A
Sign Of Sublime est ton premier véritable album solo. Tu penses que le
moment était venu pour toi d’explorer de nouveaux horizons musicaux
?
C’est une question légitime pour les fans qui sont à fond
dans Angtoria, Cradle Of Filth ou ce genre de Metal épique, mais ces
styles musicaux ne sont pas nouveaux pour moi. Quant à savoir si c’est
le bon moment pour sortir un tel album… vu que je suis de toute façon
en première ligne pour essuyer le feu des critiques, autant se lancer
!
Que signifie ce titre, A Sign Of Sublime ?
Ça signifie que tu peux devenir tout ce que tu as envie d’être,
t’épanouir au niveau du look et du sexe en l’occurrence.
Cette confiance en toi fait que rien ne peut t’arrêter ou t’abattre.
A Sign Of Sublime, c’est ta manière de dire au monde que tu es
forte et intouchable.
Qui a composé quoi ?
Ken Newman s’est chargé des titres Metal, Martin Powell a composé
« Daddy’s Not Coming Home », « Genesis » et Chris
Rehn « A Newborn Failure », « The Devils Opera ». «
Bitch » (Ndlr : un inédit issu
des mêmes sessions) est une reprise de Meredith Brooks. Bien évidemment,
le résultat final n’est pas imputable à une seule personne,
chacun apporte sa pierre à l’édifice. Pour ma part, j’ai
écrit les mélodies et les lyrics.
Dans le clip de A Sign Of Sublime, chaque membre
du groupe est filmé séparément : c’est une idée
du directeur David Kenny ?
Non, ça vient de moi. J’ai essayé de faire les choses différemment.
Les gens ont la critique facile pour la musique ou les vidéos, mais ils
n’ont aucune idée des contraintes d’enregistrement ou de
tournage : il faut faire au mieux avec un budget serré. La réalisation
de ce clip a pris des centaines d’heures, mais ça, le spectateur
qui n’est pas de la partie ne s’en rend pas compte. J’ai eu
la chance que le coût final du projet ait été très
en-dessous du budget initial de 10 000 £. Il y avait un story-board, bien
sûr, et on s’est pas mal débrouillé… Je suis
contente du résultat, mais j’aurais juste voulu pouvoir bénéficier
de plus de moyens. En tout cas, j’espère que le clip plaira aux
fans car il se doit d’être un bon teaser de l’album.
Tu as écrit « Daddy’s Not
Coming Home » lorsque tu avais 12 ans. Peux-tu nous en dire plus sur ce
titre qui sonne un peu comme… disons… Cindy Lauper ?
Ah, ah, excellent ! Je prends ça comme un compliment, même si la
comparaison ne me semble pas évidente. Mon copain m’a dit que ça
lui rappelait plutôt « Janie’s Got A Gun » d’Aerosmith.
C’est curieux ce besoin qu’ont les gens de toujours comparer les
musiques entre elles. J’ai effectivement composé cette chanson
très jeune. Elle me rappelle les premiers titres de Tori Amos, qui sont
pourtant sortis après, ou encore Madonna. S’il y a une chanson
pour laquelle je serai déçue si le public n’accroche pas,
c’est bien celle-là.
Ton chant a évolué depuis l’album
d’Angtoria. Il semble même parfois un peu faux, comme sur «
Your Woeful Chair » : est-ce un effet voulu pour renforcer l’atmosphère
inquiétante de certains morceaux ?
Je vois ce que tu veux dire. Ça vient de la façon dont je tire
mes longues notes vers les bas en même temps que la guitare : ça
sonne d’une manière étrange mais ça n’est pas
faux pour autant. Par contre, je n’ai pas l’impression que mon chant
diffère de celui de l’album d’Angtoria. En tout cas, j’espère
que tu l’apprécies toujours autant.
Tu es proche d’associations contre l’enfance
maltraitée et l’expérimentation animale. As-tu un message
particulier à faire passer ?
Les gens m’écoeurent : tout ce qui les intéresse, c’est
de piller la planète. Je rencontre des filles-mères et un nombre
incalculable d’enfants et d’adultes qui ont été victimes
de viols. Des fans se sont reconnus dans les lyrics de ma chanson « God
Has A Plan For Us All » et m’ont contactée pour en parler.
Les femmes qui se pavanent en manteau de fourrure devraient être dépouillées
vivantes comme l’ont été les animaux qui leur permettent
d’être plus fashion… ou tout simplement plus connes. Quant
à celles qui achètent les derniers rouges à lèvres
testés sur animaux, elles n’ont rien à foutre des tortures
qui leur sont infligées. Les enfants et les animaux ont besoin de notre
soutien car ils ne peuvent pas se faire entendre. Le passe-temps favori des
gens, de nos jours, c’est de balancer des saloperies sur le Net, le cul
bien assis sur leur chaise. Alors oui, je fais des dons, je suis végétalienne,
et j’essaie d’améliorer les choses à mon niveau. Je
n’ai pas la prétention d’être parfaite, mais l’ignorance
n’excuse pas la cruauté envers quelque forme de vie que ce soit.
Tu as rejoint Cradle Of Filth à l’age
de 16 ans. Est-ce que tu as toujours voulu être chanteuse, et es-tu satisfaite
de la tournure qu’a prise ta carrière jusqu’ici ?
Je l’ai toujours voulu, oui, depuis mon plus jeune âge. Si je suis
satisfaite ? J’ai de la chance, même si je n’ai pas toujours
le loisir de m’exprimer pleinement. Je ne changerais rien si tout était
à refaire. C’est parfois dur de régler les factures en fin
de mois mais je chanterai aussi longtemps que possible !
Pourquoi as-tu quitté Therion ?
En plus de traverser une période difficile à l’époque
sur le plan personnel, les plannings des tournées de Cradle Of Filth
et Therion se sont chevauchés et c’est devenu impossible à
gérer pour moi : j’ai donc dû partir. Therion me manque tellement.
C’est dans ce groupe que j’ai mûri en tant que chanteuse.
Je serais prête à rempiler si Christofer (Ndlr
: Johnsson) me le demandait. Mais comme il vit en Irlande et qu’il
vient d’avoir un bébé, je ne sais pas s’il est prêt
à tourner de sitôt. On verra…
Restons un peu dans le passé : de quels
albums de ta discographie es-tu la plus fière ?
God Has A Plan For Us All d’Angtoria, bien sûr, parce que c’est
le premier album sur lequel j’officie en tant que frontwoman. Parmi ceux
sur lesquels j’apparais en tant que choriste, je dirais Nexus Polaris
de The Kovenant, Vempire et Midian de Cradle Of Filth. J’ajoute aussi
Vovin de Therion à la liste.
Quels sont tes groupes à chanteuse favoris
?
Oh, ce n’est pas vraiment mon truc. Voyons… Dead Can Dance, Madonna
et Alanis Morissette. J’admire aussi beaucoup Angela Gossow d’Arch
Enemy. J’adore sa voix, et quelle patate sur scène !
Comment prépares-tu ta voix avant d’entrer
sur scène ou en studio ?
Je m’échauffe. Mais je dois avouer que plus ça va, moins
je le fais avec sérieux. Je sais pourtant que si je reste plusieurs mois
sans la travailler, ma voix sera affectée. Elle a d’ailleurs bien
décliné, après toutes ces tournées où il
faut assurer même en étant malade ou sans s’entendre dans
les retours. La vie sur les routes est plutôt rude, il faut faire au mieux.
Le fait d’être végétalienne m’aide bien de ce
côté-là. Le pire pour un chanteur, ce sont les produits
laitiers : ils déposent une pellicule sur les cordes vocales. Il faut
donc éviter la malbouffe en général. C’est comme
quand on donne aux nourrissons des biberons de lait de vache qu’ils ne
pourront pas digérer, on ne nourrit pas les veaux au sein, que je sache.
Vas-tu partir en tournée avec les musiciens
de cet album ?
J’aimerais bien, oui… Tout dépend de leur emploi du temps.
En ce moment, par exemple, Martin Powell prépare sa thèse en musicologie
à l’université. Chacun a donc ses propres priorités.
Merci beaucoup pour toutes ces réponses
franches et argumentées. As-tu un dernier mot pour tes fans français
?
Abordez ce nouvel album sans a priori. Il est différent mais c’est
ce qui fait sa force !
SARAH JEZEBEL DEVA - A Sign Of Sublime
Rising Records / Plastic Head