Intw IMMOLATION Fév. 2017

Hello Ross ! C’est Will, de Metallian Magazine, France, et Noiseweb... Comment ça va, depuis le temps?
Yeah, super ! Metallian et Noiseweb ! Excellent, mec, vous êtes là depuis un bail, non ?

Oh, eh bien, presque vingt-cinq ans pour le magazine et plus de 20 ans pour Noiseweb !
Oui, nous avons déjà fait plein d’interviews avec vous, vous avez toujours soutenu le groupe, c’est cool de te parler aujourd’hui.

Kingdom Of Conspiracy est sorti en 2013. Hormis entre Dawn Of Possession et Here In After, c’est la première fois que vous mettez autant de temps pour sortir un nouvel album. Pourquoi ce délai de quatre ans ?
C’est une bonne question. Déjà, l’écriture de cet album a pris un peu plus de temps que d’habitude. En général, entre le moment où nous commençons à écrire un album, et le moment où nous sortons du studio, il se passe quatre mois, et là, ça a pris six mois. Il y a deux facteurs à cela : le premier, c’est que quand Rob Vigna s’y est vraiment mis, il n’avait que trois titres vraiment prêts et il a bloqué sur certains riffs par la suite. La deuxième raison est qu’en Septembre 2015, notre batteur Steve s’est fait une triple fracture de la cheville, un truc sale, et a dû être opéré. S’en sont suivis six mois de rééducation, où il a quasiment dû réapprendre à marcher et à jouer de la batterie. Finalement, nous avons décidé de prendre notre temps, d’attendre que Steve récupère, et nous nous sommes reconcentrés sur l’écriture, sans pression. Normalement, ce disque aurait dû sortir fin 2015 mais comme tu peux le voir, nous avons juste un an de retard sur le planning (Rires !).

D’après ce que j’ai cru comprendre, Bill Taylor ne ferait plus partie du groupe, et aurait été remplacé par Alex Bouks (ex-Incantation, ex-Master, ex-Goreaphobia…) ?
Oui, tout à fait. Il a quitté le groupe au retour de notre tournée Australienne, en Octobre de cette année. Malgré son départ programmé, nous sommes très contents qu’il ait pu participer à cette tournée avec nous car c’était la première fois où nous pouvions nous rendre en Australie et en Nouvelle-Zélande. Tout le monde méritait sa place sur cette tournée, car il est quand même resté seize ans dans le groupe. Son départ est dû à des difficultés personnelles et physiques, aussi bien du côté de sa femme que du sien, tout ça combiné devenait trop lourd à porter. Nous n’avons pas voulu son départ mais nous le soutenons dans sa décision, car il ne nous a pas pris de cours, et nous sommes toujours amis.
Nous avons donc contacté Alex Bouks, que nous connaissons depuis plus de vingt ans, et Bill a d’ailleurs totalement soutenu cette décision. Tout le monde est content au final, c’est le principal.

Dis-moi, avec le recul, que penses-tu de la manière dont a été accueilli votre album précédent, Kingdom Of Conspiracy ? Et quelles différences vois-tu avec Atonement, s’il y en a, bien sûr ?
Kingdom Of Conspiracy a été super bien reçu, la presse et les fans l’ont vraiment soutenu. C’était un album bien rentre-dedans, avec beaucoup de parties rapides, de folie. Nous en sommes toujours très fiers, même si nous avons reçu quelques critiques concernant le son de la batterie, qui était peut-être un peu trop "mécanique", trop produit. Et nous sommes d’accord. C’est donc un point que nous avons corrigé sur le nouveau disque. Au niveau des chansons, je pense qu’Atonement est peut-être un peu moins rentre-dedans au prime abord, parce que plus sombre. Cet album est évidemment une combinaison de tous les éléments du style Immolation, mais tout y est plus sombre, hanté par la noirceur.

Sur Kingdom Of Conspiracy, vous faisiez un constat très noir de la société dans laquelle on vit, tout en envisageant un futur possible. Quatre ans plus tard, quelle est votre vision ?
Ça n’a pas changé (Rires !). Pour être honnête, je n’ai pas l’impression que les choses se soient arrangées. Au niveau des paroles, je pense que les thèmes abordés sont les mêmes qui nous ont inspirés sur les deux albums précédents, c’est-à-dire que nous faisons un constat très critique du Monde actuel et de l’Humanité, car au final, c’est "elle" qui crée les problèmes. Je reprécise que nous ne faisons pas de politique, car je pense que tous les politiciens sont des loosers, nous sommes juste de plus en plus critiques envers les gens, les religions monothéistes, etc. Une partie de l’Humanité est totalement corrompue, facilement manipulable, et ce, partout ! C’est ce genre de trucs qui nous gonfle, tu vois ?

Je ne vois pas de morceaux faibles sur cet album, ce que je veux dire, c’est qu’on sent que vous mettez la même intensité sur chaque titre, et pourtant, on sait que certaines chansons ne seront jamais jouées en live… Ce n’est pas frustrant, à force, après dix albums ?
C’est une bonne question car les gens ne se rendent pas forcément compte que quand tu écris un album, tu mets 110% de ce que tu as dans chaque titre, sauf qu’il y a toujours des titres qui "brillent" un peu plus que d’autres. Je pense que sur cet album, chaque titre est vraiment intense et se suffit à lui-même, et il n’y en a aucun que je n’aimerais pas jouer live. Ceci dit, nous avons des incontournables dans notre setlist, et nous n’ajouterons que quelques nouveaux titres.

Depuis plusieurs albums, vous utilisez la même équipe, avec Paul Orofino et Zack Ohren pour le son, et Par Olofsson pour l’illustration. Pourquoi est-ce, selon vous, la meilleure formule ?
Tout simplement parce que nous nous entendons parfaitement, et à ce titre, nous avons trouvé la "formule magique". Paul Orofino est "notre" gars, c’est le huitième album que nous réalisons avec lui, auxquels on peut rajouter les EP’s Hope And Horror et Providence. Paul est comme un membre de notre famille, tu vois ? Nous adorons travaillé avec lui, pour son humilité, son attitude et son professionnalisme. Il sait exactement ce qu’il fait, et nous apprécions ce facteur « confort » quand nous sommes dans son studio.
Zack Ohren s’est donc à nouveau chargé du mix et du mastering, et plus que sur tout autre album d’Immolation, il a assuré un max ! Il a parfaitement restitué ce que nous voulions pour cet album, à savoir que nous voulions que chaque instrument ait de la place pour "respirer", tout en gardant un ton général très sombre. Ces deux gars sont phénoménaux mis ensemble, et nous ne changerons plus.
C’est un peu la même chose avec Par Olofsson. Déjà, c’est un super mec et il a un talent fou pour donner vie à nos idées. Il a fait un superbe travail pour la pochette de l’album, et nous avons aussi Zbigniew Bielak, un artiste Polonais, qui est intervenu pour les illustrations du livret. J’ai hâte que vous puissiez voir ça, son style fait de traits noirs sur blanc est juste incroyable.

A voir la pochette de l’album, avec cette sorte d’Ange de la Mort, et cette ville en ruines, les fans vont s’attendre à un album très sombre, alors que Kingdom Of Conspiracy l’était déjà énormément. Pensez-vous avoir poussé le bouchon encore plus loin à ce niveau, cette fois ?
Je pense que oui. Harnessing Ruin était jusqu’à ce jour notre album le plus sombre, mais je pense qu’Atonement l’est encore plus. La musique, les paroles, les thèmes, tout est plus sombre ici, même si les paroles peuvent avoir plusieurs interprétations. En gros, quand tu les lis, tu n’as pas forcément envie de venir nous serrer la pogne (Rires !). Les illustrations sont également importantes de ce point de vue, c’est un package complet, raison de plus pour ne pas télécharger l’album. Tu as raison, tu sais exactement à quoi t’attendre en voyant la pochette du disque.

Tu sais, quand Kingdom Of Conspiracy est sorti, ça avait été ma sélection du mois, et je pense que ce sera encore la même chose cette fois. Pour moi, vous êtes vraiment au-dessus de la mêlée de ce qui peut sortir actuellement, et ce disque me botte bien le cul. Et je ne te fais pas de la lèche quand je te dis ça, je suis sincère…
Oh, merci, c’est très gentil de ta part ! Tu sais, on ne sait jamais trop à quoi s’attendre car c’est notre dixième album, et le challenge est de continuer à intéresser les gens, sans se répéter. Tu sais, je vais faire part de ta remarque à Bob, et ça va lui faire plaisir, car nous avons quand même un peu galéré cette fois-ci pour cet album, comme je t’en parlais tout à l’heure. Nous nous posons toujours les mêmes questions : est-ce que ça va plaire aux gens autant que ça nous plait, est-ce assez sombre, est-ce que c’est original, etc. ? Bref, ce genre de remarques nous rassure, je dirais même que ça fait du bien (Rires !).

De nombreux groupes sortent un album en se disant certainement "OK, écrivons un nouvel album, comme ça, on pourra engranger de nouvelles recettes". Or, le fait que vous ayez mis quatre ans à sortir ce nouvel album me fait penser que ce n’est pas forcément votre cas. Les gains générés par Immolation suffisent-ils à vous permettre de payer vos factures ou avez-vous une autre activité à côté ?
Nous n’avons jamais réussi à vivre du groupe, je dirais même que nous avons plus perdu d’argent en tournée que nous n’en avons gagné. Ça n’a jamais été une question d’argent pour nous, même s’il faut reconnaître que ces dernières années, nous parvenons à rentrer chez nous avec une somme qui nous permet de payer nos factures accumulées pendant notre absence. De ce point de vue, on peut dire que les choses vont dans le bon sens. J’aimerais que les gens se rendent bien compte qu’en Février, ça fera vingt-neuf ans que ce groupe existe, et que ça a été une longue route pour nous, et qu’il a fallu se battre pour être toujours là. Et tout ce que je peux dire, c’est que nous avons toujours faim, nous sommes toujours déterminés à créer quelque chose que nous apprécions.
Pour répondre à ta deuxième question, oui, nous travaillons à côté. J’ai par exemple été chauffeur routier pendant presque treize ans. J’ai quitté ce travail en Mai, parce que nous avions trop de concerts à donner, plus le travail en studio. En gros, je n’ai pas été chez moi de Mai à fin Octobre. J’ai donc dû quitter mon job car je ne pouvais pas en demander plus à mon patron, qui a vraiment été super cool avec moi ces treize dernières années. Je ne pouvais pas lui demander de me garder la place au chaud pendant plus de six mois, sa boîte doit tourner. Je pense que c’est en fait la première fois de ma vie où je n’ai pas de travail fixe plus de six mois, c’est un peu bizarre pour moi.

Je pense que ça va surprendre pas mal de gens de lire ça, parce qu’on s’imagine que les plus gros groupes de la scène death metal vivent de leur musique…
Oui, c’est sûr que ça va paraître étrange aux yeux de certains. Crois-moi, ce n’est pas parce qu’on fait des albums, qu’on tourne, qu’on roule sur l’or. J’ai toujours travaillé jusqu’en Mai, et je sais d’avance qu’après la prochaine tournée, je devrais retrouver un emploi. Bob travaille aussi, il a même deux emplois, un pour la semaine, et un pour le week-end. Steve travaille également. Il n’y a guère que Bill qui ne s’en sortait pas trop mal avec les gains générés par les tournées, car la vie en Floride est beaucoup moins chère qu’ici à New-York, et sa nana gagnait suffisamment pour subvenir à leurs besoins.

J’ai cru comprendre que vous allez tourner en avril / mai avec Vader en Europe. Voilà qui nous promet de bons concerts ? A quoi doit-on s’attendre en termes de setlist ? Quels nouveaux titres pensez-vous jouer ?
Je pense que nous mettrons trois ou quatre nouveaux titres. Il y aura pour sûr "Epiphany" car c’est un titre que nous jouons depuis les festivals d’été 2016, "Destructive Currents" car c’est la première chanson que nous présentons officiellement au public de cet album, il y aura "The Distorting Light", "Fostering The Divide" et "When The Jackals Come". Ouais, bon, en fait, ça fait cinq (Rires !).

Tu sais, j’organise un Festival à Mâcon, le Festival de Chair et d’Acier, et je voulais vous avoir avec Vader le samedi 22 Avril, et ça n’a pas été possible au niveau des dates… Dommage…
Oui, c’est de notre faute, car nous nous étions déjà engagés sur un festival, fin Avril, à Philadelphie, et du coup, Massive Music, le tourneur, a dû décaler certaines dates, car nous devons justement être de retour chez nous le 28, et du coup, certaines dates ont dû être squeezées. Je suis vraiment désolé…

Oui, moi aussi, mais crois-moi, ce n’est que partie remise ! Bon, Ross, merci pour ton temps et tes réponses…
Merci à toi, c’était cool comme interview, car je suis là peinard chez moi à parler aux gens, juste avant les Fêtes, donc tout va bien ! Les amis, nous serons là en Avril, nous sommes impatients de présenter notre album, et nous reviendrons aussi avant la fin de l’année 2017. Tu sais, nous aimons beaucoup la France, les gens nous ont toujours énormément soutenus, nous y avons plein d’amis, donc nous avons hâte de revenir chez vous. Je profite de cette interview pour souhaiter une bonne année à tout le monde, en espérant qu’elle vous verra tous en bonne santé !

IMMOLATION – Atonement
Nuclear Blast Records

Facebook : www.facebook.com/immolation

The sound of perseverance... Un batteur qui se fracture salement la cheville en trois morceaux, le guitariste rythmique Bill Taylor qui quitte le navire après seize ans de bons et loyaux services, le fait que les gars ne roulent pas sur l’or, il n’en fallait pas plus pour retarder d’un an la sortie d’Atonement, le nouvel album des New Yorkais, qui vont bientôt fêter leur trente ans d’existence ! Pour Ross Dolan, le monde et les religions sont tout aussi pourris qu’il y a quatre ans, pas étonnant donc de se retrouver un disque très sombre. Voici quelques thèmes que nous avons développés avec le sympathique bassiste-chanteur au téléphone… Interview parue également dans le Metallian 99 de Janvier 2017 (entière ici)
Entretien avec Ross Dolan (basse, vocals)…. Par Will Of Death
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