ASIDEFROMADAY


On vous en parlait le mois dernier, le nouvel album des Bisontins de Asidefromaday, Manufactured Landscape, est une vraie réussite : un condensé de violence contrôlée sur fond d’ambiances lourdes et d’accalmies déchirantes. Sorte d’aboutissement pour cette formation, qui fêtera bientôt ses dix ans d’existence, et qui a su développer une identité propre durant ces années d’enseignement, aux travers d’une vie de groupe, de concerts et d’un travail d’écriture toujours plus minutieux et exigeant. Ils prouvent ainsi qu’avec beaucoup de volonté, et surtout de passion, on peut toujours arriver à se surpasser.

Interview à paraître également dans le METAL OBS' n°27 de Fév. 2009

 Entretien avec Fred (chant & claviers) - Par Gaet’
Rechercher : dans l'interview

Question courante, mais qui peut être intéressante pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas : peux-tu nous présenter le groupe ?
Asidefromaday est né en 2000 à Besançon, composé de Nico (guitare), Dess (Bass), Julien (Batterie) et moi (Chant, clavier). Une discographie comportant deux MCD, deux albums, un DVD live et plusieurs participations à diverses compiles. Je crois que nous en sommes à cent soixante-dix dates de concerts environ dans plusieurs pays d'Europe.

Petit bond en arrière : il y a trois ans vous sortiez votre premier album long format, "Divine Proportion", qui a reçu un très bon accueil de la part du public et des critiques spécialisées. Maintenant, avec un peu de recul,  arrives-tu à expliquer cet engouement ?
Disons que nous avons vraiment travaillé les compositions et l'enregistrement de "Divine Proportion". Nous sommes très lents dans le processus de composition car nous travaillons chaque détail avec un acharnement presque maladif. Mais je sais que cela ne suffit pas pour faire un bon album, savoir pourquoi nous avons eu de tels retours sur ce premier long format reste l'apanage de l'auditeur et non du compositeur, je dirais pour répondre à la question que la passion à fait cet album, peut être cela se ressent-il beaucoup plus que nous le pensions.

Et puis en 2007, vous avez sorti, via Dali Recordings, "Videography". Un DVD qui regroupe plusieurs concerts et des titres enregistrés dans divers festivals. D’où vous est venue l’idée, car ça n’est pas courant qu’un groupe de votre statut se prête à ce jeu du DVD live ?
L'idée vient du label qui a tourné, monté et produit ce DVD. Après nous avoir filmés lors d'un concert en Suisse, ils nous ont proposé de poursuivre cette démarche. Nous avions de notre côté plusieurs bandes vidéos disponibles et nous avons complété avec plusieurs autres tournages. C'était pour nous une nouvelle démarche, une nouvelle expérience et définitivement un objet bonus, suffisamment rare et intéressant pour qu’on investisse. Nous n'aurions jamais pu faire tout ça sans le travail énorme que les gars de Dali Rec ont fait pour ce projet.

ASIDEFROMADAY

Parlons du nouvel album, Manufactured Landscape. Si je ne m’abuse, le concept du « paysage artificiel » a bien été développé par le photographe Edward Burtynsky, montrant les empreintes laissées par l’Homme sur la nature ? En quoi cela vous affecte, au point d’en donner le nom à l’un de vos albums ?
Nous avons découvert que "Manufactured Landscape" était un titre utilisé par cet artiste vidéo après que nous l'ayons choisi. Il s'agit d'une coïncidence plutôt troublante d'ailleurs puisque l'un des thèmes de l'album est la pollution. Mais il ne s'agit pas de pollution industrielle au sens strict du terme mais plutôt d'une pollution de l'esprit et du coeur. Ceci tient son origine dans la facilité avec laquelle nous sommes capables de nous fourvoyer avec des chimères telles que la religion, la consommation à outrance, l'égocentrisme démesuré et la capacité à nous aveugler nous-mêmes dans cette vie qui, de par sa nature et son environnement, nous échappe constamment. Pour se donner l'impression de maîtriser un tant soit peu cette vie, nous créons divers artifices pour justifier nos actes. Voilà pourquoi j'ai choisi d'appeler cet album "Manufactured Landscape". Nous sommes les seules créatures sur Terre à être capable de modifier suffisamment notre environnement pour nous en croire maître.
 
Et sur le plan composition, comment procédez-vous ? Où cherchez-vous votre inspiration ?
Pas de méthode particulière, la plupart du temps, on improvise sur une base mélodique ou rythmique et la composition se fait plus ou moins d'elle-même. Une fois la base établie, nous travaillons les différentes possibilités mélodiques et les détails rythmiques. Une fois que nous avons passé cette étape, je remets tout en cause et on recommence ! Je suis l'empêcheur de tourner en rond ! D'un autre côté, je crois que, grâce à cela, nous avons une certaine qualité, celle de toujours essayer de faire mieux. Peut être cela rejoint-il ta question concernant l'engouement que les gens peuvent avoir pour notre musique... Je ne sais pas vraiment au final.

Sur Divine Proportion, vous aviez déjà posé les bases de ce nouvel album, à savoir celles d’une musique à la fois agressive et intime, entrecoupée d’instants de calme profondément meurtris et touchants. Vous avez déjà une idée de ce que vous souhaitez développer sur le prochain opus ?
Aucune idée... Nous avons évoqué l'idée d'enregistrer quelque chose cette année pour préparer les dix ans du groupe. Nous en avons déjà parlé avec notre label Division Records et ça les intéresse. Peut-être un objet un peu particulier avec diverses collaborations. Mais rien n'est fait, il ne s'agit pour l'instant que de mots et d'idées. Nous en reparlerons certainement au cours des six prochains mois.

ASIDEFROMADAY

Personnellement, j’ai regretté que les textes ne soient pas fournis dans le livret de l’album. De quels sujets traitent les paroles ?
Comme je l'ai expliqué plus avant, "Manufactured Landscape" est un cri d'alarme et un appel à la prise de conscience sur la futilité de nos vies. Je ne prétendais pas révolutionner le monde en écrivant les textes de cet album. Que celui qui rêve de radicalement changer notre société remballe ses affaires et rentre chez lui. Il y a longtemps que je suis revenu de ses discours dans lesquels on prétend tout vouloir changer, en mieux évidemment. Je ne suis pas blasé, mais la machine dans laquelle nous sommes embarqués, que nous avons créée au demeurant, est devenue bien plus forte que nous. Nous sommes devenus des espèces de choses ballottées par le bon vouloir de cette mécanique qui nous dépasse. Ce qui m'étonne le plus encore c'est que nous restons persuadés de maîtriser cette chose. Nous sommes en train d'en constater les résultats aujourd'hui. Plus de pauvreté, d'exclusion, de pollution de notre monde et de notre esprit. Je reste pourtant un amoureux de la vie et de ses bienfaits. Comme quoi, nous restons un paradoxe de par notre nature et de par nos actes...en tout cas en ce qui me concerne.

La signature chez Division Records est finalement des plus évidentes. Vous collez vraiment avec les groupes signés chez ce très bon label suisse.
Nous sommes plus que satisfaits de faire partie de la famille Division Records. C'est un très bon label avec une certaine qualité et un savoir-faire basé sur une expérience qui date de pas mal d'années maintenant. C'est une très bonne opportunité pour Asidefromaday, être en collaboration avec des personnes passionnées qui se donnent les moyens de soutenir et promouvoir leurs groupes est gratifiant et rassurant.

En octobre 2008, vous avez entamé une tournée européenne d’une quinzaine de jours en passant par l’Allemagne, la Hollande, le Luxembourg, la Suisse, la Belgique et la France. Quel(s) pays renferment le meilleur public selon toi ?
Difficile à dire, j'ai une préférence pour l'Allemagne et la Suisse. J'ai le sentiment que ces publics sont plus intéressés par la musique que nous faisons que par une appartenance à une certaine mode de style musical ou vestimentaire. Je vais peut-être froisser certaines personnes mais la France reste l'un des pays où il est plus important d'arborer le dernier t-shirt d'un groupe à la mode que de vraiment partir à la recherche de groupes qui susciteront une passion. Je ne souhaite pas faire de généralité mais c'est un sentiment que j'ai pu vérifier quelques fois lors de nos concerts dans lesquels nous vendons plus de t-shirts que d'albums. Je trouve ça plutôt étrange mais il s'agit sûrement d'un de nos autres paradoxes. Bref... je ne souhaite pas faire le donneur de leçon plus que ça. C'est un peu décevant parfois. Malgré ces détails plutôt futiles, les gens aux concerts ne sont pas avares de compliments et c'est déjà beaucoup.

ASIDEFROMADAY

Vous annoncez sur votre Myspace que vous allez reprendre la route des concerts en avril 2009. Nicolas assure aussi l’une des trois guitares dans Stellardrive. J’imagine que cela doit vous demander un strict minimum d’organisation pour pouvoir caler tout ça… sans compter la vie à côté ?
Tout à fait, nous repartons en tournée en Avril pour une dizaine de jours pour continuer la  promotion du nouvel album. Cela demande en effet pas mal d'organisation. Nous travaillons tous maintenant, avec une vie de famille et cela demande pas mal de sacrifices. Heureusement, nous sommes maintenant épaulés par l'équipe de Division Records qui s'occupe du booking. Donc ça nous facilite la tâche et ça nous dégage du temps. Mais, oui effectivement, trouver une période ou nous sommes tous disponibles devient de plus en plus dur. Le fait que Nico joue dans Stellardrive ne "freine" pas vraiment Asidefromaday. En tout cas, pas jusqu'à aujourd'hui. Stellardrive n'a pas encore énormément tourné, on verra à l'avenir comment les choses se présentent.

Besançon est réputée pour être une ville regroupant un fort potentiel de groupes dans la lignée rock/metal/post-hardcore avec des groupes comme Gantz (RIP), Stellardrive, Ampools, Lead Orphans… Quels rapports entretenez-vous avec les groupes de votre région ?
Des rapports buccaux la plupart du temps... Bon on s'entend tous très bien, nous connaissons certains bruitistes depuis pas mal d'années maintenant. Chacun échange sur ses expériences et ses ressentis. Cela nous permet d'éviter certaines galères comme les plans concerts foireux par exemple.

Pour finir, vous figurez sur la compilation Falling Down, sortie cet automne par deux grands amateurs de post-hardcore/metal. Une chouette idée ambitieuse finalement. En quoi cela vous a touché de figurer sur la tracklist ?
Disons que cela peut passer pour une certaine reconnaissance, nous sommes peut-être devenus un groupe intéressant à force de nous acharner. Yann et Thibaut on fait un travail de dingue pour réunir tous ces groupes. Je ne sais pas si vous imaginez l'acharnement et la passion nécessaires pour faire aboutir un tel projet...plus de quarante groupes sur trois Cds ! Pour Asidefromaday, être aux côtés de groupe comme Pelican, Kylesa ou encore Knut, c'est très satisfaisant et gratifiant. Nous récoltons un des fruits de l'arbre que nous avons planté il y a des années.


ASIDEFROMADAY – Manufactured Landscape
Division Records / Season Of Mist

Site : www.asidefromaday.com

Myspace : www.asidefromaday.com