FEAR FACTORY


Back from the dead... un retour mécanique ?


Inattendu, ce nouvel album de Fear Factory l’est sur deux points. D’abord, l’inimaginable retour de Dino Cazares, guitariste et fondateur du groupe parti depuis trop longtemps voir si l’herbe était plus verte ailleurs, et surtout musicalement car l’album est une grande réussite. Vent de nostalgie, voyage dans le temps, toujours est-il que Mechanize nous renvoie à une époque où Fear Factory dominait son sujet.

Interview parue également dans le Metal Obs' 37 de Février 2010

Entretien avec Dino Cazares (guitares) – Par Geoffrey
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La question inévitable pour commencer cette interview, mais j’ai besoin d’entendre TA version de l’histoire de ce retour inespéré dans le groupe…
Woaw… Pour faire simple, il y a à peu près un an et demi, Burton a participé à un concert avec Ministry. J’étais présent dans la salle ; nous nous sommes croisés et nous avons commencé à discuter. Il a été un peu surpris, mais nous avons discuté alors à ce moment-là de banalités, en s’échangeant tout de même nos numéros de téléphone. Nous sommes restés en contact et puis quelques mois plus tard, il m’a appelé pour me demander si je voulais revenir dans le groupe.  A partir du moment où nous avions fait le ménage dans tout ce qui nous opposait, nous nous sommes revus et remis au boulot.

Avec tout ce qu’on a pu lire sur Internet, ce retour est un peu inespéré. Que peux-tu répondre aux personnes qui vont penser que ce retour est principalement motivé pour l’argent ?
Si certaines personnes se posent la question, c’est qu’ils ne connaissent pas le business de la musique (rire). Il est très difficile de nos jours de se faire de l’argent en sortant un disque et d’en vivre très bien, sauf si on s’appelle Slipknot ou Metallica. Nous n’avons jamais été aussi gros, et si nous avons eu du succès, ce n’était principalement qu’artistique, dans le sens où nos albums ont pour certaines personnes été innovants et créatifs pour leur époque. L’influence de Fear Factory dans la musique Metal d’aujourd’hui est encore audible dans de nombreuses formations. Il y a 19 ans, Burton et moi avons trouvé une formule, un style que nous avons appelé Fear Factory. Et de voir que presque 20 ans après cette formule, ce chant agressif mais aussi mélodique, ces types de riffs de guitare et de parties de batterie fonctionnent toujours, est un vrai succès pour nous. Financièrement, je n’en dirais pas autant (rire). Les gens ne se rendent pas vraiment compte. Ce n’est pas parce que nous vendons des disques, que nous faisons des concerts, que l’argent coule à flot. Ce sont les labels qui se font de l’argent. Pas les groupes…

…Mais beaucoup de personnes ne le savent pas vraiment…
Exactement. Alors dire que nous sommes revenus pour l’argent est un peu ridicule. Bien sûr que j’espère que nous aurons un peu d’argent avec ce disque, mais j’en doute (rire). Le plus important est que je sois revenu à mes racines, mon style de musique, dans le groupe pour lequel mon cœur bat tous les jours.

Du coup, comment as-tu vécu toutes ces années sans Fear Factory ? Est-ce que ça a été difficile en tant que musicien et tout simplement en tant qu’homme ?
Au début oui, cela a été très difficile. Après, j’ai été très occupé avec Divine Heresy, la composition, trouver le line-up, la promo, les tournées… Mais au début, ça a été très difficile [Ndlr : silence pesant].

FEAR FACTORY

Parlons un peu de ce nouveau bébé. Les émotions ont dû se bousculer la première fois que tu as recommencé à composer pour un album de Fear Factory…
J’étais très excité...

…et stressé ?
Oui, peut-être un tout petit peu à l’idée de ce que les gens allaient penser de ce disque. Mais c’est tout.  Mais au fur et à mesure de la composition, j’étais de plus en plus rassuré, et je savais que les gens allaient aimer ce disque. Du moins, ceux qui nous aiment (rire) ! La plus grosse réussite de ce disque pour moi est qu’il représente vraiment ce que Burton et moi sommes aujourd’hui, où nous en sommes musicalement. L’album est heavy, agressif, rapide, très mélodique… Il y a tous les éléments que tu veux entendre dans un album de Fear Factory. Donc au-delà du stress, nous étions surtout très excités.

Es-tu d’accord si je te dis que c’est le meilleur album de Fear Factory depuis Obsolete ?
(Rires) C’est le meilleur album pour le moment (rire).

Comment s’est passée la composition ?
Ça a été un peu différent des autres fois. J’ai composé beaucoup de morceaux de mon côté. J’ai ce que j’appelle mes « archives de riffs », un dossier sur mon ordinateur où se trouvent des pistes de guitares accompagnées par une batterie électronique. Une banque de données d’idées que j’ai eues en somme. Donc je suis arrivé avec des idées, et j’ai ensuite beaucoup échangé avec Burton sur la musique bien sûr, mais aussi sur le thème général de l’album, les textes des morceaux et même leur titre. Parce que parfois, un titre peut donner l’inspiration pour une chanson, comme un texte peut donner l’inspiration pour une chanson. Et vice-versa. Et échanger ainsi avec Burton a été très bénéfique. Et pour être sûr que tout fonctionne, il est venu habiter quelques semaines chez moi. Des semaines très riches, où les idées fusaient dans tous les coins. Et du coup, les morceaux étaient parfaitement ficelés, ce qui fait que lorsque nous sommes arrivés en studio, Gene et Byron ont su exactement ce qu’ils avaient à faire. Alors qu’on ne se méprenne pas non plus, beaucoup d’idées ont été très spontanées et nouvelles, mais j’ai aussi utilisé des riffs que j’avais en réserve.  Nous sommes très fiers du résultat. C’est la première fois que nous faisons un album aussi rapidement.  D’habitude, on mettait 3 ans à faire un album de Fear Factory ; là, il nous a fallu 4 mois pour la composition et les arrangements, et deux mois de studio.

Justement, tu parlais de tes idées « en réserve »,  et d’idées neuves, mais est-ce que cela a été facile de revenir à une écriture pour Fear Factory, alors que tes projets à coté (Divine Heresy, Asesino) sont quand même plus extrêmes ?
Oui, parce que Fear Factory est l’essence même de ma vie, le sang qui coule dans mon corps, mes trippes… Mais je vois ce que tu veux dire, dans le sens où Divine Heresy est plus agressif et technique. Pour la composition, j’ai vraiment essayé de trouver le mix entre du pur Fear Factory et de nouvelles influences. C’est pour ça qu’il y a beaucoup plus de riffs que d’habitude, des soli de guitare aussi, et un chant aussi plus agressif.  Plein de nouvelles choses, et en même temps, cela sonne tellement comme du Fear Factory !

Il y a toujours eu des concepts forts derrière chaque album de Fear Factory, même si la base de la dualité homme/machine n’a au final jamais vraiment changé, qu’en est-il cette fois ?
Mechanize représente vraiment l’aboutissement d’un concept commencé il y a 19 ans avec notre premier album. C’était en 1991, et l’album avait pour sujet le futur tel que nous l’imaginions à l’époque, un monde où les machines auraient pris le pas sur l’homme, qui serait alors devenu obsolète.  Comment les machines allaient prendre le contrôle de tout, et combien l’homme allait devenir dépendent de tout cela. Et regarde aujourd’hui, avec Internet, les ordinateurs, les téléphones portables… Toute la journée d’un homme est accompagnée par des machines. Et le pire, c’est que nous en sommes accros. On en parlait au futur dans le passé, mais dans Mechanize, nous en faisons le constat, et notre vision était bonne. Et à des machines, même vendre des disques devient obsolète (rire).

C’est une vision assez sombre de notre société actuelle…
Oui, mais tout va tellement vite. Tu peux même cloner un bébé si tu en as envie.

Cet album marque aussi le retour de Rhys Fulber à la production… Pourquoi ce retour ?
Laisse-moi te poser une question à mon tour, que penses-tu, toi, de ce retour ? (rire)

FEAR FACTORY

Je pense que c’est une très bonne idée !
Bonne réponse (rire)… Nous avions différents producteurs à l’esprit…

…Mais Rhys est le seul à vraiment comprendre votre musique !
Exactement, c’est ce que j’allais te dire. C’est vraiment lui qui nous a aidés à trouver le lien entre Soul Of A New Machine et Demanufacture, qui a comblé le vide qui nous manquait à cette époque pour que nous arrivions au résultat que nous recherchions. Et c’était bien avant tous ces logiciels comme Pro Tools qui vous rendent la vie plus facile (rire). C’est lui qui nous a aidés à trouver notre son, donc retourner avec lui était un choix évident. Et tout s’est parfaitement passé, il a su une fois de plus créer ce lien entre une musique électronique et une plus organique.

Mais quand on y pense, il a toujours été le 5ème membre du groupe…
Complètement…

Dans l’ombre, mais toujours présent.
Pas forcément toujours dans l’ombre, car avec Fear Factory, beaucoup de gens ont appris à le connaître et sont allés le voir pour qu’il produise leurs disques. C’est aussi surtout un musicien très talentueux.

Qu’attends-tu de ce disque ?
Ouh, c’est une question difficile. J’espère que les gens vont comprendre ce disque. J’espère qu’il aura du succès dans le sens où il nous permettra de continuer de tourner et d’en refaire un nouveau. J’espère donc qu’il me rendra un homme très occupé…

Sans oublier tout même pour autant Divine Heresy ?
Non, bien sûr. Je continuerai Divine Heresy aussi longtemps que je tiendrai physiquement. J’espère vraiment pouvoir monter une tournée commune avec les deux groupes, je croise les doigts.


FEAR FACTORY – Mechanize
AFM / Underclass