commencé à dire que si tu aimes le thrash, Reign In Blood est l'album que tu dois avoir dans ta collection. Et là, on a dit : « wooow »...

Slayer

Vous avez bâti votre carrière de manière très progressive et constante...
Voilà, ce n'était pas immédiat et c'était surtout très récent ! Dans les années 2000, pas avant. C'est là que les gens ont commencé à ressortir Reign In Blood et à le rendre « culte ». Et là, on s'est dit DAMN, on a vraiment une superbe et énorme fan-base...

Et voilà que plein de groupes copient ce que vous avez toujours fait et que vous continuez à faire !
Tu sais, on ne s'en vante pas. Vraiment, on ne l'a jamais fait exprès. De toute façon, on ne s'est rendu compte de l'impact de notre musique qu'à partir du moment où cette histoire avec Reign In Blood a commencé. C'était donc encore une fois très récent. On s'est juste dit, « putain, on dirait qu'on est un groupe assez important ! » (rires)

Connais-tu et apprécies-tu tous ces groupes justement qui s'inspirent de Slayer ?
Y en a qui ne sont pas mal, tu sais ! Y en a qui ont trouvé les petits filons, les tricks et les idées derrière les riffs. Et ce n'est pas mauvais. Certains sont bons bien qu’ils ne sonnent pas exactement comme Slayer. Certains sont bons, d'autres sont trop proches de Slayer (rires) !

Et puis aujourd'hui, avec un premier album, même s'il est pompé sur Slayer, certains arrivent à avoir un gros impact parce qu'ils se dotent d'un énorme son !
C'est clair, la qualité des premiers albums est excellente maintenant. En enregistrant à la maison, tu peux avoir un énorme son maintenant. Personne n'est vraiment dépendant des studios. En gros, c'est uniquement le talent qui fait la différence maintenant. Tu as juste besoin de beaucoup de talent pour te démarquer... Après, tu trouves juste un mec qui bidouille bien les programmes d'enregistrement et tu te fais un super son !

Et donc vous êtes encore des fans de thrash et vous êtes au courant des nouveautés du genre !
Oui, on écoute encore du thrash ! En tout cas, j'en écoute encore ! Il y a de bonnes choses qui sortent, des trucs plus ou moins bons... Mais bon, je reste plus attaché aux vieux groupes quand même. Il y a des nouveaux groupes qui arrivent avec de très bonnes choses, mais je n'ai pas encore été bluffé par qui que ce soit, tu vois... Il n'y a rien de super excitant aujourd'hui, je trouve...

Slayer

Pour finir, j'aimerais parler un peu des concepts et des paroles sur les albums de Slayer. Vous avez toujours créé des polémiques, notamment à cause de vos attaques contre les religions. Mais si on y regarde de plus près, vous ne critiquez pas la religion elle-même, mais les organisations religieuses...
Exactement. C'est plus le business et l'instrumentation de la religion, pas les croyances des gens...

En cette période d'élections aux USA, en  Europe, on a peur de voir l'importance que peut prendre la religion dans votre politique, ça vous effraie aussi ?
Non. Absolument pas. Pourquoi ça nous ferait peur ? Attention, on critique le «corporatisme » religieux, c'est tout. Les institutions de l'Eglise. L'Eglise rapporte de l'argent tu sais, en plus de faire peur aux gens. Le prétexte, c'est de gagner de l'argent pour aider les gens. Mais en fait, l'Eglise s'enrichit elle-même. Je ne sais pas comment ça se passe au Vatican, mais ici, c'est comme ça. C'est tout ce qui me dérange. L'Eglise prend l'argent pour aider les gens en théorie, et en théorie seulement. Mais c'est tout ce qui me dérange. Maintenant, qu'un candidat dise « God Bless America » (Dieu bénisse l'Amérique), je ne vois rien de mal à ça.

En Europe, on a peur de voir l'Eglise prendre le pouvoir au final, c'est probablement du à notre propre histoire avec ça...
En même temps, vous êtes très inquiets par rapport aux USA, mais personne ne se plaint des pays musulmans. Ils n'ont pas de séparation religion/Etat, c'est même la religion qui dirige le pays. Alors que les Européens aient peur du fait que l'Eglise s'invite dans la politique américaine... Je ne comprend pas. N'ayez pas peur des USA. Je sais qu'on a une mauvaise réputation un peu partout dans le monde, mais ce n'est pas justifié. Quelqu'un a besoin de « paterner » le monde. D'empêcher un peu les enfants de se battre (rires)! Il faut que le monde accepte ça et qu'on s'organise pour que quelqu'un prenne le contrôle à un moment donné. Et d'autres pays ou institutions vont surveiller ou organiser d'autres aspects du monde. Mais avoir peur des USA parce qu'un président dit « God Bless America »... La menace est plus grande ailleurs, tout le monde la connaît, mais personne ne veut en parler...(rires)

On va terminer sur une question plus triviale : vous allez partir en tournée dans quelques semaines (entretien réalisé le 17 octobre 2008), comment préparez-vous la tournée? Du sport ? Des répètes ?
On a beaucoup répété, pendant qu'on travaillait sur les nouvelles compos, et j'essaie aussi, c'est vrai, de faire pas mal de sport pour être en forme ! C'est un peu obligé, vu comme c'est fou et intense sur scène !

OK, merci beaucoup Tom ! Très heureux de t'avoir parlé !
Merci à toi, et on vous verra certainement en France dans quelques jours !!



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