ICED EARTH


Le monde selon Jon Schaffer...



Dystopia, 10ème album studio de la formation américaine Iced Earth pulvérise tous les espoirs et la tournée qui va suivre (deux dates en France) semble déjà promise à un grand succès. Nous avons profité de l’occasion du passage à Paris du guitariste Jon Schaffer, rocker altermondialiste convaincu, pour le questionner sur ses plans de bataille et l’arrivée d’un nouveau comparse au sein du groupe.

Interview également parue dans le Metal Obs' 50 de Nov. / Déc. 2011

Entretien avec Jon Schaffer (guitare) par Philippe Saintes
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Comment as-tu rencontré ton nouveau chanteur, Stu Block (ex-Into Eternity) ?
J’ai découvert Stu via les circuits traditionnels. J’ai trouvé une vidéo de son précédant groupe Into Eternity sur YouTube et je me suis dit : « Waow, ce mec a un look vraiment cool ». Je pouvais voir dans ses yeux qu’il avait la flamme. C’est aussi un vrai frontman. Il avait toutes les qualités que je recherchais chez un chanteur. L’étape suivante fut de l’inviter à passer une audition pour me rendre compte de l’étendue de ses performances vocales. Tout s’est très bien passé, comme tu peux le constater.

As-tu été surpris par le départ de Matt Barlow ou était-ce quelque chose d’inévitable ?
Lorsque Mark est revenu dans le groupe, je savais que c’était pour une période déterminée. Il est policier dans le civil. En 2008, il était parfaitement clair qu’il ne participerait qu’à des mini-tournées et enregistrerait un album tous les deux ans. Ce compromis convenait à tout le monde au départ. Mais aujourd’hui, l’industrie musicale a changé. Les ventes de disques sont en chute libre. Pour continuer à faire vivre Iced Earth, nous devons régulièrement être sur les routes. Mark peut gagner plus d’argent avec Iced Earth qu’en tant que policier, mais là n’est pas le problème. Il a décidé de se consacrer davantage à sa famille. Je sais de quoi je parle puisqu’il a épousé ma sœur. Ce n’est donc pas compatible avec la vie d’un groupe qui est en tournée huit mois sur l’année. Je respecte son choix et je lui souhaite le meilleur pour l’avenir. Nos routes se croiseront à nouveau, j’en suis convaincu, car notre amitié est indéfectible. Matt est aussi notre premier fan, il me l’a encore confié récemment. 

Stu a co-écrit 10 chansons de l’album. L’alchimie semble avoir rapidement opéré…
Absolument. C’est le début d’une nouvelle ère pour le groupe. Nous avons réalisé un très bon album avec un chanteur terriblement motivé qui a apporté un souffle nouveau. Son attitude et son énergie nous ont revitalisés. Il a été plus impliqué dans l’écriture que tous ses prédécesseurs. Stu et moi avons travaillé conjointement les mélodies vocales ainsi que les paroles. Ce gars-là a plein d’idées. Je suis confiant à présent dans l’avenir d’Iced Earth.

 ICED EARTH

Combien de temps a duré le processus d’écriture de ce nouvel album ?
Dystopia a débuté en janvier avec le travail d’écriture, mais ensuite Matt a annoncé son départ. J’ai donc dû m’arrêter, le temps de lui trouver un remplaçant. Le travail a réellement repris en Mars et au bout de quatre mois, nous sommes entrés en studio.

L’approche a-t-elle été différente par rapport à Something Wicked Part I & II ?
Je crois que nous sommes revenus aux sources avec Dystopia. Something  Wicked Part I & II étaient des albums épiques avec des orchestrations compliquées. A l’époque de leur création, je souffrais terriblement. Trois membres de ma famille sont décédés coup sur coup, mon frère, mon père et ma sœur. J’étais totalement dévasté. On peut l’entendre sur ces albums. Quand je réécoute les arrangements aujourd’hui, je constate que je souffrais énormément. Il y a beaucoup de mélancolie dans ces chansons. Dystopia, en revanche, est bourré d’énergie et de paroles positives.

Quels sont les titres de Dystopia dont tu es le plus fier ?
J’adore « Dystopia » et son intro. C’est un morceau dans la pure tradition Iced Earth que les fans devraient apprécier. Il montre aussi les capacités vocales de Stu. Le couplet est brutal et frénétique, ensuite tu as le pré-refrain avec son côté sombre à la Rob Halford, que j’interprète, et finalement le refrain qui est très mélodique. Tu as plusieurs ambiances dans cette chanson. L’idée est née de ma volonté de varier les plaisirs. Je n’ai pas envie d’ennuyer les gens. Mon deuxième morceau favori de l’album est «Anthem », une véritable tuerie, un hymne, il n’y a pas d’autre mot.  Nous nous sommes récemment rendus à New York pour réaliser les vidéos de ces deux titres. De manière générale, les réactions envers l’album sont positives. Les fans le considèrent déjà comme le meilleur de la carrière d’Iced Earth. C’est aussi mon opinion. Nous sommes tous excités pour la suite des évènements.   

On retrouve à nouveau l’inévitable Jim Morris à la production…
Jim est notre producteur depuis quinze ans. Ce fut à chaque fois une collaboration très productive. Il me paraissait normal qu’il prenne les manettes pour Dystopia. La sensation de confiance qui émane de lui est réellement étonnante. Il a apporté les riffs de Speed Metal et moi les riffs plus mélodiques. Jim m’a aussi beaucoup aidé à surmonter mes problèmes, suite aux drames évoqués précédemment. C’est à la fois un producteur et un ami.

Tu as déclaré que Dystopia (une société imaginaire organisée de façon à empêcher ses membres d'atteindre le bonheur) était un hommage au roman 1984 ou à des films noirs comme Dark City et V For Vendetta.
Le monde moderne techno-maniaque périclite. La pochette de l’album est une sorte d’avertissement. Nous devons être vigilants. L’occident qui se croyait invulnérable est clairement en danger. La crise économique et financière en est un parfait exemple. La situation devient chaotique, incontrôlable pour les forces qui dominaient jusqu'alors le système. Les Etats s’endettent. C’est inquiétant.

Dans le même ordre d’idée, tu as mis en ligne il y a deux ans un album concept téléchargeable gratuitement sous le nom de Sons Of Liberty… Une démarche étonnante. On peut s’attendre à une suite ?
Un EP cinq titres devrait voir le jour en Décembre. Ce projet m’est très personnel. Les paroles sont fortes, j’avais un besoin énorme de m’exprimer. On retrouve toutes les émotions et tous les sentiments qui me rongent. L’essentiel de ma colère porte sur le soi-disant pouvoir de la haute finance et la corruption.

Jon Schafer, le révolutionnaire, est également passionné d’histoire. L’album The Glorious Burden (2004) en atteste. Quel pan de l’histoire des Etats-Unis te passionne le plus ?
Depuis que je suis gosse, je suis fasciné par la révolution américaine. J’aimerais être le témoin d’une nouvelle révolution aux Etats-Unis aujourd’hui en faveur des libertés. Ce serait quelque chose d’excitant.



Comment décrirais-tu la musique d’Iced Earth ?
Nous sommes Hard et puissants. Nous voulons refléter une évolution permanente sans pour autant changer de style. Nous pensons que le feeling doit prédominer naturellement sans renforcement technologique écrasant.

Tu dis « nous », mais depuis la création de Iced Earth, le line-up a constamment changé. Ce doit être troublant pour les fans.
Nous fonctionnons réellement en tant que groupe aujourd’hui. Autrefois, c’était davantage un projet qui reposait sur mes épaules. Les gars sont très proches. Nous avons beaucoup de fous rires ensemble, on s’amuse énormément et Stu a capté notre sens de l’humour. L’alchimie n’a jamais aussi bien fonctionné que maintenant. Tu peux l’entendre sur Dystopia.  

Etes-vous fiers d’être considéré comme un groupe particulièrement intègre ?
C’est quelque chose à laquelle nous ne réfléchissons pas. Heureusement, nous avons cette réputation. Maintenir son intégrité est une chose importante pour les fans. Ils ne sont pas dupes.

En ces temps de crise dans l'industrie de la musique, le genre Heavy Metal survit encore relativement bien…
Tout à fait. Le Metal ne mourra jamais grâce aux fans, mec. Pour une partie de la population, c’est  une sorte de religion. Tu as l’impression de faire partie d’une communauté. Je suis convaincu que les groupes de Hard auront à nouveau leur heure de gloire, mais il faudra pour cela qu’ils trouvent leur voie au cours de ce 21ème siècle. Les choses ne seront plus jamais comme dans les années 70 ou 80. Chacun doit évoluer pour tirer son épingle du jeu aujourd’hui. 

Pour conclure, donne-moi trois bonnes raisons d’acheter Dystopia.
Tu n’as pas besoin de trois raisons, une seule suffit (rires). Si tu es un vrai metalhead, tu dois avoir cet album dans ta collection. C’est le plus fort de notre catalogue. Iced Earth a connu une dernière décennie difficile, mais cette fois notre moral est au zénith. Dystopia va être une grosse claque, j’en suis convaincu !


ICED EARTH - Dystopia
Century Media / EMI



Site : www.icedearth.com

Myspace : www.myspace.com/icedearth