BLACK BOMB A

On rencontre beaucoup d’artistes lors de nos interviews, mais rares sont ceux qui impressionnent. Et Djag de Black Bomb A en fait partie. Intelligent, clairvoyant sur sa musique et son groupe, le monsieur fait vraiment partie des figures de notre scène hardcore hexagonale. Il nous parle ici de son retour dans le groupe, de ce nouvel album très réussi, sans langue de bois. Et comme en plus, ici, à la rédac’, on adore ce nouveau disque, l’échange n’en est que plus plaisant.

Interview parue également dans le METAL OBS' n°29 d'Avril 2009

 Entretien avec Djag (chant grave) – Par Geoffrey
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Quelles ont été les raisons de ton départ du groupe à l’époque ?
Ouh la, ça remonte à loin (rire). Je pense que c’était un ensemble de différentes choses. Il se passait beaucoup de choses dans Black Bomb à ce moment-là, on s’était déjà séparé du bassiste et du batteur originel qui étaient des potes et j’avais peut-être plus de mal à ce moment-là à trouver une cohésion à tout ça. En plus, il y avait le départ du Sriracha, le côté installation sur Lille qui ne m’emballait pas plus que ça…

Comment, tu n’aimes pas Lille (NDLR : la majorité de cette illustre rédaction du Metal Obs’ est à Lille ou en est originaire) ?
Ce n’est pas que je n’aime pas Lille (rire), mais ça faisait pas mal de bouleversements. Et en plus de ça, moi, j’avais tout simplement besoin de faire d’autres projets. Quand ça fait 10 ans que t’es dans un groupe, tu ressens parfois le besoin de travailler d’une autre façon en reprenant les choses à zéro. Je pense que j’avais besoin de prendre du temps pour moi-même ; le travail avec BBA est tellement prenant ! A un moment, j’avais du mal à avoir du recul. Tout cet ensemble de phénomènes a fait que j’ai arrêté. Parce qu’il y a quelque chose que je n’aime pas faire, c’est de ne pas faire les choses à 100%. J’aurais pu bien sûr continuer en prenant un peu plus de recul. Mais je n’avais pas envie de le faire comme ça, de prendre notre bébé artistique de cette manière-là.  Tout ça réuni a fait que j’ai préféré arrêter.

Et tu as pu faire tout ce que tu voulais faire pendant ce break ?
Oui, je pense. J’ai pas mal bossé sur moi-même et sur des projets qui me tenaient à cœur, notamment au sein du Noyau Dur. Ça m’a permis de voir où j’en étais, quelles étaient mes envies à ce niveau-là et de progresser.

Et donc, maintenant, le retour…
Moi, j’étais content de voir que le groupe marchait bien. Cela faisait maintenant 5 ans que le groupe était avec Arno. On s’était assez vite revu de toute façon, il n’y avait pas eu d’éloignement…

… tout le monde dans le groupe avait de toute façon compris tes raisons, il n’y avait pas eu de tension ?
Après, pendant un temps, tu as besoin de prendre tes distances. Ça reste un truc assez intime et même si tu peux comprendre les raisons, ça reste un coup dur pour le groupe. Moi, j’en avais conscience aussi, donc on a pris le temps de digérer tout ça. On avait refait des choses ensemble, puisque j’avais bossé avec certains sur le premier album du Noyau Dur. Eux-mêmes m’avaient invité sur le DVD et sur des concerts par ci, par là, pour faire des guests. Mais pour moi, c’était comme ça, Black Bomb continuait sa route, moi la mienne et ça roulait comme ça. Quand Poun m’a appelé, comme il le faisait de temps en temps, il m’a dit : « Voilà, avec Arno, ça va s’arrêter, est-ce que ça t’intéresserait de reprendre le truc, parce que nous, ça nous brancherait bien. Comme ça le faisait bien quand on bossait avec toi, voudrais-tu tenter le coup ? ». J’ai d’abord été surpris…

BLACK BOMB A

… Tu as dû réfléchir longtemps ?
J’ai pris 48h quand même…

Bah, ça va, c’est court.
Oui, c’est court parce qu’après, je sais que c’était la tension pour le groupe. Donc j’ai bien vérifié que c’était bien sûr pour Arno, parce qu’en aucun cas, je voulais lui prendre sa place. Je leur ai demandé de leur côté d’être bien certains que c’était une information sûre. Et puis au début, on s’est d’abord lancé sur une douzaine de dates étalées sur trois mois pour voir si ça collait toujours, voir si on allait retrouver l’alchimie. Parce que moi, après 5 ans, je me demandais si on n’allait pas tomber dans une parodie de ce que c’était avant, si j’allais retrouver mes marques et un sens à tout ça. On s’est quand même donné quelques mois. Mais la réponse a été assez rapide, on n’a pas eu besoin d’attendre les douze dates.  Moi, j’ai repris beaucoup de plaisir à retravailler avec eux. Les doutes se sont vite envolés. Je me retrouvé avec un groupe qui fonctionnait avec plus de maturité, plus de recul, moins d’égo. Ça m’a fait vachement plaisir de voir que les automatismes revenaient. Donc ok, on pouvait refaire un album ensemble.

Alors, ça nous amène donc à la composition de ce nouvel album.
Bah voila, j’ai finalement été obligé de venir sur Lille (rire). Après avoir esquivé ça pendant un moment, je n’ai pas pu faire autrement (rire). On a travaillé ça par de grosses sessions de deux semaines, où on travaillait non stop sur de nouveaux titres. On commençait avec des riffs de Sam en début de semaine et à la fin, on bossait avec tout le groupe pour voir comment ça sonnait avec le gros son et trouver des suites plus instinctives, comme de la compo live. Et en mélangeant ces deux trucs-là, on a avancé plutôt bien, puisqu’on avait des dates entre deux, et que ce n’est jamais évident de passer de l’un à l’autre. Finalement, on s’est vraiment fait plaisir en le faisant, à avancer, à faire les cons. En 8 mois, on avait composé 14 titres.

Dans une veine plus punk, plus dans l’urgence, un peu comme les débuts du groupe…
Oui, et j’ai oublié de dire que très peu de temps après mon retour, Pascal (NDLR : Scalp, l’autre guitariste) a lâché l’affaire, on s’est retrouvé à 5. On était un peu dans la même configuration que Straight In The Vein, où ça avance plus vite. Quelques chose de plus direct dans la manière d’aborder la musique, avec un seul guitariste. Au niveau des chants, Poun et moi, on se connaît très bien, c’est un peu télépathique par moments. Du coup, cet album-là a un côté plus instinctif, plus brut. Dès le départ, on avait envie de partir sur quelque chose de plus direct. Peut-être revenir aux fondamentaux du groupe.

BLACK BOMB A

Je l’ai trouvé plus rock aussi, comme ce que peut faire Poun dans Monroe Est Morte… On a vraiment l’impression que chacun s’est fait plaisir avec ce qu’il aime.
C’est ça. Je pense qu’on a réussi à être super ouvert à l’émotion artistique du moment de chacun. Que tout le monde puisse incorporer sa vision des choses, plus rock n’ roll, plus sombre aussi. On a réussi quelque chose qui garde une cohérence sur ce qu’il y a de plus ancien dans BBA, avec les influences de chacun.

On parlait des deux chants… Mais quand on écoute l’album, on se demande comment on a fait pour s’en passer ces dernières années ?
(rire) C’est gentil.

Vous êtes tellement complémentaires que ça en devient fusionnel par moment.
On se connaît depuis qu’on a 15 ans, avec Poun.

Les deux timbres se marient parfaitement.
C’est quelque chose qu’on avait senti à l’époque, sur lequel on voulait travailler. On a des influences qui se complètent bien, mais c’est difficile de l’expliquer finalement. Je suis en train d’essayer et je me rends compte que je n’y arrive pas (rire). Je sais que des gens regrettent Arno et je le comprends aussi, car ils s’étaient habitués à cette différence plus accrue entre le chant grave et plus aigu.
 


BLACK BOMB A – From Chaos
At(h)ome / Wagram


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