THE HAUNTED


Question de points de vue...

The Haunted a toujours été un groupe à part dans le paysage Metal moderne. La formation suédoise n'a jamais fait comme les autres, se moquant du qu'en-dira-t-on, proposant toujours des albums personnels de très grande qualité. C'est encore le cas en 2011 avec Unseen, un disque qui risque bien de marquer un nouveau virage musical dans la carrière de ce phénomène. Nous avons donc taillé un bout de bavette avec le batteur du combo afin de faire le point sur le mystère Unseen et de nous y retrouver dans cette sinuosité stylistique.
Interview également parue dans le Metal Obs' 46 de Mars / Avril 2011
Entretien avec Per Möller Jensen (Batterie) par Vincent « Vinnie » Rapez
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Que s'est-il passé pour The Haunted depuis la sortie de Versus ?
D'abord, nous avons pas mal tourné afin de promouvoir cet album. Ensuite, nous avons pris un peu de repos bien mérité. Il nous fallait faire cette pause afin de nous ressourcer. Nous devions nous remettre en question car Versus n'a pas reçu un très bon accueil de la part de nos fans, même des plus ultimes. Nous avons alors pensé qu'il fallait changer notre manière de travailler. Nous faisions comme beaucoup d'autres groupes, nous composions d'abord la musique. L'idée principale était que cette fois Peter (Dolving, chant) vienne avec ses lignes mélodiques, que ce soit un couplet ou un refrain, et qu’on essaie d'écrire la meilleure musique possible pour les soutenir.

Vous avez changé complètement de style… Est-ce pour cela que vous avez décidé après Versus de publier un live et une compilation, afin de prévenir vos fans que le chapitre était clos ?
Non, pas du tout. Pour nous, Unseen est la suite logique de ce que nous avons fait auparavant. C'est juste que notre approche a été différente cette fois-ci. Je n'aime pas cette notion de chapitre fini, comme dans un livre. Ce qui caractérise principalement The Haunted, c'est notre son sur lequel nous avons beaucoup travaillé par le passé. C'est en quelque sorte la marque de fabrique du groupe. Nous l'avons trouvé de manière naturelle, à force de jouer ensemble depuis toutes ces années. Il est reconnaissable entre mille. Pour moi, c'est très clair. Ce nouvel album ne montre qu'une autre des facettes de The Haunted. Nous tenions tout simplement à rester honnêtes envers nous-mêmes car nous voulions essayer autre chose, mais aussi envers le public, car je ne pense pas que nous aurions encore pris le même plaisir à rester dans le même registre. Ce n'est déjà pas la première fois que nous faisons ce genre d'expérience, il suffit de regarder la différence entre nos premiers albums et Versus, par exemple. Nous aimons aussi surprendre nos fans. C'est aussi pour moi l'un des aspects importants d'être musicien. A quoi ça sert de faire de la musique pour uniquement copier ce que tu as déjà fait ? Pour moi, être musicien, c'est être libre : libre d'expérimenter, libre de retranscrire toutes tes émotions, même si elles peuvent paraître contradictoires ou opposées. Je ne serais pas satisfait de la situation inverse et je ne pense pas que les auditeurs de nos albums le seraient aussi, car comment un groupe non épanoui peut-il produire un bon album ? Ou alors, il se ment à lui-même et trompe donc ses fans. Rien n'a jamais été calculé dans The Haunted, nous avons toujours laissé parler notre inspiration au moment de composer. C'est, je pense, le meilleur moyen de rester créatif. De plus, nous n'essayons pas de vendre une certaine manière de vivre, avec notre musique. Nous ne faisons pas partie de cette catégorie de groupes. Nos fans sont en général ouverts et ne sont pas des fans typiques de Metal qui n'écoutent que ce style et rien d'autre. De plus, comme nous évoluons constamment d'album en album, chaque fan a son disque préféré, et chacun pour des raisons complètement différentes : c'est très enrichissant.

Mais ce changement de direction musicale opéré sur Unseen est quand même un pari très osé. Vous risquez de perdre pas mal de fans.
Je le répète, ça nous est déjà arrivé dans le passé. C'est un peu l'histoire de ce groupe. Lorsque Peter a été remplacé après le premier album, nous avons perdu des fans. Idem lorsqu’il est est revenu. Certes, nous en perdons à chaque fois, mais nous en gagnons aussi bien d'autres. C'est le prix à payer afin de continuer d’évoluer. Il est complètement impossible pour nous de plaire à tout le monde. Et je comprends parfaitement ça car il est vrai qu'il est difficile de suivre The Haunted. Personne ne sait jamais ce qu'il y a sur un nouvel album. C'est à chaque fois une surprise totale.
THE HAUNTED

Mais cette fois, vous avez poussé l'expérience encore plus loin car sur un titre comme « The City » par exemple, il y a des éléments typiquement Jazz. On est loin de votre style d'origine…
Je suis tout à fait d'accord avec toi et cela prouve bien que le groupe ne s'impose aucune limite. Il est vrai que c'est l'un des passages les plus déroutants du disque, beaucoup de personnes nous en parlent. Mais je trouve que cela s'intègre bien dans le morceau… C’était mon idée. En fait, j'essaie toujours de naviguer entre l'univers de The Haunted et le mien. Je m'entraine beaucoup tous les jours, dans divers styles, et je façonne mon propre monde. Alors, dès que j'en ai l'occasion, j'en incorpore certains éléments dans la musique de The Haunted.

Comme tu l'as dit, Peter est un élément clé de ce nouvel opus. Il a complètement changé sa manière de chanter. Comment a-t-il travaillé cet aspect ?
D'abord, il faut savoir que nous lui avons fait confiance à 100 %. Nous lui avons donné une totale liberté. Nous lui avons dit : « Laisse-toi aller dans tes expérimentations, nous te suivrons. Ne t’impose aucune limite ». C'était très important pour nous. Nous ne l'avons pas regretté car ce qu'il a essayé s'est avéré être excellent, ça a boosté sa créativité. Il ne s'est plus senti cloisonné par le style.

Unseen a été produit une nouvelle fois par Tue Madsen. Pourquoi avoir choisi de continuer avec lui ?
C'est le quatrième album que nous lui confions. C'est quelqu'un avec qui nous avons beaucoup de plaisir à travailler car il respecte les musiciens. Il a toujours de bonnes idées, travaille de manière collective, reste toujours très calme. C'est vraiment quelqu'un de talentueux. Il sait aussi comment nous fonctionnons, il connait exactement nos attentes et il évolue avec le groupe, ce qui est rare pour un producteur.

Quelles sont tes attentes par rapport à cet album ?
Je n'ai jamais d'attente particulière par rapport à la sortie d'un disque.

Mais alors, pourquoi continues-tu à en enregistrer ?
Simplement parce que je suis un musicien créatif. Si je ne pouvais plus créer, je deviendrais cinglé et je me suiciderais, probablement. Si je ne mets aucun espoir dans un disque, c'est pour ne pas être déçu. Car il y a tellement de paramètres qui déterminent le succès d'un disque : la promotion, les fans, tes propres idées, le fait qu'il sorte à tel ou tel moment... C'est la vie, personne ne peut tout contrôler. Advienne que pourra. De mon côté, la seule chose que je sais faire, c'est de proposer ce qui me semble être la meilleure musique possible à un instant donné. Cela fait partie du métier de musicien, et je fais cela depuis que j'ai 18 ans. C'est la seule chose que je sache faire dans la vie, je n'ai pas le choix.

Unseen est votre septième album. Est-il tout aussi important que les autres ou alors fait-il partie d'une certaine routine ?
Il est extrêmement important car c'est un album charnière qui nous permet d'ouvrir une porte vers le futur. C'est un disque déterminant pour le futur du groupe et sa manière d'évoluer. Nous ne saurions plus enregistrer un album avec dix titres super rapides comme dans le passé, nous avons tourné la page. Sans cela, il n'y a aucune évolution possible et le groupe disparaîtrait.

Cela veut-il dire que Unseen balise la voie que The Haunted » va suivre dans les prochaines années ?
Là, je n'en ai aucune idée. On y retrouvera sans aucun doute des éléments déterminants, mais comme pour chaque disque, le prochain risque encore d'être assez différent. Mais c'est trop tôt pour le dire car nous venons à peine de terminer celui-ci, nous n'avons pas encore pensé à ce que serait sa suite.
THE HAUNTED

Quels sont les thèmes abordés dans les paroles d’ Unseen ?
Il y en a beaucoup, mais je sais que Peter adore jouer avec deux aspects différents dans ses paroles. Il y a toujours un aspect général qui peut intéresser tout le monde. Mais en même temps, il y ajoute une partie plus personnelle. Pends le cas d'un titre comme « The City » : il parle d'une ville qu'il voit comme une espèce de cancer. Elle suce ton énergie et finit par détruire celui qui y habite. Elle force chacun de ses habitants à posséder toujours plus, mais au final on possède quoi ? Pas grand chose. En résumé, Unseen parle beaucoup de relations humaines.

D'où vient ce titre, Unseen ? Est-ce un choix par rapport au morceau du même nom que vous trouvez représentatif de l'ensemble de l'album ?
Nous avions plusieurs titres en vue, en fait. On s'était même arrêtés sur l'un d'entre eux. Et puis, lorsque nous avons choisi la pochette, nous nous sommes rendu compte qu'il ne correspondait pas à l'atmosphère de l'album. Nous avons donc repensé à cela et Unseen est apparu comme une évidence. C'est un peu comme si personne ne savait réellement mettre le doigt sur l'essence même de ce qu'est The Haunted.

Je suppose qu'il y aura une tournée pour défendre ce nouvel album…
Oui, bien entendu : elle débutera entre mars et mai. Nous allons nous produire en Asie et en Australie. Ensuite, nous reviendrons cet été pour la saison des festivals. Enfin, si l'accueil de l'album nous le permet, nous effectuerons une tournée en tête d'affiche à l'automne prochain.

THE HAUNTED - Unseen
Century Media / EMI

Myspace : www.myspace.com/thehaunted